L'usine PSA de Rennes redoute une fermeture programmée

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  718  mots
L'usine PSA de Rennes
Philippe Bonnin, l'élu local, pousse un cri d'alarme. La survie du site breton, qui tourne au ralenti, est grandement menacée. L'usine a produit l'an dernier presque cinq fois moins de véhicules qu'il y a dix ans.

La grande usine bretonne de PSA Peugeot Citroën est en danger. "Dès 2017, la direction du groupe  pourra annoncer sans coup férir la fermeture de l'établissement, faute de volumes à fabriquer", affirme Philippe Bonnin, maire de Chartres-de-Bretagne - la commune où est implanté le grand site historique du groupe automobile près de Rennes - et vice-président du Conseil général d'Ille-et-Vilaine. "Les récentes décisions de la direction du groupe PSA ne font que confirmer nos interrogations et inquiétudes sur l'avenir", souligne l'élu socialiste, coordonnateur du récent Livre blanc sur l'automobile.

"Une nouvelle alerte nous est arrivée  avec l'annonce d'investissements à Sausheim près de Mulhouse (300 millions d'euros). En réalité, il s'agit d'une dépêche de l'agence Reuters, largement reprise et non démentie depuis, précisant qu'il s'agit de transférer la fabrication de la future Peugeot 508 en Alsace", déplore Philippe Bonnin. "Puisqu'on nous a déjà annoncé la fin de la Citroën C5  (en Bretagne),  l'assemblage des grosses berlines de moyen-haut de gamme disparaît définitivement". Or, la gamme moyenne supérieure et haute de PSA était justement la spécialité et la fierté de cette usine...

Dégringolade la gamme moyenne supérieure de PSA

Au jourd'hui, PSA ne s'est engagé à Rennes que sur le remplaçant du monospace 5008 à partir de la mi-2016. "Dès la fin 2013, nous savions que l'annonce d'un nouveau véhicule (P87 ou future 5008) n'était qu'un projet à minima. En effet, le potentiel commercial
ne dépassera guère les 70 000 véhicules en première année de fabrication
". C'est très clairement insuffisant pour faire vivre ce site, qui s'essouffle à produire des Citroën C5 et Peugeot 508, des modèles de gamme moyenne supérieure dont les volumes sont faibles.

La France devenant progressivement un marché de petits véhicules - souvent importés - à cause notamment des taxations prétendument écologiques, PSA se retrouve de facto progressivement exclu des créneaux de la gamme moyenne et haute en Europe. L'usine bretonne a produit 85.000 voitures à peine l'an dernier. Un record négatif ! En 2012, l'usine avait fabriqué 129.600 unités, un volume déjà dérisoire par rapport aux plus de 360.000 du milieu des années 2000, pour un potentiel installé qui se montait alors à 400.000 !

Dans le système de production du groupe PSA en France, l'usine de Rennes se marginalise face à  Sochaux (278.800 unités en 2013) et Mulhouse (213.500) dans l'Est, Poissy (278.200) en région parisienne, après l'arrêt du site d'Aulnay en octobre dernier. En Espagne, Vigo a assemblé 406.600 unités. En Slovaquie, Trnava en a produit 248.400.

Plus de 600.000 heures de chômage indemnisé

Conséquence de cette dégringolade: "pour la seconde année consécutive, fin septembre 2014 nous arriverons à plus de 600.000 heures de chômage indemnisé. Ce sont autant de contributions publiques, soit plus de 10 millions d'euros sur une année", indique, amer, Philippe Bonnin. L'élu, en colère, ajoute: "dans ces conditions, qu'on ne nous parle pas de rentabilité ou de performance, alors que le groupe restera pour des années sous perfusion financière, grâce à l'apport massif de fonds publics". Et toc.

Cette situation délicate se  répercute chez les fournisseurs, avec la "réduction des moyens de production et d'effectifs dans les usines Faurecia de Bains-sur-Oust et Crevin, Cooper Standard ou encore Bretagne Ateliers", autant de  sous-traitants frappés par la chute des volumes du site PSA.

PSA s'et certes engagé à de pas fermer de site en France jusqu'en 2016. Mais après ? A Rennes, le constructeur automobile avait déjà  annoncé il y a presque deux ans la suppression de 1.400 emplois, sur un total de 5.400 salariés. Rappelons que le site employait 10.000 personnes il y a une dizaine d'années.  Et l'hémorragie n'est pas terminée. "Pour faire 100 à 150.000 voitures par an, on a besoin de 2.600 à 2.800 postes seulement" , soulignait il y a quelques mois un expert. Or, les prévisions pour le site de Rennes sont à des niveaux très, très inférieures !  Rennes apparaît donc comme un site extrêmement menacé aujourd'hui, alors même que, en Allemagne, BMW, Audi, Mercedes, ne savent comment faire pour produire davantage.. PSA fabrique globalement deux fois moins de véhicules dans l'Hexagone qu'il y a une dizaine d'années. Triste chute.