"L'achat des F18 et Eurofighter par l'Allemagne est plutôt une bonne chose pour la France" (Eric Trappier)

Par Michel Cabirol  |   |  564  mots
"Un message peut être porté aux parlementaires allemands : il faut trouver un processus type LPM (Loi de programmation militaire, ndlr) pour cadencer avancement des projets communs", a estimé le président du GIFAS et PDG de Dassault Aviation, Eric Trappier.
Pour le PDG de Dassault Aviation la décision de l'Allemagne d'acheter 93 avions de combat Eurofighter et 45 F-18 américains est "paradoxalement plutôt une bonne chose pour la France. Au moins, l'Allemagne écarte le F35".

Le patron de Dassault Aviation Eric Trappier a été très clair sur la décision de l'Allemagne d'acheter 93 avions de combat Eurofighter (BAE Systems, Airbus et Leonardo) et 45 F-18 américains (Boeing) pour renouveler sa flotte de Tornado. "C'est paradoxalement plutôt une bonne chose pour la France. Au moins, l'Allemagne écarte le F35", a expliqué jeudi le président du GIFAS lors d'une audition par la commission de la défense de l'Assemblée nationale. Clairement, ce choix, s'il est confirmé par un vote du  Bundestag, permettra de poursuivre les travaux sur le futur Système de combat aérien du futur (SCAF), lancés par l'Allemagne et la France, et rejoints par l'Espagne. Ce qui n'aurait pas été le cas si Berlin avait choisi le F-35.

"J'insiste sur la nécessité de prise en compte des différences de calendriers et d'organisation politique entre les deux pays. Les industriels doivent s'adapter aux calendriers politiques pour avancer. Un message peut être porté aux parlementaires allemands : il faut trouver un processus type LPM (Loi de programmation militaire, ndlr) pour cadencer avancement des projets communs.

La pression des États-Unis

Pour autant, pour diminuer l'appétence des pays européens à acheter américain, "il est nécessaire que l'on s'organise entre européens", a-t-il expliqué. Le chemin est très long encore en dépit de l'initiative commune entre trois grands pays européens sur le SCAF. Ainsi, la Bulgarie a signé des contrats pour des F16, la Belgique a signé des amendements pour des F35, a-t-il rappelé. "Il faut se poser la question du poids des européens face aux Etats-Unis dans l'OTAN", a-t-il également fait valoir. Et les États-Unis, qui n'ont qu'un objectif de vassaliser l'Europe en matière d'aviation de combat, ne lâchent vraiment pas les Européens.

Ainsi, pour Lockheed Martin, tous les coups sont permis. Le géant américain vient d'embaucher en Finlande, l'ancien chef d'état-major des armées (CEMA) finlandais, celui-là même qui avait lancé la compétition pour l'acquisition de nouveaux appareils, a expliqué Eric Trappier. Ce qui a provoqué une polémique en Finlande. Ce projet d'achat vise à remplacer la flotte actuelle de 64 avions de combat F/A-18C/D Hornet achetés au début des années 90. Le ministre finlandais de la Défense a déclaré que le nombre de nouveaux appareils à acheter pourrait être supérieur ou égal au niveau actuel et espérait qu'il ne serait pas inférieur.

Inquiétudes sur le Fonds européen de défense

En tant que patron également de l'ASD (AeroSpace and Defence Industries Association of Europe), le président du GIFAS (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) a fait part de ses inquiétudes sur l'avenir du Fonds européen de défense (FED). "L'Europe de la Défense ne semble pas la priorité de l'ensemble de nos partenaires. Il faut veiller à le préserver. Elle est notamment utile pour développer de nouvelles technologies et d'abonder les programmes qui sont définis par plusieurs États européens", a-t-il rappelé. Et selon lui, un deuxième danger menace le FED. C'est "la persistance des États-Unis à vouloir faire accéder leurs sociétés à ces financements. Certains pays européens à l'Est du continent sont attentifs et sensibles aux appels américains". On n'est jamais trahi que par les siens...