Bâtiment : le patron du secteur craint la "fin d'un cycle de croissance"

La Fédération française du bâtiment (FFB) redoute une année 2019 "inquiétante". Le patronat du secteur demande au gouvernement de revenir sur le déploiement du prêt à taux zéro (PTZ) dans les zones "détendues".
César Armand
(Crédits : iStock)

Au surlendemain du retour des fenêtres dans le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), Jacques Chanut n'est toujours pas rassuré : "On recommence les mêmes bêtises qu'en 2012 qui ont plombé le marché et il y aura les mêmes effets". En ce 19 décembre 2018, le président de la Fédération française du bâtiment redoute un retournement et même "la fin du cycle actuel de croissance" dans le secteur. Et on le sait, quand le bâtiment ne va plus, c'est rarement bon pour l'économie et l'emploi.

Après 24.000 logements neufs de moins en 2018 par rapport à 2017, Jacques Chanut craint un nouveau recul encore supérieur en 2019, de l'ordre de 27.000 logements. "Certes certains nous disent que nous sommes au-dessus de la moyenne sur 20 ans, mais nous perdons plus de 50.000 logements en deux ans." C'est pourquoi en tant que responsable du patronat du secteur, Jacques Chanut fait sa liste de courses : la FFB demande ainsi au gouvernement le retour du prêt à taux zéro à 40% dans les zones détendues dès 2020 et jusqu'à la fin du quinquennat. L'habitat représente en effet 62 % du chiffre d'affaires de ses adhérents.

Après avoir créé 20.000 emplois en 2017 dont plus de 15.000 en intérimaire, puis 30.000 en 2018 dont 24.000 en CDD et CDI, la FFB n'en prévoit "que" 5.000 en 2019. "En 2020, il y aura un impact négatif vu comment s'est parti. Dès que l'activité baisse, l'emploi suit", explique Jacques Chanut. "Je ne vais pas mentir et tenir un discours de Bisounours."

Si l'activité logement va décroître de 4,5 % en 2019, la construction de bureaux progressera en revanche de 9 % dans les métropoles et les grandes villes. Le volet "amélioration-entretien", qui représente 53 % de l'activité de la FFB, connaîtra également une croissance de 0,5 % du fait de la réintégration des fenêtres dans le CITE. "C'est un marché à 100 millions d'euros qui limite nos prévisions de baisses, mais cela fait 3 ans que nous n'avions pas connu un tel retournement", poursuit Jacques Chanut. Pire, "ce marché de la rénovation énergétique qui devait exploser ne décolle pas." En cause : "une lisibilité nulle". "Nos clients viennent chercher l'information auprès de nous, mais nous-mêmes, nous avons du mal à expliquer à nos propres adhérents."

Lire aussi : Rénovation énergétique : la majorité des Français ignore l'existence d'aides

Quelles conséquences après la suppression de la taxe d'habitation ?

Si 2018 a été une "bonne année" avec une croissance de 2,3 %, elle a également été marquée par la fin de l'APL accession, le relèvement de la TVA de 5,5 % à 10 % ou encore l'entrée en vigueur de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI). Aussi, interrogé par La Tribune sur la suppression de la taxe d'habitation, dont la compensation sera connue au printemps prochain, cela demeure un autre motif d'inquiétude. "Il y a quelques années, la baisse des dotations a eu un effet immédiat" se souvient Jacques Chanut. "Si les collectivités ne connaissent pas le mode d'emploi de leur fiscalité de demain, je crains une chute des investissements, notamment sur l'entretien de leur patrimoine. Or cela fait vivre beaucoup d'entre nous dans les territoires."

Au moins 3 raisons d'espérer

Le président de la FFB aurait pourtant des raisons de se réjouir. Dans le cadre du projet de loi de finances 2019, le ministre de la Ville et du Logement Julien Denormandie a créé une nouvelle niche fiscale dans le logement ancien. Elle permettra aux investisseurs de bénéficier d'une déduction de 12 à 21% de leur impôt sur le revenu selon que leur bien est loué 6, 9 ou 12 ans. La condition : réaliser un montant de travaux représentant 25% du total de l'opération (dans la limite de 300.000 euros) et cela dans les 222 communes sélectionnées par l'État dans le cadre du dispositif "Action Cœur de ville""Cela pourrait créer de l'activité supplémentaire à hauteur de 43.000 logements" a calculé l'équipe de Jacques Chanut. D'autres perspectives comme la revitalisation de 20 à 25 centres-villes du programme "Action Cœur de ville" ou la validation de programmes de rénovation urbaine rassurent ces professionnels.

"C'est loin d'être foutu, c'est évitable, mais il faut se saisir du problème dès maintenant" insiste encore le patron du secteur du bâtiment. Ex-président d'Action Logement et membre du bureau du Medef, Jacques Chanut ne devrait toutefois pas rencontrer trop de problèmes pour transmettre ses doléances à qui de droit.

César Armand

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Commentaire 1
à écrit le 20/12/2018 à 12:03
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Le secteur est completement accro aux subventions (pinel, PTZ) alors evidement ca va faire mal quand ca va s arreter. Surtout si les taux d interet repartent a la hausse ce qui semble inevitable. Mais il est quand meme necessaire d arreter de subvent...

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