Jean-François Copé : " Je suis opposé à la mise sous conditions de ressources des allocations familiales "

L'horizon économique s'assombrit. Faut-il infléchir la politique économique pour restaurer la confiance ?Il ne faut pas nier les faits. La conjoncture internationale s'est assombrie depuis un an du fait de deux éléments. Premièrement, la crise américaine liée à la crise du crédit hypothécaire et des subprimes. Quand l'économie américaine va mal, cela fait tousser la croissance mondiale. Deuxièmement, la forte croissance des pays asiatiques, gros consommateurs de matières premières, qui explique pour une bonne part les hausses de prix. Nous, responsables politiques, devons faire preuve de sang-froid et de maîtrise. Il ne faut surtout pas changer de cap. Celui que nous avons pris repose sur des orientations qui permettent de préserver la croissance. Par exemple, le paquet fiscal de juillet dernier, en cette période de ralentissement mondial, est une bonne décision. Il n'était pourtant pas fait pour cela...Le résultat est là : nous avons pris des mesures contracycliques qui répondent tout à fait aux problèmes actuels.Cela signifie-t-il qu'il faut continuer à baisser les impôts ?Non parce que nous n'en avons plus les moyens. Il faut en premier lieu gagner la bataille du travail en convaincant les Français de travailler plus pour améliorer leur pouvoir d'achat. Parallèlement, nous devons impérativement poursuivre en 2008 les réformes de structures, et cela dans trois directions. La réforme de l'État. Elle doit viser clairement à baisser les dépenses publiques tout en les rendant plus efficaces. Celle de l'assurance-maladie ensuite, grand échec du quinquennat précédent. Il faut absolument revoir dès 2008 le fonctionnement de l'hôpital, la politique du médicament, les relations avec les assurés. Enfin, la réforme des retraites. Celle des régimes spéciaux est un beau symbole mais elle ne concernait que 500.000 personnes. Maintenant, c'est l'ensemble des 60 millions de Français dont il faut se préoccuper pour sauver leur retraite avant qu'il ne soit trop tard.Les députés vont examiner au printemps le projet de loi de modernisation économique qui intégrera des pistes de réformes préconisées par le rapport Attali. Reprendrez-vous à votre compte ces propositions ?Nous serons très créatifs sur ce texte. J'ai dit au Premier ministre que nous souhaitions vivement être partie prenante des suites données à ce rapport. Les députés veulent être respectés sur la forme et entendus sur le fond. Il y a de bonnes choses dans ce rapport. Ce qui concerne, par exemple, le cumul emploi-retraite, la création des écopolis, la réduction des délais de paiement aux PME, la flexibilité ou encore l'évaluation des enseignants.Êtes-vous opposé à certaines propositions ?Il y a des sujets en débat sur lesquels nous sommes réservés. Car le rapport Attali souffre d'une grande faiblesse, celle de ne pas prendre en compte la dimension d'aménagement du territoire et la distinction entre les grandes métropoles et nos banlieues et nos campagnes. L'exemple concret est celui des professions réglementées.Sur cette question précisément, êtes-vous favorable à la déréglementation des taxis ?Sur la question des taxis, ce serait une folie d'avoir une réponse uniforme sur tout le territoire. En zone rurale, le problème n'est pas le manque de taxis mais plutôt les conditions de travail. Les taxis rendent dans les campagnes des services de nature très différente qu'à Paris.Avez-vous d'autres réserves ?Il y a un point sur lequel je suis totalement opposé, comme l'ensemble du groupe UMP, c'est la mise sous condition de ressources des allocations familiales. Notre politique familiale repose sur un pacte qui recueille le consensus car il répond au problème démographique. C'est grâce à cette politique familiale que la vitalité de notre natalité est meilleure que dans les autres pays. Je ne laisserai pas casser, pour des motifs idéologiques, un des points du modèle social qui marche le mieux en France.Le rapport Attali propose de financer la suppression de 3 points de cotisations sociales par une hausse de la CSG et de la TVA, réactivant le chantier de la TVA sociale. Cela vous semble-t-il opportun ?Le mot TVA sociale est ravageur parce qu'il est anxiogène et qu'il est hors de question d'annoncer aux Français la mise en oeuvre d'une disposition de cette nature sans avoir recueilli au préalable un consensus national sur la manière de moderniser le financement de notre protection sociale.Le débat est pourtant lancé depuis longtemps...Avant d'engager une réforme du financement de la protection sociale, regardons d'abord si nous dépensons bien et si nous ne pouvons pas dépenser mieux. Cela concerne l'organisation de notre système d'assurance-maladie sur lequel rien de courageux n'a été fait ces dernières années. Cela concerne aussi la gestion du RMI et le financement des retraites. Nous devons d'abord en 2008 examiner comment baisser la dépense sociale avant de s'attaquer au financement de la protection sociale.La succession en flux tendu de textes législatifs ne limite-t-elle pas le rôle des parlementaires ?Nicolas Sarkozy a souhaité que la réforme institutionnelle permette une revalorisation du rôle du Parlement. Nous sommes maintenant prêts, majorité et opposition, à installer le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques. Ce comité interviendra à trois moments. Il fera des études d'impact avant qu'une disposition ne soit lancée, il contrôlera l'application des lois en vérifiant par exemple que les textes soient promulgués et que les décrets d'application soient sortis et, enfin, il fera une évaluation des résultats obtenus. Ce comité sera présidé par le président de l'Assemblée, Bernard Accoyer, qui s'est beaucoup investi dans ce débat au même titre que les présidents de commissions et les responsables de l'opposition. Ce comité devrait être opérationnel très vite, avant le printemps sans doute.Ce comité s'attachera au contrôle de tous les textes ?Non. Ce serait matériellement impossible. On va plutôt choisir des sujets sur lesquels les Français attendent des résultats concrets. Par exemple, les députés ont très envie de faire mener des études d'impact a priori ou d'évaluation a posteriori sur des textes liés au développement durable, au logement ou la politique sociale.
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