Divisés, les Vingt-Sept trouvent un accord sur une... « feuille de route » pour endiguer la flambée des prix de l'énergie

Les dirigeants de l'Union européenne sont tombés d'accord dans la nuit de jeudi à vendredi sur une « feuille de route » visant à mettre en place, dans les prochaines semaines, des mesures destinées à contenir les prix de l'énergie.
(Crédits : PIROSCHKA VAN DE WOUW)

Un accord pour trouver un accord. C'est ce qui ressort de l'annonce dans la nuit de jeudi à vendredi du Conseil européen, marqué par des frictions entre le président français Emmanuel Macron et le chancelier allemand Olaf Scholz. Alors que les intérêts des Etats membres divergent sur les mesures à prendre pour contrer le choc énergétique provoqué par la guerre en Ukraine et les sanctions contre la Russie qui l'accompagnent, les dirigeants des Vingt-Sept se sont mis d'accord pour « travailler à des mesures pour contenir les prix de l'énergie pour les ménages et les entreprises », a annoncé cette nuit sur le président du Conseil européen Charles Michel. Alors qu'il évoque un accord « sur un paquet de mesures » qui doivent désormais être « traitées de manière fine », cet accord n'est autre qu'une « feuille de route » à l'issue incertaine. « Nous avons une bonne feuille de route, solide, qui nous permettra de travailler sur les prix de l'énergie », a déclaré de son côté la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

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Eviter une concurrence entre les pays européens

Selon les conclusions diffusées à l'issue de la rencontre, les chefs d'Etat et de gouvernement demandent à la Commission de leur soumettre « de façon urgente » des « décisions concrètes » sur un ensemble de mesures, dont des interventions pour dompter la volatilité des cours du gaz. Les Vingt-Sept se sont mis d'accord pour favoriser les achats en commun de gaz à l'échelle de l'UE, avec l'idée qu'ils restent « volontaires » mais couvrent au moins un niveau-cible « obligatoire » de 15% des objectifs de remplissage des stocks de l'Union européenne pour l'hiver 2023. Ils ont également appelé à « accélérer leurs négociations » avec des pays producteurs « fiables » comme la Norvège et les Etats-Unis, pour « tirer avantage du poids économique » agrégé de l'UE plutôt que de se faire concurrence sur le marché mondial au risque d'alimenter la fièvre des prix. Outre une mesure d'encadrement du prix de gros dans les transactions de gaz naturel, les dirigeants demandent par ailleurs un projet précis de mécanisme « temporaire » pour plafonner les prix du gaz utilisé pour produire de l'électricité --un dispositif déjà mis en place en Espagne et au Portugal, et dont la France réclamait l'extension à l'ensemble de l'UE. Mais, dans une concession faite à l'Allemagne, ce mécanisme devra être assorti de garde-fous pour « éviter toute consommation accrue de gaz ». Il devra aussi éviter que l'UE ne subventionne de l'électricité qui serait in fine exportée vers des pays voisins (Norvège, Royaume-Uni, Suisse...).

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Les ministres de l'Energie de l'UE se réuniront mardi pour discuter de ces mesures. S'ils ne s'entendent pas, un nouveau sommet des chefs d'Etat serait nécessaire, a indiqué Olaf Scholz. Pour Emmanuel Macron, « les objectifs de ce conseil sont atteints », a-t-il estimé en précisant que les mécanismes envisagés pourraient être mis en oeuvre « fin octobre, début novembre ». A ses yeux, les dirigeants européens ont « envoyé de manière très claire aux marchés un signal de (leur) détermination et de (leur) unité ».

Tête-à-tête entre Macron-Scholz

Ce Conseil a par ailleurs été l'occasion pour Emmanuel Macron et Olaf Scholz d'afficher une certaine volonté d'apaisement après les tensions qui ont éclaté au grand jour entre Paris et Berlin. Arrivés très divisés, les deux hommes ont eu un tête-à-tête d'une demi-heure, sans conseillers, avant de retrouver les autres dirigeants des Vingt-Sept. Une réunion qui a permis de « clarifier beaucoup de choses », a déclaré le président français. « On n'a pas toujours les mêmes positions, ce qui est normal », a-t-il encore dit, semblant minimiser les désaccords qui avaient été soulignés par le camp français en amont et durant le sommet. Quelques heures plus tôt, il avait en effet estimé que Berlin jouait une partition solitaire, semblant rejeter sur les Allemands la responsabilité des difficultés européennes.

« Je pense que ce n'est pas bon ni pour l'Allemagne ni pour l'Europe qu'elle s'isole (...). Notre rôle est de tout faire pour qu'il y ait une unité européenne et que l'Allemagne en fasse partie », a-t-il indiqué. « Il est très clair que l'Allemagne a toujours agi de façon très solidaire », a répliqué Olaf Scholz, précisant qu'il ne s'était « en aucun cas » senti isolé pendant les longues et laborieuses discussions sur l'énergie. Le chancelier allemand avait été accusé d'égoïsme après avoir annoncé fin septembre un plan de soutien à 200 milliards d'euros pour l'économie allemande, non concerté avec ses partenaires.

Ces tensions se sont concrétisées quelques heures plus tôt quand, sans concertation avec Berlin, Paris a annoncé jeudi avec l'Espagne et le Portugal un accord pour remplacer le projet de gazoduc MidCat par un pipeline sous-marin entre Barcelone et Marseille, destiné à acheminer du gaz puis de l'hydrogène vert. Lancé initialement en 2003, ce projet MidCat (pour Midi-Catalogne), était défendu par Lisbonne, Madrid et Berlin mais se heurtait à l'opposition de Paris. Il visait à relier les réseaux gaziers français et espagnol via un pipeline de 190 km allant d'Hostalric, au nord de Barcelone, à Barbaira, à l'est de Carcassonne, par les Pyrénées.

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« Faire un reset »

Alors que le président français recevra le chancelier allemand mercredi à Paris, Bruno Le Maire, le ministre français de l'Economie, a reconnu jeudi que les relations actuelles entre la France et l'Allemagne n'étaient pas faciles, appelant à une « redéfinition stratégique » pour remettre les compteurs à zéro sur certains points. Comme le président Emmanuel Macron, qui a déclaré à son arrivée à Bruxelles être déterminé à « préserver l'amitié et l'alliance » franco-allemande, Bruno Le Maire a parlé d'une « coopération essentielle ».

« Est-ce que les choses sont faciles en ce moment ? Non. Est-ce que c'est compréhensible ? Oui », a-t-il ajouté lors d'un débat sur la protection des entreprises contre la crise.

« Cela doit nous amener à une redéfinition stratégique des relations entre la France et l'Allemagne. Et à créer une alliance nouvelle, peut-être encore plus forte, mais en faisant un "reset" (redémarrer, ndlr) sur un certain nombre de points », a affirmé le ministre. Ce fervent germanophile a toutefois rappelé qu'il n'y avait « pas d'alternative à cette relation étroite entre la France et l'Allemagne ».

Dans un entretien au quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung qui lui demandait si Vladimir Poutine avait réussi à diviser l'Europe, il a affirmé que « personne ne pourra dissoudre le couple franco-allemand », mais qu'« une des erreurs de l'amitié franco-allemande était de vouloir mettre de côté les différences ».

Ces propos sont tenus au lendemain d'une réunion avec ses homologues allemands des Finances Christian Lindner et de l'Economie Robert Habeck, avec à l'issue des sons de cloche déjà sensiblement éloignés malgré un ton cordial. Auparavant, le gouvernement allemand avait annoncé le report à janvier du conseil des ministres des deux pays, prévu le 26 octobre, invoquant le besoin de « davantage de temps » pour s'entendre sur plusieurs dossiers tandis que Bruno Le Maire a prétexté « uniquement » des difficultés d'agenda.

Lors du débat, le ministre français a expliqué que les dissensions proviennent de raisons « qui bouleversent le modèle allemand ». Tout d'abord la guerre en Ukraine qui rend « obsolète l'idée d'une Europe bâtie pour la paix » et qui « doit désormais être là pour garantir la sécurité contre des agresseurs étrangers ».

Les visions s'opposent également, selon lui, sur le modèle énergétique, la France ayant annoncé sa préférence pour le nucléaire tandis que l'Allemagne le refuse et peine à se défaire du gaz russe tout comme de son partenaire chinois sur le plan commercial.

Côté allemand, les différends semblent résider dans la réponse apportée à l'inflation. Berlin défend une coordination des politiques monétaires des banques centrales et des politiques budgétaires des Etats, qui doivent veiller « à ne pas alimenter l'inflation en soutenant la demande ».

Bruno Le Maire a répondu en affirmant que le plan d'aide énergétique à 200 milliards annoncé par l'Allemagne n'était pas bien « différent » des 100 milliards sur trois ans prévus par la France pour contrer l'inflation.

Commentaires 11
à écrit le 21/10/2022 à 21:36
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Je comprends mieux pour le maire II, 100 000 euros= 200 000 euros.

à écrit le 21/10/2022 à 16:17
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Pendant ce temps : Le régulateur européen a annoncé mercredi avoir donné son feu vert à l'utilisation à partir de l'âge de 6 mois des vaccins anti-Covid de Pfizer et Moderna, les premiers sérums anti-Covid à être autorisés pour les moins de cinq a...

à écrit le 21/10/2022 à 13:10
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Bonjour, Pour revenir à cas de la France, nous devons impérativement réduire notre train de vie et commencer à rembourser nos dettes... Moins de social et plus de reindustrillisation de la France... Un travail correct et un bon salaire voilà ce do...

à écrit le 21/10/2022 à 11:06
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Tiens, tiens, faire une reset, le Great Reset de Schwab qui avoue "vous ne posséderez rien et vous serez heureux!". Petit point de la situation pensée par les mondialistes aux Pays Bas où des dizaines de milliers d’agriculteurs sont...

le 21/10/2022 à 11:20
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Une reset, entendez une -grande- réinitialisation ou great reset..

à écrit le 21/10/2022 à 10:16
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L’objectif est louable (on passera sur la discussion certes très intéressante sur les responsabilités de cette situation). Mais quand on voit les simples fluctuations des trois premières monnaies mondiales, USD, EUR et Yen, énormes depuis le début de...

à écrit le 21/10/2022 à 9:43
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mais. ). un homme ne peut être admiré sans être cru. trop de comédiens

à écrit le 21/10/2022 à 8:26
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Qu'en pensent les cabris dont parlait De Gaulle?

à écrit le 21/10/2022 à 8:23
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On en revient à : "Non à une Europe Fédérale; Oui à une Europe des Nations." ;-)

à écrit le 21/10/2022 à 8:12
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La seule réponse aurait été de reprendre les livraison directes avec la Russie au lieu de lui acheter "en douce"de l'énergie qui aura transité par l'Inde ou le Moyen Orient qui prennent leurs commissions au passage. Le diktat américain aura eut la pe...

le 21/10/2022 à 8:56
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et en meme temps mme borne sous la directive de m macron signe la fin des industries en france avec son plan vert et demain ce sera l'interdiction de se soigne car un medicament rejete dans la nature apres avoir servi pollue la nature voila l'abs...

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