Comment PSA compte redresser la barre en Chine

Après un premier semestre catastrophique en Chine (des ventes en baisse de 20%), PSA veut se relancer à travers une nouvelle offensive produit plus axée sur les SUV. Mais pas question pour le constructeur français de succomber à la guerre des prix que livrent les marques chinoises. Le groupe veut poursuivre sa montée en gamme et inscrit sa stratégie de reconquête sur plus long terme. Mais, le marché chinois est plein de surprises...

"Nous traversons une mauvaise passe, mais nous allons rebondir, c'est certain", jurent les cadres de DPCA, la joint-venture de PSA et Dongfeng Motors qui commercialisent les marques Peugeot et Citroën en Chine.

Alors que le groupe s'apprête à inaugurer en grande pompe sa quatrième usine avec Dongfeng (et sa cinquième usine au total en Chine) dans le premier marché automobile du monde, la direction locale du constructeur automobile français faisait bloc autour d'une conviction : les ventes vont repartir à mesure que le plan produit davantage axé sur les SUV sera déployé.

Un premier semestre inquiétant

Les chiffres sont sans appel : les ventes ont effectivement baissé de 20% au premier semestre, tandis que la part de marché est passée de 4,1% à 2,9%. Ces chiffres sont très éloignés de la dynamique des années précédentes (la marque Peugeot enregistrait des ventes en hausse de 11% au premier semestre 2015, deux fois plus que le marché à l'époque), et surtout, elles marquent son recul par rapport à l'objectif de 5% de part de marché à horizon 2018. Elles sont d'autant plus inquiétantes, que ces contre-performances s'inscrivent dans un marché particulièrement soutenu : +10% au premier semestre. Face à ces difficultés, la direction locale de DPCA que nous avons rencontré à Chengdu (Sichuan) ne s'est pas dérobée.

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"Le marché chinois s'est brutalement retourné au deuxième semestre 2015 avec une conjoncture nationale très difficile qui s'est traduite par une violente guerre des prix. Ce sont les marques chinoises qui ont profité de cette situation puisqu'elles se sont accaparées l'essentiel de la croissance du marché chinois", analyse Mathieu Vennin, directeur adjoint de la marque Peugeot en Chine.

Les ventes des marques chinoises ont augmenté de 23% sur le premier semestre, soit plus de deux fois le marché.

"Presque toutes les marques étrangères ont enregistré des performances négatives en termes de part de marché", ajoute-il.

Les analystes sont unanimes pour admettre que le retournement du marché automobile chinois a été assez brutal et inattendu. Les gisements de croissance sont passés de la côte est où résident les grandes agglomérations chinoises et où le pouvoir d'achat est le plus fort, vers l'intérieur des terres, où les villes intermédiaires sont en plein essor, mais où le pouvoir d'achat est plus modeste.

PSA confesse également n'avoir pas assez bien anticipé l'explosion du marché du SUV qui connaît un vrai boom en Chine (+44% au premier semestre).

"Presque 100% de la croissance des marques chinoises provient des SUV", observe Mathieu Vennin.

Trop de marques, trop de modèles en Chine ?

Enfin, la concurrence exacerbée du marché chinois n'a cessé de s'accentuer.

"En 15 mois, le marché chinois a vu débarquer pas moins de 150 lancements, et la Chine se retrouve avec presque deux fois plus de modèles qu'aux États-Unis", souligne Mathieu Vennin.

"Nous avions déjà vécu ces salves de lancements en 2009 et en 2012", se souvient ce cadre de Peugeot installé depuis onze ans en Chine.

Ainsi, le marché automobile chinois c'est près de 67 marques pour plus de 500 modèles différents. Mais derrière ce constat difficile, la direction de PSA se refuse au fatalisme et voit au contraire de belles opportunités à saisir. Elle compte d'abord beaucoup sur l'offensive produit qui annonce près de 20 lancements d'ici 2021. PSA promet que cette offensive sera très axée sur les SUV. Jean-Christophe Marchal, fraichement parachuté au poste de numéro deux de la coentreprise sino-française, espère renouer avec la croissance des ventes dès 2017.

Pour l'heure, Peugeot semble avoir le plan produit le plus abouti en la matière avec l'arrivée d'un nouveau 3008 (un modèle spécifique à la Chine), et d'un 4008 (qui correspond au 3008 révélé il y a six mois en France). Avec le 2008, la marque au lion disposera ainsi de 3 SUV dans son catalogue. Citroën devrait également être mieux fourni en SUV, mais plus tard. Pour l'heure, la marque aux chevrons ne dispose que d'un petit SUV, le C3XR, et de pas moins de 4 routières de segment C et D, des segments peu dynamiques sinon en déclin.

Pas de guerre des prix

Pas question toutefois de se positionner face aux marques chinoises en cassant les prix. Car PSA ne veut pas sacrifier les marges sur l'autel des volumes, la fameuse devise imposée par Carlos Tavares depuis qu'il a pris la tête du groupe en 2014. Cette philosophie a d'ailleurs définitivement enterré l'objectif de part de marché de 5%, relique des années Varin.

"Notre objectif : c'est de vendre un million de voitures en Chine et Asie du Sud-Est, nous ne voulons plus nous inscrire dans une logique de part de marché qui est beaucoup trop aléatoire sur ce marché très spécifique qu'est la Chine", nous explique un porte-parole du groupe. Cela permet d'éviter l'affrontement avec les marques chinoises contre lesquelles, la bataille pourrait s'avérer vaine.

Pour PSA, ce pari est fondé :

"Le taux de primo-accédant est très important en Chine, mais il baisse. Il était de 80 à 85% il y a quelques années, et tourne autour de 65 à 70% actuellement. Or, les automobilistes chinois ont tendance à monter en gamme lorsqu'il passe de leur première à leur seconde voiture", explique un haut cadre du groupe.

Cela correspond justement à la clientèle que PSA veut désormais conquérir ! "Nous voulons aller chercher la rentabilité là où elle est", résume Jean-Christophe Marchal. Autrement dit, PSA veut asseoir un positionnement de marque généraliste premium. Ce sera d'ailleurs le rôle du 4008 qui sera plus haut de gamme que le 3008.

DPCA a encore du temps devant lui

Ce projet risque néanmoins de prendre du temps, mais PSA estime en avoir à disposition. D'abord parce que DPCA est rentable, y compris au premier semestre malgré la forte chute des ventes - nous n'en saurons pas plus puisque PSA ne communique pas ses résultats par région. Ensuite, parce que le plan 5A+, volet chinois du plan stratégique Push to Pass divulgué en avril par Carlos Tavares, prévoit d'augmenter les marges de manœuvre financières des sites de production chinois. Ceux-ci doivent ainsi baisser de 20% les coûts de production à horizon 2018, et dégager 30% de gain de productivité en 2021.

Pour PSA, la baisse des ventes en Chine est donc surtout un incident de parcours et il faut analyser sa stratégie sur un horizon de plus long terme. Peut-être ! Mais, le marché chinois, on l'a vu, s'inscrit dans des cycles structurels beaucoup plus courts prenant au dépourvu les certitudes les plus aiguisées...

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