Thea M. Lee : " Cela fait vingt ans que le salaire des Américains stagne "

Le syndicalisme américain est-il vraiment aux abois ?La situation des syndicats aux États-Unis est vraiment très difficile, notamment dans le secteur privé où leurs membres sont harcelés et même licenciés. Douze années de Congrès aux mains des républicains (1994-2006) et six années de présidence Bush ont laminé les syndicats et les droits des travailleurs américains. C'est pour cela que nous plaçons beaucoup d'espoir dans le Free Employee Choice Act. En effet, si cette réforme passe, ce sont près de 60 millions de travailleurs qui pourraient s'ajouter aux 15,4 millions déjà syndiqués.Mais l'érosion de vos adhérents ne reflète-t-elle pas votre incapacité à vous adapter à la mondialisation ?À la base de nos problèmes réside le fait que les deux présidences de Bush ont été de celles qui se sont le plus opposées aux syndicats et qui ont pratiqué la pire des politiques à leur encontre. Mais cette érosion que vous évoquez est aussi le résultat de politiques économiques successives qui ont abouti à des dizaines de milliers d'emplois détruits. Depuis 2000, du fait de la politique commerciale de George W. Bush, nous avons perdu près de trois millions d'emplois manufacturiers dont une partie seulement a été remplacée par des postes dans les services où, contrairement à ce qui se passe dans l'industrie, il est très difficile de se syndiquer.On en revient donc à votre mise en cause de la mondialisation en raison de son impact négatif sur l'industrie américaine ?Les syndicats américains ne sont pas opposés à la mondialisation ni aux échanges commerciaux. Mais nous critiquons le gouvernement américain, qui semble se satisfaire du fait que la mondialisation impose une convergence par le bas des standards sociaux et des droits des travailleurs. La mondialisation, c'est pour nous aussi l'explosion de notre déficit commercial, ce qui témoigne de la destruction de l'industrie américaine. Et à cela s'ajoute la question des salaires. Le but réel de certains laudateurs de la mondialisation - c'est le cas de la Réserve fédérale - c'est de limiter les salaires et nous ne pouvons l'accepter.Votre discours tranche tout de même avec les jugements positifs sur l'état de l'économie américaine...L'appréciation de l'économie américaine diffère selon que vous êtes à Wall Street ou que vous êtes un travailleur américain. Pour Wall Street, tout va bien. L'économie tourne bien, les indicateurs sont au vert. Pour le travailleur, cela fait vingt ans que le salaire des Américains stagne. Pour le bien des États-Unis qui, je le répète, ne sont pas Wall Street, nous plaidons pour des solutions politiques qui permettent de ralentir le rythme de la mondialisation et de réfléchir sur ses effets.L'AFL-CIO est sévère à l'encontre de Bush mais l'on sent aussi une réserve vis-à-vis des démocrates...Nous n'avons pas pardonné à Bill Clinton d'avoir signé l'Alena et, surtout, d'avoir fait entrer la Chine dans l'OMC. Mais aujourd'hui, les démocrates sont bien plus attentifs aux questions de normes sociales à inclure dans les accords commerciaux. C'est un progrès appréciable.
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