La contestation populaire n'est pas anti-démocratique

Le "CONTRARIAN" OPTIMISTE. Les élections récentes à Hong Kong se sont soldées par un rejet massif des candidats soutenus par Pékin. Le territoire est le théâtre de manifestations depuis des mois. Dans plusieurs pays, une partie de la population manifeste son mécontentement. Et le meilleur moyen pour les gouvernements de résoudre les différends est d'organiser des élections libres et d'en respecter le résultat. Par Robert Jules, directeur-adjoint de la Rédaction.
Robert Jules
Un bureau de vote à Hong Kong au moment du dépouillement.
Un bureau de vote à Hong Kong au moment du dépouillement. (Crédits : Reuters)

Le résultat des dernières élections locales à Hong Kong est instructif. Malgré six mois de contestation anti-gouvernementale, la montée de la violence et ses conséquences négatives sur l'économie, les électeurs se sont déplacés en masse (le double par rapport à 2015) pour accorder 90% de leurs voix aux candidats de la mouvance pro-démocratie, infligeant un désaveu à Pékin. La volonté du régime communiste d'imposer un projet de loi d'extradition vers la Chine continentale, abandonné depuis, et de mettre au pas la région semi-autonome régie par des principes démocratiques, est massivement rejetée.

Déclin de la liberté dans le monde

Hong Kong n'est pas une exception. Depuis des semaines, des foules importantes défient les régimes en place : Iran, où la répression est sanglante, Liban, Chili, Bolivie, Venezuela, Indonésie, Pakistan, Arabie Saoudite, Soudan, Turquie mais aussi Pologne, Hongrie, Roumanie, Russie, Catalogne sans oublier la France avec le mouvement des « Gilets jaunes ». Elles protestent contre des mesures gouvernementales qu'elles jugent injustes et le font savoir au nom de principes démocratiques fondés sur la liberté.

Or, selon le rapport annuel 2019 de l'Ong Freedom House, celle-ci est en recul : « 2018 a enregistré pour la 13e année consécutive un déclin de liberté dans le monde ». Même si « les pertes globales restent limitées comparées aux gains de la fin du 20e siècle », la tendance « est soutenue et de mauvaise augure ». Le phénomène s'explique par le déclassement économique que subit une partie de la population. C'est d'ailleurs une hausse du prix de certains produits surtaxés qui a déclenché la contestation en France (taxe carbone), au Chili (ticket du métro), au Liban (messagerie WhatsApp) ou encore en Iran (essence). C'est la goutte qui fait déborder le vase pour des populations qui se sentent les laissées-pour-compte de la mondialisation.

Populisme dangereux

Ces mouvements sont-ils une menace pour la démocratie ? Certains le pensent, voyant dans la contestation de la rue un populisme dangereux. A contrario, d'autres experts voient dans ces revendications populaires un signe de résilience face au pouvoir excessif des élites qui ont sclérosé le système démocratique. En fait, tout dépend de la nature du régime. Une étude de l'Institute for global change montre que les gouvernements populistes (de droite comme de gauche) tendent à rester plus longtemps au pouvoir (voir graphique) créant « un risque significatif d'érosion démocratique. » Au contraire, « le principe fondamental d'une démocratie libérale est le respect des résultats électoraux par les leaders qui, lorsqu'ils perdent, quittent leurs fonctions ».

démocratie graphique

Ce point est essentiel. Le philosophe Karl Popper (1902-1994) considérait dans « La société ouverte et ses ennemis » (éd. Seuil) que le système démocratique libéral a au moins l'avantage de permettre l'alternance politique sans violence et de protéger le peuple de la dictature. C'est la leçon que l'on peut tirer du scrutin de Hong Kong : confier à des élections libres le soin de trancher les différends entre citoyens et gouvernement.

Robert Jules
Commentaire 1
à écrit le 02/12/2019 à 9:04
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Après la dictature de la Chine ils vont connaître la dictature des partis politiques, enfin !

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