Le fabricant de panneaux de construction en bois Schilliger a lancé à Volgelsheim (Haut-Rhin) un investissement de 28 millions d'euros qui lui permettra de multiplier par dix ses capacités de production. La nouvelle unité de production automatisée de panneaux multi-plis de construction (PMC) sera opérationnelle en juillet 2023. Au terme de cet investissement, cette filiale française d'une entreprise familiale suisse, présente en Alsace depuis 1999, sera capable de produire chaque année un million de mètres carrés de panneaux.
"Il y a suffisamment de forêts et de matière première dans le Grand-Est. Mais la région manque de capacités de sciage, de capacités de transformation et de charpentiers. Nous répondons en partie à ce besoin", promet Stéphane Muller, directeur général de Schilliger Bois. Le chiffre d'affaires de cette entreprise (120 salariés) s'est établi à 54 millions d'euros en 2021, avec une prévision en progression de 20 % pour l'exercice 2022. Sa zone de chalandise s'est étendue à l'ensemble de la France, avec des immeubles emblématiques ou de grande hauteur (jusqu'à R+13) construits en bois à Nice, Paris, Bordeaux et bientôt à Rennes.
Marché en croissance
Dans le Grand-Est, le marché de la construction bois est en croissance. La filière a rétabli sa dynamique après plusieurs années marquées par des crises sanitaires dans les forêts (épidémies de bois scolytés) et le Covid.
Fibois, le syndicat professionnel qui fédère cet écosystème, a recensé 194 entreprises présentes sur le marché de la construction bois dans le Grand-Est. Les effectifs cumulés s'établissent à 3.250 salariés pour un chiffre d'affaires de 605 millions d'euros en 2020. "Le marché se développe à court terme parce que la sortie du confinement a relancé l'habitat, au sens large. Sur le long terme, le bois apparaît en ligne avec les attentes sociétales de réduction de l'empreinte carbone. Enfin, la mise en place de la réglementation RE 2020 positionne le bois comme l'un des principaux matériaux de construction", résume Sacha Jung, délégué régional de Fibois Grand-Est.
En 2020, selon l'enquête nationale de la construction réalisée pour Fibois par l'institut Veia, le bois détenait 15,7 % de parts de marché dans la construction de maisons individuelles dans la région, contre 9,3 % en moyenne nationale. Les prévisions de croissance pour l'année 2021 s'établissent à 44 % dans la maison individuelle en secteur diffus, et jusqu'à à 67 % en secteur groupé. Dans les bâtiments tertiaires, la part de marché du bois s'établit à 13,9 % dans le Grand-Est contre 10,9 % en moyenne nationale.
"L'investissement capacitaire opéré par Schilliger s'inscrit dans une dynamique locale très favorable dans la filière bois", confirme Thomas Amstoutz, chargé de projet Usine du futur à l'agence régionale d'innovation Grand E-nov. "Leurs panneaux de structure, fabriqués sur mesure sur une ligne robotisée, correspondent à des procédés d'assemblage innovants", observe Thomas Amstoutz.
Les panneaux PMC de grandes dimensions au catalogue de Schilliger (jusqu'à 16 mètres de longueur, pour une largeur qui peut atteindre 3,40 mètres) sont composés de couches croisées de planches en bois massif séché. Plusieurs combinaisons d'essences sont possibles associant l'épicéa, le sapin et le douglas. Les procédés d'assemblage permettent un ancrage sur dalle béton, l'utilisation en toiture ou en plancher. En faisant varier l'orientation, le nombre et l'épaisseur des plis (entre 27 millimètres et 500 millimètres), les PMC peuvent être mis en œuvre comme mur porteur, paroi de contreventement ou poutre-voile. Schilliger insiste sur les qualités intrinsèques du bois, qui offrent à ce matériau "un bon comportement thermique et hygrométrique du bâtiment" tout en "diminuant les ponts thermiques".
L'investissement de Schilliger participe aussi à la dynamisation de la filière bois du massif vosgien, dont les acteurs déploraient jusqu'en 2019 le déséquilibre engendré par des exportations massives de grumes vers la Chine. "Les bois exportés correspondaient à des surplus scolytés qu'on n'arrivait pas à valoriser sur place", tempère aujourd'hui Sacha Jung. "En sortie de crise, la demande est redevenue telle que les ressources sont vendues majoritairement auprès des locaux". Si l'augmentation de la demande a engendré "des tensions sur les prix", le délégué régional de Fibois estime que "les niveaux élevés permettent désormais une plus juste rémunération, jusqu'au forestier".
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