Conflit Qatar Airways-Airbus sur l'A350 : l'AESA donne sa version des faits

Dans la guerre désormais juridique qui l'oppose à Qatar Airways à propos de l'A350, Airbus est sûr de son fait. Le constructeur peut s'appuyer pour cela sur les examens menés par l'Agence européenne de la sécurité aérienne, l'AESA, qui confirme que les dégradations de la peinture constatés sur plusieurs appareils n'entraînent pas de risques de navigabilité.
Léo Barnier
L'EASA valide les affirmations d'Airbus sur la sécurité de l'A350.
L'EASA valide les affirmations d'Airbus sur la sécurité de l'A350. (Crédits : CHARLES PLATIAU)

Depuis quelques jours, le ton est monté entre Qatar Airways et Airbus à propos des dégradations de peinture de l'A350. Plus exactement depuis que la compagnie qatarie a décidé de donner une dimension judiciaire au différend et que le constructeur européen s'est montré tout aussi offensif en retour. Si la confrontation doit se poursuivre devant une autorité indépendante - qui reste à déterminer - l'un des principaux enjeux sera de déterminer si ce problème de revêtement est de nature à remettre en cause ou non la sécurité de l'appareil.

A l'heure actuelle Qatar Airways affirme avoir immobilisé 13 de ses 53 Airbus A350 sur « l'instruction écrite explicite » de l'Autorité de l'aviation civile qatarie (QCAA), tel que formulé dans un communiqué du 5 août. Depuis, sept autres avions ont été cloués au sol. Selon cette version, le craquèlement de la peinture sur certaines zones du fuselage et de l'empennage vertical de l'A350, ainsi que la détérioration des feuilles de cuivre expansé (ECF, treillis de fils de cuivre qui recouvre les parties en carbone du fuselage pour offrir protection contre la foudre en formant une cage de Faraday), présenteraient un problème de sécurité pouvant affecter la navigabilité de l'avion.

De son côté, Airbus a dénoncé la semaine dernière « la tentative de ce client de faire passer ce sujet spécifique pour un problème de navigabilité représente une menace pour les protocoles internationaux en matière de sécurité. »

Pour appuyer son propos sans remettre en cause la QCAA, le constructeur argue avoir mené les évaluations nécessaires pour établir que ces problèmes de peinture n'ont « aucun impact sur la navigabilité de la flotte d'A350 ». Surtout, il déclare que l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) confirme ce diagnostic.

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L'AESA valide l'absence de risque

Contacté par La Tribune, le régulateur européen, garant de la sécurité du transport aérien sur le Vieux continent mais aussi autorité de certification primaire de l'A350, a corroboré les affirmations d'Airbus. Une porte-parole a ainsi déclaré que « l'AESA est consciente de la dégradation de la peinture et de la protection et a enquêté sur le problème, à la fois avec Airbus et la compagnie aérienne concernée, pour déterminer s'il existe un risque pour la navigabilité du type d'avion. » L'Agence a ainsi analysé les données fournies par les deux parties, mais a aussi inspecté directement certains avions concernés.

Ses conclusions sont sans appel : « Rien n'indique que la dégradation de la peinture et de la protection (ECF) affecte la structure de l'avion ou introduit d'autres risques. » Elle n'envisage ainsi pas de prendre des mesures à ce sujet pour le moment : « La dégradation de la peinture est un problème de vieillissement en service et de détérioration environnementale qui affecte la finition de surface et les feuilles de cuivre expansé sur le fuselage et l'empennage vertical de l'A350. [...] L'AESA ne prévoit donc pas d'émettre une consigne de navigabilité. » Autrement dit, elle ne va pas imposer de changement de conception, que ce soit par l'utilisation de nouveaux matériaux ou de nouveaux processus.

Un bémol tout de même, la porte-parole indique que des inspections doivent être menées par les compagnies aériennes concernées - Finnair, Cathay Pacific et Lufthansa ont notamment rapporté des problèmes similaires à ceux de Qatar Airways. L'AESA attend donc leur résultat pour évaluer s'il est nécessaire de prendre des mesures en conséquence.

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Des causes profondes établies

L'AESA établit également qu'Airbus « a identifié les causes profondes du problème de peinture ». Elle ajoute que l'analyse de ces causes a permis de confirmer l'absence de problème de sécurité pouvant remettre en cause le maintien de navigabilité. Toujours selon l'Agence, les résultats obtenus ont aussi permis au constructeur d'optimiser ces processus de peinture et de lancer des initiatives d'amélioration supplémentaires.

Là encore, ces affirmations sont à mettre en face de celles de Qatar Airways cet été qui laissaient entendre que la racine du problème n'était pas établie. Plus récemment, selon des sources industrielles rapportées par Reuters la semaine dernière, la compagnie qatarie serait toujours réticente à mettre en œuvre les solutions à court terme proposées par Airbus sans une analyse complète de la cause profonde.

En parallèle, comme l'avait annoncé Airbus, l'AESA a confirmé qu'il n'y avait pas de lien entre le problème de peinture et la proposition de consigne de navigabilité (PAD) n° 21-176. Emise par l'Agence européenne au début du mois, elle concerne un problème de production sur les voilures de 13 A350. Des pièces de cuivre expansé lourd (HECF) n'ont ainsi pas été installées sur ces avions, ce qui nécessite des mesures correctives afin de rétablir le niveau de sécurité à la norme requise.

Léo Barnier

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Commentaire 1
à écrit le 14/12/2021 à 9:00
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L autorité de navigabilité du Qatar aurait elle des éléments que l EASA n ' a pas? . Si oui il faut qu elle les transmette à l autorité primaire de certification. Si non elle ne reconnaît pas l EASA et fait ce qu' elle veut avec les appareils enregi...

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