Grand débat : élus et professionnels du logement tirent la sonnette d'alarme

Par César Armand  |   |  733  mots
(Crédits : Benoit Tessier)
À l'invitation de l'Union sociale pour l'habitat (USH), l'Assemblée des communautés de France (AdCF), l'Association des maires de France (AMF), la Fédération française du bâtiment (FFB) et la Fondation Abbé Pierre ont, ce mercredi 20 février, exhorté le gouvernement à déployer une politique du logement "plus ambitieuse".

Les thématiques du logement et de la construction semblent être les deux grandes absentes du Grand débat national, étant simplement intégrées à une question de plus grande ampleur: « Quelles sont les solutions pour se déplacer, se loger, se chauffer, se nourrir qui doivent être conçues plutôt au niveau local que national ? » Moins d'offres, moins de qualité de vie, moins de pouvoir d'achat, moins de recettes fiscales et moins d'emplois non-délocalisables, c'est pourtant ce que redoute Jean-Louis Dumont.

Le président de l'Union sociale pour l'habitat (USH), qui représente 720 organismes HLM, s'est dit "préoccupé" par la mise en oeuvre de la loi Élan avec « une chute du nombre de constructions tant dans le logement social que dans le libre ».

« Les carnets de commande sont bien garnis, mais dans le neuf, la baisse va se poursuivre », a également souligné Jacques Chanut, président de la Fédération française du bâtiment. « Si rien n'est fait, il y aura une nouvelle crise de notre secteur avec son cortège de pertes d'emplois », a-t-il alerté.

Déjà fin décembre 2018, il avait déclaré redouter une année 2019 « inquiétante », signant la fin d'un « cycle de croissance ».

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Les intercommunalités "prêtes" à contractualiser

Tous deux se sont toutefois félicité des 9 milliards d'euros débloqués début janvier par Action Logement pour faciliter la production de logements, améliorer le confort de l'existant et promouvoir la mobilité, misant sur plus de 18 milliards d'euros de travaux sur trois ans. Dans le même temps, les patrons de l'USH et de la FFB ont demandé "une véritable politique du logement" au ministre Julien Denormandie.

Jean-Louis Dumont (USH) apprécie « son engagement et sa présence sur le terrain ». Quant à Jacques Chanut (FFB), il l'a prié de rouvrir « rapidement » le prêt à taux zéro (PTZ) sur l'ensemble du territoire national.

Depuis le 1er janvier 2019, le PTZ ne s'applique plus en effet dans les "zones détendues", c'est-à-dire dans les collectivités où l'offre est suffisante pour répondre à la demande. « Ce n'est pas l'habituel coup de gueule, mais un cri d'espoir », a néanmoins insisté le professionnel du bâtiment.

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Le vice-président de l'assemblée des communautés de France (AdCF), qui fédère 1.000 intercommunalités, a lui aussi tendu la main au gouvernement. « Nous sommes prêts à contractualiser avec l'État en tenant compte des spécificités territoriales, à partager avec lui des objectifs et même des obligations de résultats », a proposé Jean-Paul Bret. Le maire (SE) du Pin et président du Pays voironnais (Isère) a cependant regretté « une loi Élan qui [les] ignore complètement. Tout se passe subitement comme si l'État avait peur des territoires », a-t-il ainsi affirmé.

Un manque à gagner de 6 milliards d'euros d'ici à fin 2020

Depuis l'adoption fin 2017 du budget 2018 qui a acté la baisse des APL de 5 euros, le secteur du logement social a en outre calculé un manque à gagner de 6 milliards d'euros entre 2018 et 2020. « C'est six milliards d'économie pour l'État et zéro augmentation de loyer pour les locataires, mais c'est à mettre en regard de nos 20 milliards d'euros de loyers annuels », a relevé Dominique Hoorens, directeur des études de l'Union sociale pour l'habitat. En d'autres termes, cela représente une perte de 10% de budget annuel pour les offices HLM.

« Tous les clignotants sont au rouge depuis l'affaire des APL », a renchéri le président de l'association des maires de France (AMF) François Baroin. « Toulouse, par exemple, gagne 4.000 à 5.000 habitants par an. Les besoins en logements sociaux doivent être amplifiés. Or, c'est tout le contraire qui se produit. »

Par ailleurs, au regard de la situation « catastrophique » sur le plan du mal-logement, le délégué général de la fondation Abbé Pierre a plaidé pour une « impulsion financière qui encouragerait les maires-bâtisseurs. Cela engagerait les acteurs locaux de bonne volonté à produire dans les parcs privé et social », a estimé Christophe Robert. Aux dernières nouvelles, l'exécutif y réfléchirait déjà, sous la forme d'une subvention qui aiderait les élus locaux à financer écoles et équipements publics dès lors qu'ils s'engageraient à ériger de nouveaux logements.