Quand les distributeurs innovent en banquiers

En raison de la crise financière de 2008 de et la loi Lagarde de 2010, les banques dites "captives" de la grande distribution ont diversifié leurs activités. Le crédit à la consommation représente les deux tiers du produit net bancaire de Oney Banque Accord (Auchan), contre 80% il y a quelques années.
Christine Lejoux
Oney Banque Accord est la filiale de services financiers du groupe Auchan.

BNP Paribas, la Société générale, le Crédit agricole... Ces grandes banques françaises sont connues de tout un chacun. Il y a en revanche fort à parier qu'Oney Banque Accord, Banque Edel, Banque Chabrières ou encore Banque Révillon ne disent pas grand-chose au Français lambda. Et pour cause : il s'agit là de banques d'un genre bien particulier, toutes filiales de la grande distribution, un peu sur le modèle des "captives" automobiles que sont PSA Banque et RCI Banque (groupe Renault). Oney Banque Accord appartient en effet au groupe Auchan (lui-même propriété de la famille Mulliez), Banque Edel à Leclerc, Banque Chabrières se trouve dans le giron d'Intermarché et Banque Révillon, dans celui de Cora.

Les groupes Carrefour et Casino ne sont pas en reste, avec des filiales de services financiers tout simplement baptisées Carrefour Banque et Banque Casino. C'est à partir des années 1980 que les groupes de grande distribution ont commencé à créer leurs propres banques, d'une part afin de fidéliser leurs clients au moyen de cartes de paiement intégrant des programmes de fidélité, d'autre part pour augmenter leurs ventes en proposant des facilités de paiement. Pas question, pour autant, de s'aventurer dans l'ouverture et la gestion de comptes courants, qui déboucheraient sur une concurrence frontale avec les banques classiques.

Augmenter le taux de conversion sur les sites de e-commerce

Mais la crise financière de 2008, avec pour corollaire la crise de liquidités des banques, et la loi Lagarde de 2010, qui a encadré plus sévèrement le crédit à la consommation, ont obligé les "captives" de la grande distribution à chercher des relais de croissance. Certaines les ont trouvés dans l'assurance de biens et de personnes, dans l'épargne, à l'image de Carrefour Banque et de son compte sur livret lancé en 2012, d'autres encore dans les nouveaux moyens de paiement. Oney Banque Accord, par exemple, a flairé tout le potentiel que représentait le e-commerce, et maintenant le m-commerce (mobile commerce), pour les outils de simplification et de sécurisation des paiements en ligne.

En 2010, cette filiale à 98% du groupe Auchan [le solde appartient aux salariés ; Ndlr] a ainsi créé une équipe dédiée à l'innovation, et composée aujourd'hui d'une vingtaine de personnes. L'objectif : concevoir des solutions permettant d'améliorer le taux de conversion ou de transformation des sites marchands, c'est-à-dire la proportion d'achats rapportée au nombre de visiteurs uniques. Autrement dit, fluidifier au maximum le parcours d'achat du client, afin que celui-ci ne soit pas tenté d'abandonner la transaction en cours de route, jugeant certaines étapes trop complexes.

Des clients au-delà de la galaxie Mulliez

Oney Banque Accord a par exemple conçu Facilipay, une solution de paiement en trois ou quatre fois, susceptible de vaincre les dernières résistances d'un consommateur qui, au moment de payer, se demande s'il est bien raisonnable de s'offrir un smartphone dernier cri. Parmi les enseignes qui ont adopté Facilipay figure Darty.com, preuve, selon Nicolas Dreyfus, directeur général de Oney Banque Accord en France, que "notre politique d'innovation nous permet de conquérir des clients des enseignes du groupe Auchan, mais pas seulement. A titre d'exemple, nous avons récemment signé un partenariat avec Le Bon Marché, IdTGV ou ShowroomPrive."

Mieux, grâce à la technologie du big data (analyse d'énormes masses de données), les e-commerçants pourront bientôt proposer ce type de facilités de paiement à leurs seuls clients solvables, ce qui améliorera encore le taux de conversion des internautes en acheteurs. Big data toujours avec SellSecure, une solution de sécurisation des paiements mise au point par Oney Banque Accord, qui identifie les fraudeurs potentiels et conseille au e-commerçant d'abandonner purement et simplement la transaction ou, au moins, de la soumettre à un dispositif d'authentification renforcée comme 3D Secure.

Un retard d'un an pour Flash'N'Pay

"A la différence d'autres outils de lutte contre la fraude, Sellsecure n'est pas intrusif. Cette solution permet de bénéficier d'un taux de fraude inférieur de cinq fois à la moyenne nationale et, surtout, d'améliorer significativement le taux de transformation", affirme Nicolas Dreyfus. Pour Flash'N Pay, en revanche, il faudra encore patienter : cette solution de paiement mobile, en test dans le magasin Auchan de Faches (Nord) et qui devait être généralisée dans tous les hypermarchés de l'enseigne à partir d'avril 2015, accuse un an de retard.

"La généralisation de notre application de paiement mobile a été repoussée au premier semestre 2016 afin d'enrichir le parcours client.  Nous avons en effet souhaité ajouté l'authentification biométrique et fluidifier les process", assure Nicolas Dreyfus.

Une stratégie d'open innovation

Conséquence de cette diversification de ses activités, le crédit à la consommation représente aujourd'hui les deux tiers du PNB (produit net bancaire, l'équivalent du chiffre d'affaires) de Oney Banque Accord, ressorti à 189,7 millions d'euros au premier semestre (+0,3%), contre 80% il y a quelques années. Une mutation qui conduit la banque, laquelle emploie 900 personnes en France et devrait en embaucher 140 cette année, à courtiser de nouveaux profils : "Dans le cadre de nos recrutements, nous recherchons de plus en plus d'experts, dans des domaines qui vont bien au-delà du crédit, comme le big data, la lutte contre la fraude sur Internet ou la monétique", indique Nicolas Dreyfus.

Des collaborateurs qui, au passage, sont associés à la stratégie d'innovation de Oney Banque Accord, tout comme le sont désormais les clients, au travers de la plateforme Internet "Innovez avec nous", lancée le 16 juin. Une politique "d'open innovation" qui ne serait pas complète sans la collaboration de la banque avec de jeunes entreprises innovantes. "Dans le cadre de notre démarche d'innovation, nous travaillons avec des startups. Elles nous apportent des projets et, de notre côté, nous leur amenons des clients potentiels et nos expertises métiers. Cette collaboration peut déboucher sur une prise de participation dans leur capital", explique Nicolas Dreyfus.

Christine Lejoux

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Commentaire 1
à écrit le 24/09/2015 à 9:59
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Je propose que tous ceux qui roulent en voiture se mettent l'échappement dans l'hbtacle et respire un bcn coup! Que ces voitureux montrent l'exemple à défaut que les verts ne le fassent!!

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