Quand l'industrie sucrière utilisait Harvard pour imposer son opinion

Dans les années 1960 l'industrie sucrière a influencé deux nutritionnistes de la prestigieuse université américaine, révèle un groupe de chercheurs. Elle les a poussés à conclure dans une étude que la consommation excessive de sucre n'augmentait pas le risque de maladies cardiovasculaires.
Jean-Yves Paillé
Aujourd'hui, l'industrie sucrière tente toujours de peser sur le monde scientifique. Une enquête d'Associated Press a révélé qu'un professeur de nutrition de l'Université d'Etat de Louisiane travaillait avec l'Association nationale des confiseurs.

Pendant des années, la prestigieuse université de Harvard a minimisé l'impact de la consommation de sucre sur la santé, à travers une étude de deux de ses chercheurs. C'est ce qui ressort d'une enquête publiée lundi par la publication scientifique The Journal of the American Medical Association (JAMA).

Des chercheurs universitaires ont découvert que deux nutritionnistes de Havard, les docteurs Mark Hegsted et Fredrick Stare, codirigeaient le premier projet de recherche du Sugar Research Foundation, un lobby de l'industrie sucrière, sur les maladies cardiaques dans les années 1960. Les chercheurs ont découvert en consultant des documents relatant les communications entre les deux docteurs et les industriels que ces derniers finançaient l'étude et avaient un droit de regard sur ses conclusions.

Le lobby industriel a ainsi payé les deux nutritionnistes l'équivalent de 48.000 dollars aujourd'hui, révèle The Journal of the American Medical Association. L'objectif des industriels du sucre était de contrer la conclusion répandue alors par une étude de John Yudkin,un physiologue britannique, que le sucre consommé en grande quantité pouvait être un facteur de risque important pour des maladies cardiovasculaires. Les deux chercheurs de Havard et le lobby des industries sucrières ont choisi de mettre uniquement en cause la consommation de graisses saturées. Aujourd'hui, l'université de Harvard, comme quasiment toute la communauté scientifique, certifie que le risque de mourir de maladie cardiovasculaire est accru par la consommation excessive de sucres ajoutés.

En 1967, une revue scientifique de référence, The New England Journal of Medicine, a publié l'étude des chercheurs de Harvard, sans mentionner le rôle joué par le lobby de l'industrie sucrière.

Les maladies cardiovasculaires, principale cause de décès outre-Atlantique

Si cette thèse de Harvard a été diffusée il y a une cinquantaine d'années, puis largement remise en cause par la communauté scientifique depuis, elle a eu une incidence négative prolongée, juge TheJournal of the American Medical Association. Le risque de contracter une maladie cardiovasculaire à cause des sucres ajoutés n'est pas mentionné suffisamment régulièrement, s'inquiète l'organisation.  Les maladies cardiaques sont la cause d"une mort sur quatre aux Etats-Unis. Il faut dire que la consommation de sucre par personne aux Etats-Unis a régulièrement progressé ces cinquante dernières années pour passer de 80 livres dans les années 1960 à environ 100 livres (45 kilogrammes) par an en 2010.

Et aujourd'hui, l'industrie sucrière tente toujours de peser sur le monde scientifique. Une enquête d'Associated Press a révélé qu'un professeur de nutrition de l'Université d'Etat de Louisiane travaillait avec l'Association nationale des confiseurs, un autre lobby de l'industrie sucrière. Le nutritionniste expliquait dans sa recherche que les enfants mangeant du sucre étaient plus minces que ceux qui n'en prenaient pas...

Jean-Yves Paillé
Commentaire 1
à écrit le 13/09/2016 à 21:52
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ça sa passe comme ça...

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