Catastrophes climatiques, blackout... : Des villes normandes se soumettent à des stress tests pour anticiper les chocs

NORMANDIE. Comment répondre aux besoins essentiels de la population en cas de chocs soudains tels qu’un événement climatique extrême, un blackout électrique, une paralysie du réseau routier ou une rupture d’approvisionnement en eau. C’est l’équation à plusieurs inconnues que tentent de résoudre huit collectivités normandes dans le cadre d’une démarche pilote proposée par l’Ademe autour de la notion de résilience.
Inédite en France, l'opération  confrontent des collectivités volontaires à des scénarios d'épreuves majeures.
Inédite en France, l'opération confrontent des collectivités volontaires à des scénarios d'épreuves majeures. (Crédits : Agence de l'eau Seine Normandie)

On connaissait les tests de résistance bancaire, ou stress tests, consistant à simuler des conditions économiques et financières extrêmes pour en mesurer les conséquences sur les banques. En Normandie, l'Ademe a entrepris de soumettre huit communes et intercos* au même type d'épreuve. Là s'arrête l'analogie. Car ici, il n'est  pas question de passer au crible des ratios prudentiels ou des réserves de change mais d'évaluer la capacité des territoires à anticiper et à réagir à des chocs de toute nature (sanitaires, économiques, climatiques, énergétiques, démocratiques...).

L'objectif de ce projet pilote dénommé « résilience territoriale » est ambitieux. Il s'agit d'inciter les dites collectivités à réinterroger leurs politiques en les confrontant à des événements majeurs. Lesquels événements risquent malheureusement de se multiplier au cours des prochaines décennies. « On invite les élus et leurs services à réfléchir aux moyens de maintenir les fonctions clés qui permettront à leurs habitants de vivre et de s'épanouir pendant et après un stress », résume Karine Bosser, coordinatrice du pôle territoires durables au sein de la délégation de l'Ademe Normandie.

De l'utilité de la simulation

Pour convaincre de la pertinence de cette approche, l'agence n'a pas lésiné sur l'entrée en matière. Pendant un an, des binômes d'élus et de techniciens, accompagnés par des experts, ont simulé des scénarios exceptionnels sur des territoires imaginaires. « Ils se sont confrontés virtuellement à un black-out électrique pendant 1 jour, une semaine puis un mois. La démonstration a été étendue à des ruptures d'approvisionnement en pétrole et en nourriture », détaille Karine Bosser. Effet garanti.

L'expérience a manifestement été instructive pour les participants. « Cela a permis de toucher du doigt des vulnérabilités auxquelles nous ne pensions pas », rapporte Nicolas Gaillet, directeur du pôle transition écologique à l'agglomération Dieppe Maritime. « Quid par exemple d'une autoroute inutilisable ou de la bonne marche des cantines quand on est privé d'électricité ? ». L'exercice a également fait forte impression sur la vice-présidente de la communauté de communes Cote Ouest Centre Manche dans le Cotentin. « A l'issue de ces séances, on prend mieux la mesure des implications sociales, humaines, économiques et environnementales de ce type de chocs et de l'importance de les appréhender solidairement », constate Karine Herard.

« Une nouvelle grille de lecture »

Reste maintenant à passer au stade des travaux pratiques. Pendant deux ans, les huit collectivités se sont engagées à revisiter leurs politiques respectives en s'appuyant sur un référentiel basé sur les cinq « commandements » de la résilience (diversité, redondance, flexibilité, autonomie et coopération). « Cela risque de bousculer pas mal de certitudes puisque chaque service va devoir évaluer ses projets au moyen d'une nouvelle grille de lecture », prédit Karine Hérard. A Dieppe, Nicolas Caillet souscrit à l'analyse. « On dispose maintenant d'une boussole avec plusieurs domaines à interroger comme l'épuisement des ressources, l'effet domino des crises ou la continuité d'activités. A nous de veiller à les intégrer progressivement ».

Facile à dire, beaucoup moins aisé à mettre en pratique ce qu'admet d'ailleurs la représentante de l'Ademe. « Sur chaque territoire, les réponses passent forcément par une meilleure connaissance des vulnérabilités locales, une modification des pratiques et du fonctionnement des organisations », théorise t-elle.

Message reçu 5 sur 5 par les élus concernés. Dans une tribune parue ces jours-ci, ils plaident pour une transformation radicale des territoires et appellent d'autres collectivités à rejoindre le mouvement. « L'addition et l'accélération des crises doivent interroger profondément nos besoins et nos priorités », écrivent-ils. Au passage, les signataires appellent à la mise en place d'un cadre juridique favorable aux expérimentations. L'Union européenne, le gouvernement et les parlementaires doivent s'engager « dans une démarche de simplification des financements des projets résilients », recommandent-ils. A bon entendeur.

___________

*Argentan, Malaunay, Cherbourg-en-Cotentin, Métropole Rouen Normandie, Communauté Urbaine d'Alençon, agglomérations de Seine-Eure et Dieppe Maritime, Communauté de communes Côte Ouest Centre Manche.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 07/02/2023 à 18:42
Signaler
Pour être resiliant, il faudrait déjà que l'état enleve toutes les lois pondus depuis 20 ans qui empêchent toutes créativités ou initiatives individuelles. Quand on entend que les aides de l'état profitent plutot aux truands à col blanc qui s'en met...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.