Italie : Cottarelli, ex-FMI, remplace Conte et déclenche la fureur de la Ligue et du M5S

Par latribune.fr  |   |  843  mots
En l'état actuel des choses, il est très difficile que M. Cottarelli obtienne la confiance du Parlement, où la seule force ayant annoncé son soutien à ce gouvernement est le Parti démocrate (PD, centre gauche). "Si je n'obtiens pas la confiance, le gouvernement démissionnera immédiatement et sa mission principale sera de gérer les affaires courantes et d'accompagner le pays vers des élections après le mois d'août (...) ",a-t-il précisé. (Crédits : Tony Gentile)
Après avoir refusé dimanche d'accepter un ministre eurosceptique et déclenché le départ du potentiel Premier ministre Giuseppe Conte, le président italien Mattarella a nommé ce lundi 28 mai l'économiste Carlo Cottarelli, un ex-FMI, à la tête d'un gouvernement de transition, chargé d'accompagner la 3e économie de la zone euro vers de nouvelles élections. Cette décision censée rassurer l'Europe a provoqué une grande colère chez les vainqueurs des dernières élections, la Ligue et le M5S.

L'Italie connaît depuis le 27 mai une nouvelle crise politique. Le Mouvement 5 étoiles (M5S, populiste et anti-système) et la Ligue (extrême-droite) ont abandonné leur projet de former un gouvernement après le refus du président Sergio Mattarella d'avaliser leur choix de l'économiste eurosceptique Paolo Savona, 81 ans, comme ministre de l'Économie (avec pour conséquence, également, le renoncement de Giuseppe Conte, le chef du futur gouvernement qui avait été choisi initialement par le M5S et la Ligue comme).

L'idée que l'Italie ne sera pas dirigée par un gouvernement hostile à l'euro a fait remonter les marchés lundi matin. Mais ils ont ensuite reperdu du terrain, réalisant qu'il ne s'agissait-là que d'une solution à court terme.

Le président italien Sergio Mattarella a nommé lundi l'économiste Carlo Cottarelli, un ancien du Fonds monétaire international (FMI), à la tête d'un gouvernement de transition chargé de préparer le budget 2019 et d'organiser des élections législatives anticipées.

"Je me présenterai au Parlement avec un programme qui, si j'obtiens la confiance, inclura le vote du budget 2019. Ensuite, le Parlement sera dissous, avec des élections début 2019", mais sans la confiance, les élections se dérouleront "après le mois d'août", a-t-il dit à la presse à l'issue de son entretien avec le président Mattarella.

En l'état actuel des choses, il est très difficile que M. Cottarelli obtienne la confiance du Parlement, où la seule force ayant annoncé son soutien à ce gouvernement est le Parti démocrate (PD, centre gauche).

L'Italie vers de nouvelles élections

"Si je n'obtiens pas la confiance, le gouvernement démissionnera immédiatement et sa mission principale sera de gérer les affaires courantes et d'accompagner le pays vers des élections après le mois d'août", vraisemblablement en septembre ou en octobre, a précisé M. Cottarelli.

"Je voudrais souligner que le gouvernement resterait alors neutre (...). Je m'engage à ne pas être candidat aux prochaines élections et je demanderai le même engagement à tous les membres du gouvernement", a-t-il ajouté. Il a assuré qu'il présenterait son équipe gouvernementale "très rapidement".

Les comptes publics actuellement "sous contrôle"

Carlo Cottarelli, ancien responsable du Fonds monétaire international (FMI), a assuré que la situation des comptes publics était actuellement "sous contrôle" et en a promis "une gestion vigoureuse". L'approche de son gouvernement sera résolument européenne, a-t-il également expliqué.

"Un dialogue avec l'Europe pour défendre nos intérêts est essentiel. Nous pouvons faire mieux qu'avant. Mais cela doit être un dialogue constructif dans la pleine reconnaissance que, comme pays fondateur de l'Union européenne, notre rôle dans l'union reste essentiel, de même que la poursuite de notre participation à l'eurozone", a-t-il déclaré.

Pourquoi Mattarella a rejeté la candidature de Savona

Dans une allocution télévisée, Sergio Mattarella a expliqué qu'il avait rejeté la candidature de Paolo Savona parce que celui-ci avait menacé de sortir l'Italie de la zone euro.

"L'incertitude en ce qui concerne notre position a alarmé les investisseurs et les épargnants, tant en Italie qu'à l'étranger", a déclaré le président Mattarella. "L'adhésion à l'euro est un choix fondamental. Si nous voulons en discuter, alors, nous devons le faire de façon sérieuse."

Le M5S et la Ligue crient à la trahison de la Constitution

Sergio Mattarella a été aussitôt accusé par certains dirigeants du M5S et de la Ligue d'avoir trahi la Constitution et de répondre aux ordres des puissances européennes.

Lire aussi : Sergio Mattarella, un homme "droit" élu président de l'Italie

Luigi Di Maio, chef de file du M5S, a même demandé la destitution du président italien, mais Matteo Salvini a rejeté cet appel.

"Nous devons garder la tête froide (...) Certaines choses ne peuvent pas se faire sous le coup de la colère (...) Je ne veux pas parler de destitution", a déclaré Matteo Salvini dans une interview accordée à Radio Capital. Il a toutefois exprimé sa colère.

"S'il n'y a pas le feu vert de Berlin, Paris ou Bruxelles, un gouvernement ne peut pas être formé en Italie. C'est de la folie. Je demande au peuple italien de rester à nos côtés, parce que je veux ramener la démocratie dans ce pays", a déclaré le numéro un de la Ligue.

"Ce n'est pas une démocratie, le vote populaire n'est pas respecté", a-t-il ajouté. "Les prochaines élections seront un plébiscite - la population et la 'vraie vie' contre les vieilles castes politiques et les grands serviteurs du spread", a-t-il dit, faisant allusion au "spread", l'écart de rendement entre les dettes italienne et allemande.

___

LIRE AUSSI ces quelques articles sur les prémices de la crise actuelle en Italie

Lire aussi : L'Italie veut éviter que ses banques soient le premier domino de l'après-Brexit

Lire aussi : Italie : un "non" pour dire "basta" à l'Europe

Lire aussi : Italie : cinq chiffres à savoir sur une économie sous tension

(Avec AFP et Reuters)