Papeterie Chapelle Darblay : comment sauver cette entreprise de l'économie circulaire ?

La fermeture définitive de cette usine étendard de l’économie circulaire - la seule en France capable de fabriquer du papier journal 100% recyclé - déséquilibrerait durablement la filière du recyclage et serait vécue comme un coup de canif dans les promesses de transition. Un rapport parlementaire dont La Tribune s’est procuré un exemplaire le confirmera dans quelques jours. L’avenir de ce site de la banlieue rouennaise n’en reste pas moins incertain.
L'usine presque centenaire de la Chapelle Darblay a été mise en vente par le papetier finlandais UPM. Il démantèlera les machines en juin prochain si aucun acquéreur ne se présente.
L'usine presque centenaire de la Chapelle Darblay a été mise en vente par le papetier finlandais UPM. Il démantèlera les machines en juin prochain si aucun acquéreur ne se présente. (Crédits : Reuters)

« Les pouvoirs publics ont une responsabilité politique à préserver un établissement qui endosse une responsabilité sociale et environnementale exemplaire. » Cet extrait du rapport sur le recyclage du papier, que l'Assemblée Nationale devrait rendre public prochainement, dit bien la pression qui s'exerce sur le gouvernement à six mois de l'échéance qui pourrait être fatale à la papeterie presque centenaire de la Chapelle Darblay.

Fermée depuis cet été au prix de plus de 200 licenciements, l'usine a jusqu'au mois de juin pour trouver un repreneur sur décision de son propriétaire, le papetier finlandais UPM, qui l'a mis en vente. A défaut, le groupe procédera au démantèlement des machines. L'éventualité donne des sueurs froides jusqu'à Bercy où l'on redoute de voir disparaître cet outil unique en son genre, présenté - à raison - comme un modèle d'économie circulaire.

Un tiers du gisement de papier recyclé

Idéalement situé en bord de Seine, adossé à une chaudière biomasse, le site dispose en effet d'installations capables de transformer annuellement 350.000 tonnes de vieux journaux, de magazines et de prospectus publicitaires provenant de vingt millions de foyers. Soit le tiers du gisement de papier collecté par les entreprises et les collectivités !

La France croulant déjà sous des excédents (1,6 million de tonnes) qu'elle peine à exporter, la fermeture définitive de la Chapelle Darblay ébranlerait une filière déjà fragilisée, met en garde la députée de l'Isère Camille Gailliard Minier, rapporteure du texte rédigé sous l'égide de la commission du Développement durable et de l'aménagement du territoire.

Problème, et il est de taille. L'usine s'est vue privée d'une bonne partie de ses débouchés commerciaux traditionnels du fait de la digitalisation. La seule consommation de papier journal a chuté depuis près de 40% entre 2007 et 2018. Dans ces conditions, il semble acquis que l'avenir du site ne pourra passer que par une réorientation vers des activités plus porteuses, ce que défend d'ailleurs l'intersyndicale.

Une étude commandée par l'Etat et la Région évoque des opportunités dans la fabrication d'ouate de cellulose pour l'isolation mais surtout celle de carton ondulé : une spécialité dopée par notre appétit dévorant pour le e-commerce et à laquelle la disparition programmée des emballages plastique ouvre de nouvelles perspectives.

"L'Etat n'abandonnera pas"

Reste à trouver un ou des industriels prêts à reprendre l'outil aux conditions fixées par le papetier finlandais. L'affaire n'est pas gagnée d'avance. Mandatés par Bruno Le Maire, les émissaires de Business France ont prospecté à trois reprises dans le monde entier depuis l'été, sans parvenir à dénicher un acquéreur.

« Le dernier tour de prospection mené à une très large échelle a donné lieu à 200 contacts mais aucune offre ferme n'a été déposée à ce stade. Pour autant l'Etat n'abandonnera pas », promet Pierre-André Durand, préfet de Seine-Maritime.

Comprendre, le ministère de l'Economie entend poursuivre les discussions avec les investisseurs qui ont manifesté de l'intérêt et, en particulier, avec le cartonnier belge VPK, également en course pour la reprise d'un autre site UPM en Grande-Bretagne (à Shotton). Selon nos informations, le groupe originaire du plat pays n'exclurait pas de participer à un tour de table avec d'autres entreprises dans l'idée de créer ce que les parlementaires appellent un « Ecoparc papetier ». Lequel pourrait agglomérer « différents opérateurs autour d'un industriel pivot ».

Dans tous les cas, le temps presse. Il reste six mois pour trouver une solution. A défaut, les 350 collectivités locales qui fournissaient la Chapelle Darblay en matière première devront peut-être se résoudre à bruler du papier, en pure perte.

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Commentaires 2
à écrit le 27/01/2021 à 19:41
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il suffit que chaque ecolo bobo apporte 10.000 euros dans le cadre d'une augmentation de capital, et l'argent coulera a flots ah mais non, quand on est ecolobobo on n'est pas un mechant capitaliste qui exploite les gens ( donc il est hors de questio...

à écrit le 27/01/2021 à 19:11
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il faut demander à François Pinault de racheter cette usine... une deuxième fois , pour 1euro symbolique , avec une obligation législative faite aux journaux quotidiens d'imprimer obligatoirement sur papier recyclé . ainsi , un outil industriel imp...

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