Prévisions économiques : Bruxelles redoute le protectionnisme américain

Par Grégoire Normand  |   |  933  mots
Le déficit agrégé de la zone euro est à présent inférieur à 1 % du PIB et devrait, selon les prévisions, passer cette année sous la barre des 3 % dans tous les États membres qui en font partie explique la Commission.
La Commission européenne a confirmé jeudi ses prévisions d'une croissance dans l'Union européenne à 2,3% cette année. Pour 2019, l'institution prévoit une croissance du PIB à 2% tout en estimant que des risques plus importants pèsent sur les perspectives économiques, à commencer par le protectionnisme.

A la suite de la présentation de son projet de budget pour la période 2021-2027, la Commission européenne vient de confirmer ses prévisions d'une croissance dans l'UE à 2,3% cette année puis qui ralentirait à 2% l'an prochain. L'institution bruxelloise anticipe néanmoins des risques dans les trimestres à venir. Ces projections interviennent alors que les derniers chiffres d'Eurostat publiés ce mercredi 2 mai illustrent un ralentissement de la croissance entre le dernier trimestre 2017 (0,7%) et le premier trimestre 2018 (0,4%).

Au niveau du chômage, les services statistiques européens signalent un taux de 7,1% en mars stable par rapport à février dernier et en baisse par rapport à mars 2017 (7,9%). "L'Europe continue de profiter d'une croissance robuste, qui a permis de faire tomber le chômage à son point le plus bas depuis dix ans", a souligné le commissaire aux affaires économiques et financières Pierre Moscovici.

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Ralentissement de la croissance

A l'échelle du continent, les experts européens anticipent une croissance à 2,3% à la fois pour l'Union européenne et pour la zone euro après une croissance robuste à 2,4% pour 2017. Ce niveau d'activité devrait être soutenu par une consommation toujours solide, un dynamisme des exportations et de l'investissement. En 2019, la croissance dans les deux zones devrait ralentir pour atteindre 2% en raison notamment d'une politique monétaire moins accommodante et un ralentissement des échanges internationaux.

Tensions sur le marché du travail

Les fonctionnaires de la commission prévoient également des tensions sur le marché du travail. Sil le taux de chômage devrait poursuivre sa décrue passant de 7,6% en 2017 à 7,1% en 2018 et 6,7% en 2019 pour l'ensemble de l'UE, le sous-emploi persiste. Dans plusieurs pays où le chômage est relativement faible, "certains postes vacants sont déjà plus difficiles à pourvoir." Par ailleurs, des écarts de chômage au sein du Vieux continent sont encore très visibles.

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Une légère accélération de l'inflation

Les prix à la consommation devraient légèrement accélérer au cours de l'année sous l'effet de la remontée des prix du pétrole. L'inflation devrait se maintenir en 2018 au même niveau qu'en 2017, soit 1,5% et passer à 1,6% en 2019 dans la zone euro. "L'UE dans son ensemble devrait connaître une évolution similaire, son taux d'inflation se maintenant à 1,7 % cette année avant de passer à 1,8 % en 2019."

Inquiétudes autour du protectionnisme

Les projections économiques sont "maintenant plus exposées à des risques de prévision à la baisse." Les principaux risques concernent la politique économique du président américain Donald Trump.

" Les incitations budgétaires [...] mises en place aux États-Unis devraient stimuler la croissance à court terme, mais aussi accroître le risque de surchauffe et la possibilité d'une hausse des taux d'intérêt américains plus rapide que dans les hypothèses actuelles."

Par ailleurs, les États-Unis ont entamé un bras de fer avec la Chine et envisagent de relever leurs droits de douane sur l'acier et l'aluminium. Ces échanges n'ont fait qu'accroître les tensions sur la scène du commerce mondial et les incertitudes dans l'enceinte de la commission européenne. Pierre Moscovici estime que "le risque le plus grand qui pèse sur ces perspectives optimistes est le protectionnisme, qui ne doit pas devenir la nouvelle normalité ; cela ne ferait que nuire à ceux de nos citoyens qu'il nous faut protéger le plus."

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Sortie de la procédure de déficit excessif en vue pour la France

Les économistes de Bruxelles devraient annoncer le 23 mai prochain la sortie de la France de la procédure de déficit excessif. Après 2,6% du PIB en 2017, le déficit public devrait atteindre 2,3% en 2018, puis 2,8% en 2019 estime la Commission. En marge d'une conférence organisée à Paris par l'Association française d'épargne et de retraite, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire s'est réjoui d'une telle annonce.

"C'est une bonne nouvelle pour les Français parce que cela veut dire que nous assainissons les comptes publics [...] Mais il ne faut faire preuve d'aucun triomphalisme", a-t-il souligné, appelant "à poursuivre les efforts."

En ce qui concerne la croissance, elle devrait atteindre encore 2% en 2018 tout comme en 2017 et 1,8% à partir de 2019. La consommation des ménages "qui était faible en 2017, devrait remonter progressivement, grâce à une croissance de l'emploi robuste et une hausse nominale des salaires qui devrait accélérer les revenus des ménages. De plus, la baisse de la fiscalité sur les revenus et celle sur la fortune devraient favoriser le pouvoir d'achat et la consommation en 2019, bien qu'une partie puisse s'orienter vers l'épargne."

L'investissement d'une manière générale devrait rester "robuste en 2019 avant de ralentir en 2019". Du côté de l'investissement public, il devrait rebondir en 2018 après plusieurs années de contraction "dans le contexte d'un cycle électoral". En revanche, l'investissement des ménages devrait ralentir après une très forte croissance en 2017. Pour les entreprises, l'investissement devrait diminuer, "quoique plus progressivement".

Au niveau du chômage, il devrait continuer à ralentir "dans la perspective d'une solide expansion économique". L'inflation devrait remonter à 1,7% en 2018 après 1,2% en 2017, boostée par la hausse des prix du pétrole.

Parmi les risques évoqués, les prévisionnistes évoquent les grèves de la SNCF qui "pourraient peser sur la croissance, bien que ces effets seraient probablement limités et de courte durée". Par ailleurs, une baisse prolongée du climat des affaires pourrait se répercuter sur la croissance en 2019.