Le lithium bolivien aiguise les appétits

Le président Morales, réélu dimanche, réfléchit à une coopération avec le privé. Le groupe Bolloré, qui parie sur les voitures électriques, est intéressé.

" Le lithium est non seulement l'espoir de la Bolivie, mais du reste du monde ", proclame Evo Morales, le président de ce petit pays d'Amérique latine. À l'heure où la planète se penche sur le climat à Copenhague (lire page 10), la lutte contre le réchauffement devrait faire la part belle aux voitures électriques, dont les batteries fonctionnent au lithium. Or les gisements détectés en Bolivie contiendraient plus du tiers ? voire la moitié ? des ressources mondiales de ce métal léger et mou. Les énormes réserves boliviennes permettraient même de produire des batteries pour quelque 5 milliards de voitures électriques ! Elles font de ce pays (l'un des plus pauvres de la région) un producteur incontournable, pour un métal qui devrait être de plus en plus demandé, si la voiture électrique tient ses promesses et parvient à séduire suffisamment de consommateurs.

De gros investissements

Cela, évidemment, à condition que la Bolivie puisse extraire le lithium? Et c'est là que le bât blesse. Pour l'heure, en effet, le président Morales, qui vient d'être triomphalement réélu dimanche (61 % des voix), est coincé : sa vision du pays et la victoire de son parti ? le Mouvement vers le socialisme ? au Parlement le font pencher pour une nationalisation de la production du lithium, de la même façon qu'il a nationalisé les autres richesses nationales, gaz et pétrole, en 2006. Nationalisation qu'il pourrait d'ailleurs faire voter sans difficulté au Parlement. Mais les besoins en investissement sont tels ? la première estimation s'élève à 800 millions de dollars, pour ouvrir et faire fonctionner une mine et une raffinerie sur le plateau andin où se trouve le gisement de précieux métal ? qu'Evo Morales pourrait, tout en gardant le contrôle de cette richesse nationale, opter pour des joint-ventures. Il l'a d'ailleurs déjà laissé entendre. « Si l'État avait l'argent, il l'investirait, dit-il, si l'État ne l'a pas, il va devoir chercher des investisseurs »? La Bolivie n'aura pas à chercher longtemps : ils se bousculent déjà.

Au premier rang se trouve le tandem Bolloréeacute;-Eramet, suivi du sud-coréen LG Corp., des japonais Mitsubishi et Sumitomo, ou encore de l'américain General Motors. Bolloréeacute;, qui mise sur sa BlueCar pour capter une partie du marché de la voiture électrique, possède déjà deux usines de batteries au lithium à Quimper et au Québec et espère être partie prenante dans l'exploitation du métal en Bolivie.

Il resterait également, pour ce pays sans accès à la mer, au relief très accidenté et sans grandes routes, à se doter d'une infrastructure capable de transporter et d'exporter le métal, voire de fabriquer des batteries sur place. Pour les 10 millions de Boliviens, dont plus de la moitié vit sous le seuil de pauvreté, l'avenir du lithium est crucial. Pour le marché aussi. Deux grands groupes ? l'américain Rockwood et le chilien Soquimich ? l'ont actuellement en partage, extrayant 70 % de la production mondiale, principalement du Chili, à des prix très avantageux. Qu'une société bolivienne, publique, privée, ou en joint-jointure, déboule pour leur faire concurrence et les cartes seraient forcément rebattues.

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