En refusant de livrer les 19 A350 restants, Airbus rompt toute relation commerciale avec Qatar Airways

Par Jérôme Cristiani  |   |  562  mots
Photo d'illustration: Akbar Al Baker, PDG de Qatar Airways, préside la 78e assemblée annuelle de l'IATA à Doha, au Qatar, le 20 juin 2022. (Crédits : Reuters)
Le litige commercial entre l'avionneur et la compagnie de transport a débuté le 6 août 2021 lorsque la compagnie qatarie décidait de clouer au sol une partie de sa flotte de gros porteurs A350, d'abord 13 puis 21 sur les 53 appareils qu'elle possède, à cause de problèmes de peinture écaillée sur les fuselages. Sécurité des vols compromise ou simple problème cosmétique, la dispute a vite dégénéré en bataille judiciaire ouverte entre le constructeur aéronautique et la compagnie du Golfe, qui, pourtant, fut la première à introduire le jet intercontinental dans les cieux en 2015.

En annulant, ce mercredi 3 août 2022, la livraison de 19 appareils A350 destinés à la compagnie aérienne Qatar Airways, le constructeur Airbus aura achevé de révoquer complètement son contrat avec le transporteur qatari, après avoir déjà annulé une commande de 50 avions A321 le 21 janvier 2022.

Le litige commercial entre l'avionneur et l'entreprise de transport aérien a débuté le 6 août 2021 lorsque la compagnie du Golfe décidait de clouer au sol une partie de sa flotte de gros porteurs A350, d'abord 13 puis 21 sur les 53 qu'elle possède, à cause de problèmes de peinture écaillée sur les fuselages.

Un conflit inédit dans le monde du transport aérien

Le conflit, tant sur l'importance de l'avarie que sur le montant des dédommagements, a vite dégénéré en bataille judiciaire ouverte avec Airbus. Cette nouvelle décision de l'avionneur complète les mesures déjà engagées pour tenter d'en finir avec ce litige à la forme très inédite dans le monde du transport aérien.

En effet, il arrive qu'une compagnie aérienne renonce à l'achat d'avions déjà commandés soit par manque de financement soit à cause d'un retournement de conjoncture, mais, qu'un constructeur refuse de livrer des avions à une compagnie aérienne capable de les payer, ça c'est peu courant.

Bataille de titans

Les deux parties semblent irréconciliables : Qatar Airways, soutenue par son autorité de l'aviation civile nationale, assure que la dégradation des fuselages menace la sécurité des vols. Airbus, soutenu par l'Agence de sécurité de l'aviation de l'Union européenne (EASA) -qui ne voit aucun problème de sécurité sur les appareils qu'elle a inspectés-, reconnaît le problème de dégradation des surfaces (les craquelures étant dues à des différences d'élasticité entre les matériaux -peinture et métal du support-, selon les changements de température), mais assure que le problème n'est que cosmétique et donc réfute cette justification pour l'immobilisation des appareils qataris.

Pour rappel, le Qatar est pour l'instant le seul pays au monde à avoir immobilisé des A350 pour cette raison.

Mais Qatar Airways a saisi la justice et réclame 200.000 dollars d'indemnisation par avion par jour d'immobilisation, soit à ce jour plus de 1,4 milliard de dollars... Airbus a fait de même, au motif que ces accusations portent gravement atteinte à sa réputation industrielle, Qatar Airways n'hésitant pas à passer commande entretemps à Boeing, histoire de jeter du sel sur les plaies.

Depuis les deux titans de l'aviation se livrent une guerre dont l'intensité oscille, comme sur des montagnes russes, entre périodes d'accalmies, où les deux protagonistes disent rechercher une solution à l'amiable, et regains de tension avec de nouveaux affrontements médiatiques et de nouvelles étapes judiciaires. Dans cette guerre juridique qui semble n'en plus finir, Qatar Airways a déjà perdu deux batailles, ce qui ne semble pas du tout refroidir sa vindicte.

Aucun commentaire n'était immédiatement disponible de la part d'Airbus ou de Qatar Airways.

Lire aussiMondialisation : se passer du titane russe, le chemin de croix de l'aéronautique européenne