Berlin songe à protéger son industrie

L'Allemagne envisage de rentrer de plain-pied dans l'interventionnisme en politique industrielle. Dans une interview accordée à notre confrère Handelsblatt et publiée aujourd'hui, le ministre des Finances allemand, Peer Steinbrück (SPD), n'y va pas par quatre chemins, en se déclarant " pour une politique industrielle active ", cela de manière à répondre à la question : " L'Allemagne veut-elle disposer d'acteurs puissants et internationaux dans les domaines des télécommunications, des banques, de la poste, de la logistique et de l'énergie ? " Selon le ministre, " il devrait y avoir un intérêt à soutenir ces secteurs de services ". Une politique industrielle active serait vue comme la parade à mettre en place pour se prémunir d'attaques potentielles d'investisseurs étrangers.Berlin ferait ainsi une révolution culturelle, en jetant aux orties sa retenue proverbiale en matière d'interventionnisme de l'État dans l'industrie. " Des pays comme l'Italie, la France ou l'Espagne pratiquent une telle politique industrielle de manière plus pragmatique et naturelle que nous. Le gouvernement fédéral doit faire évoluer cela, s'il veut éviter que des industries centrales soient reprises par des fonds d'État étrangers ou des investisseurs privés ", affirme le ministre au Handelsblatt.LE LOBBY PATRONAL PRECONISE LA LIBERTE D'INVESTISSEMENTDe telles menaces d'un genre nouveau proviennent de fonds souverains issus de Chine, de Russie ou du Golfe, regorgeant de réserves de change qui peuvent investir dans une proie vulnérable. Des acteurs plus classiques tels que les fonds de capital-risque sont aussi très argentés et prêts à entrer dans le jeu. L'investisseur Guy Wyser-Pratte s'imaginait récemment dans les colonnes de la Frankfurter Allgemeine Zeitung pouvoir reprendre une société du DAX 30, l'indice vedette de la Bourse de Francfort.Dans le débat intense sur une politique de protection de l'économie, le lobby patronal BDI prône la liberté d'investissement, " y compris chez nous ". Or, s'activent déjà des fonctionnaires du ministère des Finances, de l'Économie et de la chancellerie pour trouver un catalogue de mesures répondant à de possibles attaques étrangères. Le ministre a qualifié à ce stade de " stupididité " les informations de presse, selon lesquelles une agence de protection face aux investissements étrangers serait mise sur pied, à l'instar du modèle américain. Une boîte à outils doit, selon Steinbrück, être trouvée, sans recourir à des artifices comme la golden share (action assortie d'un droit de veto). L'intervention de Berlin pour assurer le rachat des parts de Daimler-Chrysler dans le capital d'EADS est cité comme un exemple à suivre.
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