"Nous ne réduirons pas les fractures sans répondre aux problèmes de logement"

Grand absent du grand débat national, l'habitat est pourtant le premier poste de dépenses des Français. Comme l'ensemble de ses 600 adhérents, la présidente de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), Alexandra François-Cuxac, a donc décidé d'y participer pour formuler des propositions en matière de logement abordable.
Alexandra François-Cuxac, présidente de la Fédération des promoteurs immobiliers, veut, avec ses 18 chambres régionales, déployer un plan d'action territoriale.
Alexandra François-Cuxac, présidente de la Fédération des promoteurs immobiliers, veut, avec ses 18 chambres régionales, déployer "un plan d'action territoriale". (Crédits : Anna Camerac/Markimage)

LA TRIBUNE - Participez-vous au grand débat national et avez-vous demandé à vos 18 chambres régionales de le faire ?
ALEXANDRA FRANCOIS-CUXAC - 
Nous allons y participer car nous sommes à la fois des chefs d'entreprise et des citoyens engagés. Ce sens des responsabilités est une caractéristique très forte chez nous. C'est pourquoi nos promoteurs contribueront aux débats, chacun dans leur région avec des recommandations et des critiques constructives.

Dans le cas où un élu local ne souhaiterait pas organiser de grand débat ou concentrer son action sur les non-professionnels, nous remplirons les cahiers de doléances. Nous ne serons jamais pour autant dans le cahier des pleurs, mais à l'inverse dans la formulation de propositions. En tant qu'acteurs de la ville, nous sommes d'ailleurs déjà très engagés dans une approche concertée avec les territoires et les habitants.

"Quelles sont les solutions pour se déplacer, se loger, se chauffer, se nourrir qui doivent être conçues plutôt au niveau local que national ?", s'interroge Emmanuel Macron dans sa lettre adressée aux Français. Est-ce prendre la question du logement sous le bon angle ?

Elle a le mérite de poser la question de la limite et de la profondeur de la décentralisation de la politique immobilière. Cela montre en outre qu'il est toujours utile de réinterroger le modèle. L'État porte une vision de la société conditionnée par l'aménagement du territoire. C'est également l'État qui a aujourd'hui le pouvoir d'agir sur la manière dont nos concitoyens peuvent accéder à la propriété. Par la législation qui en découle, la stratégie politique nationale se transforme en plan d'actions. Les politiques immobilières arrivent alors en région, avant d'être portées localement.

Aussi, entre cette vision nationale et ce qui se passe concrètement sur le terrain, il existe parfois de grandes disparités. Conforté par la confiance de ses administrés, obtenue dans les urnes, l'élu local peut être tenté de s'éloigner des enjeux nationaux pour satisfaire des exigences, voire des pressions, locales. C'est cela qui pose problème aujourd'hui. Sans parler du schéma de cohérence territoriale (SCoT), du plan local d'urbanisme (PLU), ou du plan de déplacement urbain (PDU) qui ne reflètent pas non plus cette vision.

Votre fédération des promoteurs immobiliers va d'ailleurs déployer "un plan d'action territoriale" avec la nomination d'un délégué aux territoires. De quoi s'agit-il concrètement?
Le logement abordable n'a jamais été suffisamment porté par les présidents de la République. A mon sens, nous ne réduirons pas les fractures de notre pays sans répondre aux problèmes de logement ou sans redonner à chacun la possibilité de vivre selon ses choix et ses besoins. C'est pour pousser encore plus loin le dialogue engagé avec les élus locaux sur l'enjeu clé du logement que nous préparons des colloques sous différentes formes, avec plusieurs items.

Lorsque dans certains territoires, la densification est comprise par les élus comme une démarche vertueuse, dans d'autres territoires, le dialogue doit être renoué. Or, l'analyse des besoins doit être menée en mettant tous les acteurs de la ville autour de la table :  les élus, les habitants, les promoteurs, les financeurs, les aménageurs et les acteurs du BTP. Il est donc urgent de renouer le dialogue lorsque c'est nécessaire.


Comment repartir sur de meilleures bases ?

Dans certains cas, les élus locaux ne nous voient pas comme des partenaires du développement de leur territoire mais davantage comme des prestataires qui construisent avant de repartir. Au contraire, les promoteurs immobiliers s'impliquent dans les régions, s'y implantent, y investissent, embauchent et créent de la valeur. Je m'interroge : est-ce qu'il y a suffisamment de pédagogie ?

Sur l'étalement urbain, par exemple, quand on dit qu'il faut l'arrêter, car c'est une solution coûteuse dont nous voyons aujourd'hui les répercussions avec les gilets jaunes, cette vision ne se reflète pas localement. Beaucoup de PLU réduisent en effet les possibilités de densifier et augmentent les contraintes au lieu de les faire baisser. Il faut en revanche donner à la population la possibilité de revenir dans les centres urbains.

En outre, si nous voulons un débat en confiance et dans le respect des compétences des uns et des autres, il nous faut de vraies discussions, qui dépassent la seule question relative à la répartition des logements selon des quotas dont nous connaissons les limites et les faiblesses. Écoutons davantage ceux que l'on qualifie de "maires bâtisseurs".

Le programme "Action cœur de ville" vise déjà à revitaliser 222 centres-villes...
C'est un axe de développement très fort. Il doit donner à ces territoires la possibilité de renouer avec le dynamisme et d'attirer de nouvelles populations. Le gouvernement propose une boite à outils mais tout reste à faire, notamment en matière de logement, dans ces centres-villes !

Le logement abordable, ce n'est pas le logement social. Il ne repose pas sur l'argent public mais sur de l'investissement privé dans des territoires qui ont en besoin. Nous avons la chance d'avoir un gouvernement qui a donné un cap en disant qu'il fallait "construire plus vite, mieux et moins cher" avec peut-être un manque de pédagogie, mais c'est rattrapable. J'appelle donc à la mobilisation de toutes les parties prenantes pour traiter ce sujet en confiance.

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Commentaires 5
à écrit le 24/01/2019 à 10:36
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En effet, des loyers à la campagne à 600 euros par mois avec des salaires de 1200 euros ou bien des baraques à 150000 euros en état avec des milliers de maisons sur le marché il y a quelque chose qui ne va pas et c'est toujours le même problème, la s...

à écrit le 23/01/2019 à 16:05
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Le problème vient du fait que la terre batissable, vaut 50 % du coût d'une maison individuelle. Si on décrétait tous les terrains sont baitissables (Sauf zones dangereuses bien sur), le prix du m 2 serait de 1 €, prix de la terre agricole. Facile....

à écrit le 22/01/2019 à 20:16
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Les problèmes immobiliers vont s’intensifier avec les années car certains privilèges donnés à certains groupes va polluer le «  marché «  et ça risque une nouvelle dépression du marché ...( comme les dominos) Je pense que la croissance ne va pas s’e...

à écrit le 22/01/2019 à 17:58
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Quand on recherche des économies, l'arithmétique primaire nous démontre qu'on en fait plus en gagant sur les postes les plus importants que sur les postes mineurs. C'est vrai pour l'état (poste le plus important : la retraite) que pour le particulier...

à écrit le 22/01/2019 à 17:26
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quelques larmes de crocodile, histoire de precher pour sa paroisse sans trop le montrer! quand on voit les prix de l'immobilier, ca fait sourire! et quand on voit toutes les normes, et autres obligations qui ont ete faites pour des gens qui ne save...

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