L'immobilier d'entreprise face au défi de sa rénovation

L'amélioration des performances énergétiques du parc, exigée par le Grenelle, risque d'être très coûteuse pour les propriétaires des immeubles.

Certains experts en immobilier d'entreprise parlent déjà d'un « mur vert ». Les impératifs de réduction des déperditions énergétiques des bâtiments tertiaires exigés par le Grenelle de l'environnement vont entraîner une dévalorisation du parc existant, lorsqu'il est de mauvaise qualité thermique. « Les immeubles de bureau basse consommation ou à énergie positive [produisant plus d'énergie qu'ils n'en consomment, Ndlr] sont en train de devenir le nouveau standard », explique Maurice Gauchot, PDG du conseil en immobilier CBRE. « Par ricochet, les immeubles de seconde main, et plus encore ceux qui sont des passoires thermiques, vont voir leur valeur sur le marché s'amoindrir parce qu'ils seront obsolètes et parce que le coût d'exploitation des immeubles neufs sera moindre?», prévient-il. « Le développement durable va accélérer l'obsolescence du parc d'immobilier d'entreprise en Ile-de-France comme en régions », résume Christian de Kerangal, directeur d'IPD France, société d'étude spécialisée dans l'analyse de la performance.

A compter de 2020, la consommation en énergie primaire (celle nécessaire pour produire l'énergie consommée au final) des immeubles de bureau existants devra être abaissée de 38 % sachant que la consommation moyenne du parc d'immobilier d'entreprise est estimée à 370 kWh/m2/an. Puis ce ratio devra être ramené à 50 kWh/m2/an en 2050. « Cette réduction de 38 % pose déjà un premier problème, car on ne sait pas de quel point l'on part or l'état des immeubles est très disparate : ce n'est pas la même chose d'abaisser de 38 % la consommation d'un immeuble qui avoisine les 600 kWh/m2/an ou d'un autre qui ne dépasse pas les 400 kWh/m2/an », relève Christine Daric, avocate chez Baker & McKenzie.

Les propriétaires des immeubles concernés devront investir parfois fortement, sans pouvoir récupérer ces sommes sur les loyers. Car « les entreprises locataires n'accepteront pas de payer plus pour des locaux remis aux normes, dès lors que les nouvelles normes deviendront justement la règle, relève Pascal Aujoux, directeur du département des Transactions chez Axa Real Estate. En moyenne, le coût de tels travaux atteint 1.000 à 2.000 euros du mètre carré?». « Les investisseurs, comme les entreprises propriétaires de leurs locaux, doivent assumer seuls les gros travaux », convient Christian de Kerangal. « Mais en mettant leurs immeubles aux normes, ils préserveront aussi la valeur de leur patrimoine qui ne pourra que se dégrader progressivement s'ils ne bougent pas », ajoute-t-il.

En outre, « certains immeubles, performants sur le plan thermique, n'auront pas besoin d'être lourdement rénovés. D'autres ne nécessiteront que des ajustements peu coûteux, un meilleur réglage de la climatisation ou l'ajout de doubles peaux pour limiter la pénétration du soleil pendant les journées d'été. D'autres en revanche, de véritables passoires thermiques consommant 700 kWh/m2/an, devront faire l'objet de restructurations si lourdes qu'il vaudra peut-être mieux les démolir dans certains cas?», résume Christian de Kerangal.

Un boulevard va donc s'ouvrir pour les majors du BTP vu l'ampleur de la tâche. Le parc d'immobilier de bureau s'étend, en effet, à l'échelon national sur 165 à 195 millions de mètres carrés, dont 50 à 55 millions en Ile-de-France.

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