Evasion fiscale : les ONG dénoncent la passivité du gouvernement français

Pionnière dans la lutte contre l'évasion fiscale voilà quelques années, la France se contente aujourd'hui de soutenir l'action de l'OCDE, dénoncent quatre ONG européennes, dont Oxfam et ccfd-terre solidaire
Ivan Best
Le ministre des Finances, Michel Sapin, approuve désormais une harmonisation fiscale des sociétés a minima, dénoncent les ONG

« La France est passée en l'espace de quelques années, aussi bien au sein de l'UE que sur la scène internationale, d'une position pionnière, n'hésitant pas à prendre des décisions unilatérales ouvrant la voie dans la lutte contre l'évasion fiscale, à une position de passivité grandissante ». C'est ce qu'affirment quatre ONG européennes -Oxfam France, eurodad, European Network on Debt and Development, ccfd-terre solidaire- dans un rapport publié ce mardi.

La France auparavant en pointe sur la transparence, semble reculer

L'argumentaire, qui tranche sur les déclarations gouvernementales très fermes contre l'évasion fiscale, s'appuie d'abord sur le dossier de la transparence. La France a été la première à demander la transparence sur la localisation des bénéfices des entreprises financières multinationales -banques-, qu'elle a mise en œuvre avant que cette obligation ne soit reprise au niveau européen. De fait, il est possible aujourd'hui de connaître les profits, le nombre d'emplois, l'activité... réalisée par une banque dans tel ou telle « juridiction » ou... paradis fiscal.

Mais la plupart des ONG réclament que soit imposée une telle publicité des comptes à toutes les entreprises transnationales, bien au-delà des banques. Or, dans ses recommandations, l'OCDE, sur laquelle la France s'aligne actuellement, ne le prévoit pas. Ce qui est demandé aux entreprises multinationales, c'est de communiquer aux administrations fiscales la localisation de leurs profits, mais sans que ces données soient rendues publiques.
Autre sujet de friction lié à la transparence : la France été très en pointe dans la lutte contre le blanchiment, et a demandé dans ce cadre que soient mises en place des registres de propriétaires réels et bénéficiaires effectifs des trusts, ces structures largement opaques permettant à certains contribuables d'échapper à l'impôt. Paris avait tout l'air de vouloir que ce registre soit public, mais les fonctionnaires de Bercy assurent désormais que ce ne sera pas vraiment le cas.

L'approbation d'une harmonisation fiscale européenne a minima

Ce que reprochent aussi les ONG au gouvernement français, c'est son approbation d'une harmonisation a minima de la fiscalité des bénéfices des sociétés. La France soutenait voilà quelques années un projet ambitieux, consistant à harmoniser les règles de taxation, un bénéfice consolidé européen étant calculé pour chaque entreprise. Aujourd'hui, il n'est plus question de cette consolidation, ce dont semble se satisfaire le ministre français des Finances, Michel Sapin.

Le refus d'un organisme fiscal intergouvernemental

Toujours au niveau international, Paris a refusé l'idée de créer un organisme fiscal intergouvernemental sous l'égide de l'ONU, ce qui correspondant à une demande de nombreuses ONG soutenant notamment les pays en développement, parmi les plus grandes victimes de l'évasion fiscale. « Cela coïncide avec le projet de réforme BEPS de l'OCDE, fortement soutenu par la France, qui la considère comme l'instance compétente pour prendre des décisions sur les questions fiscales bien qu'elle exclue plus d'une centaine de pays » estime le rapport.

Le crédit impôt recherche mis en cause

« Malgré d'importants abus de nombreuses multinationales, mis en lumière par plusieurs rapports et enquêtes institutionnels, le gouvernement semble peu enclin à restreindre l'accès aux crédits d'impôt R&D » souligne le rapport. « Au contraire, il continue de considérer la R&D comme l'un des critères d'attractivité de la France, au détriment potentiel d'autres pays ».

 Le programme ambitieux des ONG

 Plus généralement, les ONG ont élaboré un agenda à destination des autorités européennes, beaucoup plus ambitieux que ce est qui actuellement prévu :

- Assurer la transparence en permettant un accès public aux informations sur le lieu et l'activité économique des entreprises ainsi que leur montant d'impôts payés
- Eliminer les échappatoires qui permettent aux entreprises multinationales de diminuer leur niveau d'imposition à des taux effectifs très bas, et ne pas mettre en place de nouvelles échappatoires
- Explorer la possibilité d'une réforme radicale du système fiscal européen et collaborer dans le sens d'une plus grande harmonisation fiscale
- Offrir aux pays en développement un siège à la table des négociations sur les règles fiscales internationales, et s'abstenir d'abaisser leurs taux d'imposition dans les conventions fiscales
- Offrir de réelles opportunités aux pays en développement de recevoir l'information des gouvernements européens sur les évadés fiscaux qui utilisent l'Union européenne pour cacher leur argent et échapper à l'impôt
- Démanteler les montages secrets qui permettent de détenir des entreprises de manière anonyme et facilitent le blanchiment d'argent .

Ivan Best
Commentaires 12
à écrit le 03/11/2015 à 15:38
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evident ceux au pouvoir ami de la finance sont en train de vendre et de piller le pays pour quelle raison un banquiers au finance et un proche a la bdf si ce n'est pour organiser la fuite et surtout la faible motivation a controler l'evasion fisc...

à écrit le 03/11/2015 à 15:05
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Pourquoi la France traine-t-elle des pieds pour l'harmonisation européenne de l'IS ? c'te question, parce qu'elle est championne d'Europe de cette taxation, l'harmonisation de cette taxation des bénefs ne pourrait se faire qu'à la baisse. Et comme el...

à écrit le 03/11/2015 à 14:36
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y a une solution on devrait obliger tous les gens de ces associations a creer des boites avec leur temps et leur argent en sacrifiant leur vie de famille, et les obliger a appliquer ce qu'ils pronent juste pour voir si ca tient la route bizarrement...

à écrit le 03/11/2015 à 12:57
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Plus facile d'accuser les autres et de donner des leçons au monde entier que de faire mieux soi-même. C'est une spécialité de notre gouvernement aussi dans d'autres domaines.

à écrit le 03/11/2015 à 10:39
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Si la dette augmente c'est aussi beaucoup à cause de cela, il faut financer la "protection sociale" au sens large, même celle de ceux qui "s'évadent fiscalement" et qui aiment néanmoins la qualité des soins en France.

à écrit le 03/11/2015 à 10:22
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Mais non, il n'est pas passif le gouvernement avec tout mou 1er. Non ils se hâtent lentement parce qu'ils sont pressés de faire un deuxième quinquennat pour enfin tenir leurs promesses..............................mais au fait lesquelles? Pas grave, ...

le 03/11/2015 à 15:05
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La parole de normal premier elle côté combien ??? Les promesses n'engagent que ceux qui y croient et pour croire ces monsieurs il faut être vraiment neuneu

à écrit le 03/11/2015 à 9:28
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En même temps, dès que le Gouvernement Français essaye de faire quoi que ce soit contre cette fraude massive, on assiste à un festival de beauferie dans les commentaires à propos des "Socialistes qui aiment pas la réussite" et autres "bolchéviques c...

le 03/11/2015 à 13:13
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+1: très bien résumé.

le 03/11/2015 à 13:59
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C'est tout à fait ça. Quand le gouvernement (quel qu'il soit) prend des mesures contre la fraude qui sont très vites impopulaires et ça cri à la spoliation de "l’État bolchévique". Quand le gouvernement (quel qu'il soit) prend des mesures d'assouplis...

le 04/11/2015 à 12:03
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Le courage politique serait de passer outre a la " beaufferie " anti impôt, pour reprendre votre excellent vocable; et a se décider a ce que la fraude fiscale puisse vous amener sous les barreaux, alors qu'elle jouit d'une mansuétude et d'une impunit...

à écrit le 03/11/2015 à 8:42
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La finance est mon ennemi !!!!

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