Renault réussit avec les Dacia roumaines, pas avec les Lada russes

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  759  mots
La Granta, un des fleurons de Lada.
Avtovaz, le premier constructeur auto russe dont l'Alliance Renault-Nissan est en train de prendre le contrôle; accuse des lourdes pertes. Les ventes du fabricant des Lada plongent. Qualité et productivité restent mauvaises.

Renault, le roi des voitures à bas coûts, cartonne avec les Dacia roumaines, mais pas avec les Lada russes. Il est vrai que ce n'est pas la faute du constructeur français si les Lada se vendent mal. La plupart des modèles du premier constructeur automobile russe Avtovaz ont été conçus avant que Renault ne prenne le contrôle de la firme de Togliatti. Il n'empêche: Avtovaz, en cours d'absorption par l'Alliance Renault-Nissan, a annoncé ce vendredi  une perte nette de 7,9 milliards de roubles (161 millions d'euros) l'an dernier. La perte est sensiblement supérieure, in fine, à ce qui avait été annoncé fin février.

Ventes en chute

Son chiffre d'affaires a pour sa part reculé de 6,8% à 177 milliards de roubles (3,6 milliards d'euros), alors que le constructeur avait initialement estimé le recul à 4%. Les ventes d'Avtovaz ont accusé une chute de 12%. Sur la seule Russie, qui absorbe l'essentiel des ventes, Avtovaz a  plongé carrément de 15% à 456.309 unités l'an passé. Soit nettement plus que les immatriculations totales de voitures neuves (-5%) l'an dernier, selon l'Association des entreprises européennes (AEB).

Avtovaz n'occupait plus l'an passé que 16,4% de part de marché en Russie (18,3%  en 2012). Et, sur les deux premiers mois de 2014, la chute s'accélère (-19% en Russie), alors que le marché total recule de 4%. La pénétration n'atteint plus que 15%.

"2013 n'a pas été une année facile pour notre entreprise", souligne le suédois Bo Andersson,  patron d'Avtovaz et ancien Directeur des achats de GM. "Notre principal objectif en 2014 est de rendre l'entreprise bénéficiaire", a-t-il précisé, affirmant vouloir se concentrer sur la "hausse de la productivité du travail, la hausse de la qualité de la production, le lancement de nouveaux modèles et la réduction des dépenses". Il y a du boulot. Les Lada sont traditionnellement d'une déplorable qualité.

Et, malgré l'aide des ingénieurs de Renault, les niveaux de productivité sont très loin de ceux de la concurrence internationale. Bo Andresson avait annoncé en janvier dernier la suppression en 2014 de 10% du personnel d'Avtovaz, soit 7.500 postes. Avec 70.000 personnes pour fabriquer un demi-million de véhicules, la firme doit être le constructeur mondial ayant le plus mauvais rapport chiffre d'affaires par salarié... Et de très loin.

Fleuron de l'époque soviétique

Fleuron de l'époque soviétique, bâtie dans les années soixante avec l'aide des ingénieurs de Fiat pour produire la Fiat 124 de 1966 - dont la production a été stoppée en début d'année 2012 -, l'usine géante de Togliatti (à un millier de kilomètres au sud-est de Moscou)  vise une production de presque un million d'unités vers... 2017. On en est loin. Longtemps constituée de modèles archaïques, au manque de fiabilité légendaire, mais pas chers, la gamme se renouvelle progressivement, avec l'aide de Renault. Mais, on n'en est qu'au début.

Grâce à une nouvelle ligne de production pour véhicules sur plate-forme de la Logan, Avotovaz fabrique aujourd'hui des modèles pour Nissan et va en assembler très prochainement pour le compte de Renault. On évoque les Logan II et Sandero II.

En décembre 2012, Carlos Ghosn - PDG de Renault et de son allié japonais Nissan -, Serguei Chemezov, Directeur général de la société publique Russian Technologies, ainsi que Igor Komarov, alors PDG d'Avtovaz, avaient scellé à Moscou un accord final permettant à Renault-Nissan de prendre le contrôle du russe.

L'accord prévoit que l'Alliance Renault-Nissan apportera 600 millions d'euros, qui lui donneront 67,13% des parts de la co-entreprise d'ici à la fin du premier semestre 2014. Cette dernière détiendra à son tour 74,5% du capital du constructeur. Renault devrait détenir 50,1% de la société-commune d'ici à juin 2014. Nissan, qui n'était pas auparavant actionnaire, vise une participation à hauteur de 17%.

Renault va mieux qu'Avtovaz

Renault avait déjà déboursé en février 2008 un milliard de dollars (750 millions d\'euros) pour acquérir 25% plus une action du groupe auto russe, dont Carlos Ghosn a pris fin juin dernier  la présidence du conseil d'administration.

La marque Renault, heureusement, se débrouille mieux en Russie qu'Avtovaz, produisant à Moscou ses Logan, Sandero et Duster à bas coûts. Renault est la  deuxième marque locale derrière Lada. La firme au losange n'a reculé que de 1% sur les deux premiers mois de l'année avec une part de marché supérieure à 8%. Renault devance (de très peu) son allié japonais Nissan, en plein boom, Hyundai, Kia, Chevrolet (GM). Renault annonce par ailleurs une bonne rentabilité pour ses opérations russes.