Temps de travail : Juppé prêt à légiférer contre les abus

Le gouvernement ne présentera pas de loi générale sur la réduction du temps de travail à l'automne, mais se réserve le droit de faire voter des mesures législatives pour limiter certains abus sur le temps partiel et les heures supplémentaires si les partenaires sociaux ne parviennent pas à stopper les dérives avant la fin de l'année. Telles sont les principales conclusions du sommet sur le temps de travail, qui a réuni, lundi à Matignon, autour du Premier ministre, le CNPF, la CGPME, et les cinq organisations syndicales. Au recours immédiat à la loi, qui aurait cassé le processus contractuel, le Premier ministre a donc préféré accorder aux partenaires sociaux un délai supplémentaire pour avancer sur le dossier complexe de l'aménagement et de la réduction de la durée du travail. Il invitera le patronat et les syndicats à une nouvelle rencontre « avant la fin de l'année », pour faire le point des avancées. Sur le dossier sensible du temps partiel, le gouvernement a l'intention de faire preuve de la plus grande fermeté pour mettre un terme aux nombreux abus constatés, notamment dans les secteurs du commerce et de la grande distribution, qui multiplient par exemple les coupures multiples dans la journée, ou imposent aux salariés des amplitudes journalières trop fortes. Le gouvernement demande que des solutions soient trouvées au sein des branches dans lesquelles des abus sont le plus fréquemment signalés. Il évaluera la situation au 30 septembre avec les branches concernées et décidera, le cas échéant, de proposer, dès la session d'automne, des mesures législatives appropriées. Sur les heures supplémentaires, Alain Juppé a demandé hier au CNPF et aux syndicats d'engager une nouvelle négociation à l'échelle nationale interprofessionnelle afin d'examiner les « conditions d'un recours mieux maîtrisé aux heures supplémentaires, notamment en prévoyant plus systématiquement leur compensation sous forme de repos compensateur ». Le Premier ministre souhaite que la négociation aboutisse avant la fin de l'année. En réponse aux inquiétudes des syndicats devant la cascade de plans sociaux annoncés ces dernières semaines, le gouvernement veut contraindre les entreprises à jouer de la réduction du temps de travail pour tenter de limiter les licenciements. Alain Juppé a enjoint à Jacques Barrot, le ministre du Travail, de refuser de financer certains dispositifs pris en charge par l'Etat et utilisés dans les plans sociaux - les préretraites FNE par exemple - si l'entreprise n'a pas examiné « de manière complète et approfondie », toutes les possibilités d'aménagement et de réduction du temps de travail. Enfin, le gouvernement veut que les gains de productivité obtenus par la flexibilité des horaires soient équitablement répartis entre l'entreprise et les salariés. Il souhaite notamment que celle-ci redistribue aux salariés une partie des allégements de charges dont elle bénéficie quand elle développe le temps partiel. A défaut d'un accord interprofessionnel entre les partenaires sociaux, l'Etat envisage sur ce point des dispositions législatives. A l'issue de la réunion, le patronat a exprimé sa satisfaction de voir que le gouvernement acceptait « pour l'instant » de ne pas légiférer. « Nous allons continuer les négociations », a déclaré Jean Gandois, le président du CNPF. « Ce sont les entreprises qui peuvent changer l'organisation du travail », a-t-il poursuivi, en annonçant une rencontre avec les syndicats en novembre. Sentiments plus partagés dans les rangs syndicaux. La CGT a réitéré sa demande d'une loi-cadre sur les trente-cinq heures, sans perte de salaire. « Les rendez-vous, ce sont les salariés qui les feront dans l'unité la plus large », clame déjà la centrale de Louis Viannet. Le leader de FO, Marc Blondel, prévoit une rentrée sociale agitée. « Il y a deux réalités, a-t-il relevé hier. Celle qui apparaît autour de la table, et celle qui s'exprimera en septembre chez les salariés. » DELPHINE GIRARD
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