Zone euro : une croissance au plus haut depuis 12 ans

Par Grégoire Normand  |   |  841  mots
Selon l'économiste Chris Williamson, ce rapport mensuel donne à penser que la croissance au premier trimestre dans la zone euro sera de 1,0%, ce qui serait le taux le plus soutenu depuis le deuxième trimestre 2010 et nettement plus fort que celui de 0,6% anticipé dans une enquête Reuters du mois dernier. (Crédits : Hannah Mckay)
L'activité en zone euro a démarré l'année sur son rythme de croissance le plus rapide en plus de dix ans, grâce à une augmentation du nombre de nouveaux contrats, malgré la plus forte hausse des prix pratiqués par les entreprises depuis près de sept ans.

La zone euro démarre l'année pied au plancher. Selon les dernières données du cabinet d'études Markit publiées ce lundi, l'activité affiche son rythme le plus soutenu depuis près de 12 ans "tandis que l'emploi traverse actuellement sa meilleure phase de croissance depuis la fin de l'année 2000". Et les derniers résultats sont même supérieurs aux premières prévisions. Selon le chef économiste de Markit, Chris Williamson,

"à 58,8 en janvier, l'indice PMI Composite final pour la zone euro dépasse son estimation flash, déjà élevée, et signale la plus forte expansion économique de la région depuis juin 2006."

La zone euro a affiché l'une des plus fortes croissances des grandes économies l'an dernier et les indicateurs avancées suggèrent que la dynamique se prolongera au moins quelques mois, une bonne nouvelle pour la Banque centrale européenne (BCE) qui cherche à sortir peu à peu de sa politique ultra-accommodante.

Léger repli de la production manufacturière

D'après la dernières publication de Markit, la production manufacturière a connu un léger repli en janvier. Elle conserve néanmoins un taux d'expansion proche du niveau record atteint en décembre dernier. Du côté des services, le moral des chefs d'entreprises est au beau fixe. Si le rythme de croissance des services est inférieur à celui de la production manufacturière, le taux enregistré en janvier se redresse pour atteindre son plus haut niveau depuis août 2007.  "L'indice PMI Final IHS Markit de l'activité de services de l'Eurozone s'établit à 58.0 et atteint son plus haut niveau depuis près de 10 ans et demi".

La France particulièrement dynamique

L'autre bonne nouvelle est que cette croissance s'harmonise au niveau de l'union monétaire comme l'avait relevé pour la Tribune il y a quelques semaines l'économiste de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) Christophe Blot :

"C'est une croissance qui se généralise et s'harmonise dans un contexte international favorable, et une reprise du commerce mondial. [...] Et si l'Allemagne demeure le principal moteur de la croissance, c'est bien l'ensemble des pays qui contribue à l'accélération de cette reprise."

Ce constat est également exprimé par Markit qui souligne que "la croissance économique affiche en outre un rythme soutenu dans l'ensemble des pays couverts par l'enquête"Les experts du cabinet soulignent néanmoins que la France prend la tête du classement des pays par indice PMI en janvier, "le taux d'expansion restant stable par rapport à décembre dans l'Hexagone et proche de son pic de près de 6 ans et demi atteint en novembre". Les entreprises interrogées par Markit attribuent notamment cette tendance à la forte demande des clients et à une hausse des investissements, ainsi qu'à la faiblesse actuelle des taux d'intérêt.

La solidité de la demande a ainsi incité les prestataires de services à "rehausser fortement le niveau de leurs effectifs", souligne le communiqué, qui fait par ailleurs état d'une "forte inflation des prix payés", attribuée par les patrons à "une hausse du coût des salaires"La bonne santé conjuguée du secteur des services et du secteur industriel laisse "anticiper de très bonnes perspectives de croissance pour l'économie française dans les prochains mois", estime Alex Gill, économiste de Markit cité dans le communiqué. L'Allemagne, l'Italie et l'Irlande sont également très proches du taux enregistré par la France.

De bonnes nouvelles pour l'emploi

Ces dernières annonces peuvent augurer de bonnes nouvelles sur le front de l'emploi. Cette tendance favorise "les créations d'emplois dans la région, les effectifs augmentant de nouveau à un rythme similaire au pic de 17 ans atteint en novembre." L'évolution de l'emploi s'accélère en Allemagne, contrebalançant les légers ralentissements observés dans les quatre autres pays couverts par l'enquête.

Des contrastes encore marqués

Malgré une conjoncture favorable, les séquelles de la crise se font encore ressentir dans quelques pays de la zone euro. Sur le marché du travail, les dernières données d'Eurostat publiées la semaine dernière illustrent de véritables contrastes entre plusieurs pays. Les taux de chômage les plus élevés ont été enregistrés en Grèce (20,7%), en Espagne (16,4%) ou à Chypre (11,3%). Ces trois Etats situés dans l'Europe du Sud subissent encore les effets de la crise de 2007/2008 et les conséquences des différentes cures d'austérité, même si de sérieux signes d'éclaircie apparaissent notamment pour l'Espagne. À l'inverse, les taux les plus faibles ont été recensés en République tchèque (2,3%), à Malte ainsi qu'en Allemagne (3,6% chacun).

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Les économistes mettent également en garde contre le manque d'investissements dans la recherche et développement, ainsi que dans l'innovation en Europe. Ils avertissent aussi souvent les pouvoirs publics sur les conséquences du vieillissement démographique sur le potentiel de croissance de la zone euro.

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