L'action de l'Etat à l'étranger critiquée

Souvent parée de toutes les vertus, la LOLF (loi organique relative aux lois de finances) n'est pour l'instant pas l'instrument miracle espéré. "La LOLF doit mettre sous tension l'administration mais en faisant la lumière, elle révèle souvent des dysfonctionnements" aime à répéter Jean Arthuis, président de la Commission des finances du Sénat. Dans le cas du réseau français à l'étranger (ambassades, consulats, centres culturels, missions économiques...), c'est criant.Adrien Gouteyron, rapporteur spécial des crédits de la mission Action extérieure de l'État a réalisé dans les premières semaines de 2006 une mission de contrôle sur pièces et sur place dans trois pays (Afrique du Sud, Espagne et Royaume-Uni) du réseau français pour constater qu'à ce stade l'application de la LOLF n'est pas de nature à produire une modernisation et une rationalisation de la gestion des services de l'État à l'étranger. À l'appui de ce jugement sévère, à peine nuancé par quelques aspects positifs comme l'implication personnelle des ambassadeurs dans cette nouvelle démarche, le sénateur UMP de Haute-Loire note que l'application de la LOLF dans les services français à l'étranger souffre du fait que "le Quai d'Orsay ne soit pas parvenu à décliner au niveau local des indicateurs de performance". De même, le principe de la fongibilité des crédits qui permet aux gestionnaires de modifier la répartition des crédits n'a pas été mise en oeuvre dans les postes à l'étranger.Fort "émiettement". Ces manquements importants résultent essentiellement de "l'extraordinaire émiettement de la gestion des crédits sur le terrain", explique Adrien Gouteyron. Le Quai d'Orsay ne gère en fait que 50 % des sommes consacrées à l'action extérieure de l'État, le reste est à partager entre les autres ministères et notamment Bercy, autorité de tutelle des 169 missions économiques implantées dans le monde.Résultat, alors que le réseau français de l'action extérieure couvre 161 pays, il ne compte pas moins de 589 ordonnateurs de dépense, soit une moyenne de 3,6 gestionnaires par pays. Dans les postes les plus importants comme Berlin on arrive même à 13 services gestionnaires. Chacune de ces personnes (conseiller financier, attaché douanier, conseilleur pour les affaires sociales, etc.) gère elle-même ses crédits, lesquels peuvent être ridiculement faibles. C'est le cas par exemple du conseiller transport à Madrid dont l'enveloppe est de 23.000 euros.Ce cloisonnement, illustré à l'extrême par la coexistence de trois systèmes informatiques de gestion différents à l'étranger, à des conséquences très concrètes. Par exemple, il n'existe pas de "pool" de voitures que les services pourraient se partager, il n'y a pas plus de gestion commune du patrimoine immobilier que de politique centralisée des achats. C'est ainsi qu'à Washington, les fournitures de bureau font l'objet de 10 commandes séparées...Pour que la LOLF joue son rôle, Adrien Gouteyron invite "à la création de secrétaires généraux uniques dans chaque poste à l'étranger, recevant en dotation la totalité des crédits de fonctionnement", qu'il s'agisse du Quai d'Orsay, mais aussi des missions économiques et les autres services représentés à l'étranger.Anne EvenoLe Quai d'Orsay engage des réformes structurellesPour rationaliser ses dépenses et optimiser l'action du Quai d'Orsay, le ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, et Bercy ont signé un accord triennal (2006-2008) de modernisation. Ce contrat, qui est le premier accord de ce type entre Bercy et un ministère, définit le cadre budgétaire dans lequel les ressources, les effectifs et les moyens de fonctionnement du ministère évolueront. "Ce programme compte seize réformes structurelles", précise Philippe Douste-Blazy, parmi lesquelles la mise en place d'un pilotage interministériel de l'action de l'État à l'étranger. Ces actions passeront au crible d'indicateurs de performance. "C'est une réforme gagnant-gagnant. Elle profitera aux agents publics, aux citoyens et aux contribuables", renchérit Jean-François Copé.
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