PODCAST Le jeu du mistigri des dépenses de santé

HISTOIRES ECONOMIQUES. Le budget de la Sécurité sociale a été voté lundi et cela risque de peser sur les tarifs des complémentaires santé l'an prochain. Écoutez chaque mardi 6h48 la chronique "Histoires Economiques" de Philippe Mabille dans le 5/7 de France Inter présenté par Mathilde Munos.
Philippe Mabille
(Crédits : Yves Herman)


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La facture promet d'être salée selon le cabinet Addactis, un spécialiste du monde de l'assurance, avec des augmentations de l'ordre de 8% à 12,5% pour l'ensemble du secteur.

Deux à trois fois plus que l'inflation, c'est énorme ! Et pas vraiment compatible avec la défense du pouvoir d'achat. La révélation de cette fourchette a fait bondir dimanche le ministre de la Santé, qui a accusé les compagnies d'assurance et les mutuelles de faire des patients « la variable d'ajustement de leur modèle économique ».

Comment justifier une telle augmentation ?

La première raison, c'est l'inflation « naturelle » et réelle des dépenses de santé des Français, qui progressent de plus en plus vite avec le vieillissement de la population et la hausse du prix des soins et des médicaments.

L'autre raison, qui va donner lieu à un sérieux bras de fer avec l'Etat, c'est la réforme Macron du reste à charge zéro, devenu « 100% santé ». Adoptée en 2019 en accord avec les mutuelles, elle prévoit une offre remboursée intégralement, sur un panier de soins en optique, dentaire et audition. Cette mesure en apparence généreuse a renforcé mécaniquement la part des complémentaires santé dans la prise en charge de ces dépenses.

L'Etat vient ainsi de transférer aux mutuelles 500 millions d'euros de dépenses dentaires supplémentaires par an, tout simplement en diminuant le taux du remboursement de ces dépenses par l'Assurance maladie.

Ce jeu du mistigri permet à l'Etat d'afficher discrètement une petite économie budgétaire au détriment des complémentaires santé. Ni vu, ni connu, ou presque, car les mutuelles et les assureurs se rebiffent en réclamant une compensation, à la charge des assurés...

Au ministère de la Santé, on conteste ces calculs

Aurélien Rousseau qui va convoquer les assureurs et mutualistes, va demander que la hausse des tarifs ne dépasse pas 4 à 5% l'an prochain.

S'il n'obtient pas gain de cause, la hausse sera plus proche de 8 à 12,5%, on le saura bientôt... Mais l'Etat a divers moyens de pression. Lors du précédent quinquennat, Olivier Véran, alors ministre de la Santé, avait menacé d'user d'une arme dissuasive, la création d'une « grande Sécu » qui centraliserait directement dans l'Assurance-maladie l'essentiel des remboursements, réduisant à presque rien la part de marché des mutuelles.

Il est vrai que celles-ci, en se livrant à une concurrence féroce, font payer à leurs assurés des dépenses de marketing faramineuses voire parfois somptuaires qui n'ont rien à voir avec des remboursements de soins. Un peu de décence et de sobriété dans la hausse des tarifs au nom du pouvoir d'achat serait donc la bienvenue...


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Philippe Mabille
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