Sur Internet, Pékin contre l'homme invisible

Une nouvelle révolution culturelle a commencé en Chine. Elle a pour nom Internet. Depuis deux ans, les milieux universitaires chinois se sont pris de passion pour le multimédia et redoublent d'initiatives dans ce domaine. « C'est un véritable bond en avant pour la recherche en Chine, les scientifiques - notamment dans les facultés de médecine - l'ont découvert avec bonheur », explique Jeffrey Smith, président de Bridge to Asia, une société de conseil impliquée dans les transferts de technologie vis-à-vis de la Chine. Il existe actuellement trois réseaux nationaux : ChinaNet, le plus connu, trouve sa source à l'Académie des sciences de Pékin et regroupe un certain nombre d'universités et de centres de recherches. Le deuxième, installé à l'université de Qinhua, s'appelle Cernet (China Education and Research Network). Il s'agit également d'un réseau universitaire, mais davantage structuré que le précédent. Potentiel : 2 millions d'étudiants. Enfin, China Internet, réseau géré directement par le ministère des Postes et Télécommunications, est le plus récent mais aussi le plus ambitieux. L'objectif est de relier six cents villes chinoises et plusieurs centaines de milliers d'entreprises dans les vingt ans à venir. « La Chine va investir des sommes considérables dans son réseau Internet ; il y a un intérêt très important dans les milieux d'affaires », souligne Jeffrey Smith. Pourtant, les autorités chinoises semblent soucieuses de contrôler Internet. Après tout, les agences de presse internationales - y compris dans le domaine financier depuis janvier - doivent passer par le « filtre » de l'agence officielle Chine Nouvelle, qui assure la redistribution de leurs dépêches. Cette décision visait à resserrer le contrôle de Pékin sur un marché de l'information économique devenu florissant, et à assurer des revenus supplémentaires à Chine Nouvelle. Concernant Internet, les choses sont un peu différente, car le ministère de la Sécurité publique semble également impliqué. Il est connu que plusieurs organisations de dissidents politiques utilisent les autoroutes de l'information pour faire passer leurs messages - en particulier avec le continent américain où sont basés de nombreux militants des droits de l'homme. En février 1996, le gouvernement chinois a déclaré qu'il entendait contrôler le développement d'Internet via le ministère des Postes. Tous les utilisateurs de réseaux raccordés à Internet doivent être enregistrés auprès des autorités compétentes. Des mesures qui ressemblent étrangement à celles qui furent imposées aux possesseurs de télécopieurs après les événements de Tiananmen (juin 1989) ou aux possesseurs d'antennes paraboliques (1993). Par ailleurs, il est à présent interdit de passer par une communication internationale pour accéder à Internet. Interdiction très formelle : comme pour les paraboles, la respecte qui veut. Surtout, Hong Kong - les sociétés de service en ligne le reconnaissent - reste un relais utile pour ceux qui sont prêts à prendre le risque de défier la loi... jusqu'en 1997 en tout cas. « Internet est l'un des champs de bataille qui permettront de déterminer où s'arrête l'autonomie de Hong Kong et où commence celle de la Chine », notait récemment un rapport du cabinet Political and Economic Risk Consultancy. Philippe LE CORRE, à Hong Kong (1) Les particuliers ne comptent actuellement que pour 15 % des personnes connectées en Chine. Ce qui n'empêche pas le Cybercafé de prospérer à Pékin sous la conduite d'une femme d'affaires énergique, Zhang Shuxin, qui a également fondé en 1995 son propre réseau commercial, 1+Net, lequel compte plus de trois mille membres.
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