Lunettes : le projet de plafonnement des remboursements fait (encore) hurler les opticiens

Par Marina Torre  |   |  549  mots
Les contrats dits "responsables" des complémentaires santé ont été mis en place en 2004.
Le gouvernement envisage de plafonner les remboursements optiques par les complémentaires santé afin d'inciter à une baisse des prix. Un projet qui n'aurait pour autre conséquence que d'aboutir à des suppressions d'emploi, rétorquent les opticiens.

Comment réduire le prix des lunettes? Depuis plus d'un an, le sujet fait débat dans l'Hexagone. Marisol Touraine, la ministre de la Santé a d'ailleurs promis de s'y atteler. Parmi les projets à l'étude du côté du gouvernement: un décret du ministère de la Santé visant à plafonner les remboursements des complémentaires santé.

Dans le détail, ce projet de décret qu'a pu consulter l'AFP vise à limiter le remboursement des verres simples à 350 euros en 2015 et 200 euros en 2018. Quant aux verres plus complexes, leur remboursement maximum passerait de 600 à 400 euros en 2018. Pour les montures, la somme resterait fixée à 100 euros. 

 Seuls les contrats dits "responsables" sont visés. Mis en place au 1er janvier 2006 en application d'une loi de 2004, ils visent à encourager les parcours de soin coordonnés via des exonérations fiscales.  

Lutter contre la pratique de l'ajustement

En septembre, la Cour des comptes avait suggéré une mesure de ce type. Les sages de la rue Cambon arguaient que cela permettrait de lutter contre

Une pratique très fréquente des distributeurs, dite de 'l'ajustement', [qui] consiste à conduire le client à faire converger son panier d'achat vers le remboursement maximum prévu par son contrat d'assurance maladie complémentaire (voire à surfacturer les verres, fréquemment mieux remboursés que les montures). 

Ils allaient même plus loin en proposant un déremboursement total des équipements optiques et auditif par l'Assurance maladie. 

>> Lire :  Que changerait un déremboursement des lunettes par la Sécurité sociale? 

Réactions

Avant même la publication de ce projet de décret, trois syndicats regroupant des opticiens avaient fait part de leur inquiétude dans un communiqué daté du 12 mars. Une baisse des remboursements "sans garantir une baisse des cotisations (...) conduira à une augmentation des frais de santé et aggravera la fracture sociale", affirment conjointement la Fédération nationale des opticiens de France (Fnof), le syndicat des opticiens entrepreneurs Synope et l'Union des opticiens (UDO). 

"Plus de 20% des montures Made in France sont grandement hypothéquées" par un tel projet, craint pour sa part Philippe Peyrard, directeur général délégué d'Atol Les Opticiens et membre de la Fnof. Ce dernier affirme en outre que "1000 emplois seraient menacés dans le bassin du Jura". Et de tempêter contre un projet de texte décidé "sans aucune concertation" qui revient à "se tirer une balle dans le pied, un peu comme si, en Allemagne, on taxait les six cylindres alors que c'est le premier pays producteur de ce type de véhicules".

Quant aux critiques sur les marges élevées pratiquées par les opticiens et dénoncées par des associations de consommateurs, le patron d'Atol les balaye: "elles sont plus élevées dans nos métiers car ce sont des métiers de transformation" avec des investissements importants dans du matériel technique et des services gratuits. Un discours tenu par les professionnels du secteur depuis déjà plusieurs mois. 

Une mesure à arbitrer

Pour l'heure, le ministère de la Santé indique travailler sur un projet de décret qui n'est pas encore finalisé. Il compléterait les mesures prises dans le cadre de la loi Hamon sur la consommation qui s'attache, entre autres, à ouvrir la vente de lunettes et lentilles sur internet.