Stress tests : les banques européennes résistent, les banques françaises dévissent

Par latribune.fr  |   |  985  mots
L'objectif de ces tests est d'évaluer la capacité de résistance des grands groupes bancaires européens face à des chocs macroéconomiques et financiers très défavorables afin de s'assurer qu'ils disposent d'un niveau de fonds propres suffisant pour y faire face. Dans les deux cas, l'ABE et la BCE ont eu recours aux mêmes scénarios et à la même méthodologie. (Photo d'illustration) (Crédits : WOLFGANG RATTAY)
Alors que les bancaires européennes résistent bien aux tests de l'Autorité bancaire européenne (BCE) et de la Banque centrale européenne (BCE), les banques françaises terminent à la dernière place. En queue de peloton, la Banque postale juge toujours son « profil de risque robuste ». L'exercice a débuté juste avant le rachat de Credit Suisse par UBS.

Chaque année, l'Autorité bancaire européenne (ABE) lance, en janvier, une série de stress test sur les soixante-dix banques les plus importantes de l'Union, représentant 75% des actifs du système bancaire européen. Cette année, la Banque centrale européenne, qui couvre cinquante-sept de ces soixante-dix banques, a lancé le même test de résistance pour quarante-et-uns autres établissements bancaires qu'elle supervise directement.

« L'objectif de ces tests est d'évaluer la capacité de résistance des grands groupes bancaires européens face à des chocs macroéconomiques et financiers très défavorables afin de s'assurer qu'ils disposent d'un niveau de fonds propres suffisant pour y faire face. Dans les deux cas, l'ABE et la BCE ont eu recours aux mêmes scénarios et à la même méthodologie », explique, dans un communiqué de presse, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)

Cet organe de la Banque de France contrôle les secteurs de la banque et de l'assurance et veille à la stabilité financière. Au total, dix banques françaises sont concernées : sept par l'exercice de l'Autorité bancaire européenne - BNP Paribas, Bank of America Securities Europe, Groupe BPCE, Groupe Crédit Agricole, Groupe Crédit Mutuel, La Banque Postale et Société Générale - et trois par celui de la Banque centrale européenne - Bpifrance, RCI Banque et SFIL -.

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 Un scénario de base fondé sur les prévisions macroéconomiques

Toutes ont projeté leurs ratios de solvabilité et de levier sur un horizon de trois ans selon un scénario de base fondé sur les prévisions macroéconomiques publiées par les banques centrales en décembre 2022.

« Compte tenu de ces hypothèses prudentes et de ce scénario macroéconomique et financier particulièrement dégradé, les résultats des tests de résistance permettent de confirmer la résilience du système bancaire français dans son ensemble du fait d'une bonne capacité d'absorption du choc », poursuit l'ACPR.

Ce n'est pas l'avis de l'Autorité bancaire européenne (ABE). Si les banques européennes sont suffisamment solides pour affronter une crise majeure, selon les résultats de ce même test de résistance, les banques françaises ont moins bien réussi cet exercice que leurs homologues de l'Union. Le régulateur européen a en effet mené ce stress test alors que le secteur a été secoué en mars par de vives turbulences qui ont ravivé le spectre de la crise bancaire de 2008.

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Une amélioration de la qualité des crédits

Le scénario utilisé dans cet exercice, auquel participaient 70 établissements couvrant environ 75% des actifs bancaires de l'Union européenne dans l'étude de l'ABE, prévoyait notamment une « aggravation sévère de la situation géopolitique » et « une hausse des prix des matières premières », des événements de nature à faire baisser le produit intérieur brut (PIB) européen de 6% en trois ans. A cela s'ajoutait une hausse de 6,1 points du taux de chômage, une baisse plus lente que prévu de l'inflation, une chute des prix de l'immobilier et un effondrement des actions en Bourse.

Après un tel choc, bien plus sévère qu'en 2021 lors du test précédent, le ratio de fonds propres « durs », indicateur clé de mesure de la solidité financière, passerait pour l'ensemble du secteur bancaire européen de 15,2% à 10,4%, niveau équivalent à celui d'il y a deux ans, globalement considéré acceptable par les superviseurs.

L'Autorité bancaire européenne a aussi noté une amélioration de la qualité des crédits des banques par rapport au test de 2021, ainsi que des bénéfices plus importants, permettant aux établissements de résister à une crise bien plus importante.

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Les banques françaises terminent à la dernière place

Ce niveau constitue toutefois une moyenne, les banques de quatre pays tombant sous la barre de 10%: celles de l'Espagne, des Pays-Bas, de l'Allemagne et de la France. Les banques françaises terminent même à la dernière place, avec un ratio de fonds propres durs de 9,15% à l'issue de ces trois années de turbulences.

Cette moyenne française a cependant été plombée par la Banque Postale, qui termine l'exercice avec un ratio à 0,05%. Société Générale est à 8,19%, BNP Paribas à 8,35%, BPCE à 9,92%, Crédit Agricole à 9,94% et Crédit Mutuel à 11,43%.

Pour autant, la Banque postale juge toujours son « profil de risque robuste » et rappelle qu'à la suite de la prise de contrôle à 100% de CNP Assurances en 2022, les activités d'assurance représentent environ 60%" de son bilan, induisant « une sensibilité supérieure de la solvabilité à certains chocs de marchés ».

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Un exercice débuté juste avant le rachat de Credit Suisse

Cela « montre que les banques françaises sont suffisamment capitalisées pour continuer à soutenir l'économie, même dans des conditions particulièrement dégradées », a estimé de son côté la Fédération bancaire française (FBF).

L'exercice a débuté juste avant que le secteur bancaire ne soit bousculé au premier trimestre par la faillite d'établissements américains et le rachat en urgence de Credit Suisse par UBS.

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 Dans son test, qui n'inclut pas les établissements suisses, l'ABE n'intègre pas non plus l'aspect psychologique avec un phénomène de panique bancaire, comme observé ces derniers mois dans certains établissements considérés comme fragiles.

(avec AFP)