Japon : un socialiste aux commandes des finances

Wataru Kubo n'a pas froid aux yeux. A soixante-six ans, le secrétaire général du Parti socialiste japonais a en effet décidé d'accepter, selon les agences de presse nippones, un fauteuil dont personne ne voulait : celui de ministre des Finances du gouvernement dirigé par Ryutaro Hashimoto. Ce dernier devient officiellement Premier ministre aujourd'hui, après avoir reçu l'investiture du Parlement. Une conjoncture peu enthousiasmante Alors qu'il ne dispose d'aucune expérience gouvernementale, Wataru Kubo obtient en prime le rang de vice-Premier ministre, sans doute pour lui donner davantage de poids politique au moment où il devra s'attaquer au dossier le plus délicat de la nouvelle administration : la crise financière des « jusen », ces établissements de crédit immobilier qui ont accumulé quelque 320 milliards de francs de créances, probablement irrécupérables, avec pour résultat l'obligation faite au gouvernement de combler le trou en recourant partiellement à des fonds publics - à hauteur de 35 milliards de francs environ. A l'impopularité garantie dans le traitement du dossier s'ajoute une conjoncture qui n'est guère enthousiasmante : la croissance ne devrait pas dépasser 2 % cette année, alors que 1995 a été marquée par un chômage record (3,4 % de la population active fin novembre) et une baisse des prix à la consommation. Conclusion : il faut être « fou » pour aller s'asseoir dans le fauteuil du ministre japonais des Finances, expliquait l'un des caciques du Parti libéral-démocrate, Seiroku Kajiyama, pour justifier son refus. Ce proche du futur Premier ministre obtient à la place le poste de secrétaire général du gouvernement, qui en fera également le porte-parole de Ryutaro Hashimoto. Un choix qui peut surprendre, Seiroku Kajiyama ayant dû quitter précipitamment son fauteuil de ministre de la Justice, en 1990, pour avoir comparé les gens de couleur à... des « prostituées » qui détruisent la vie de leur quartier. Parmi les autres nominations attendues, c'est à Shusei Tanaka, ancien directeur-adjoint de l'Agence de planification économique, que devrait revenir le ministère de l'Industrie et du Commerce international (Miti), alors que Yukihido Ikeda, un ancien responsable du ministère de la Défense, prendra en main le ministère des Affaires étrangères. Le nouveau ministre des Finances, Wataru Kubo, a débuté sa carrière dans l'enseignement, avant de se consacrer au syndicalisme, puis à la politique, qui allait lui permettre de conquérir trois mandats successifs de sénateur. Numéro deux du Parti socialiste depuis 1993, il incarnait l'aile droite de cette formation, ce qui le conduisait à s'opposer aux positions jugées plus à gauche du Premier ministre sortant, Tomiichi Murayama. Wataru Kubo succède à Masayoshi Takemura, qui se consacrera désormais à la seule direction de son Parti centriste, Sakigake, la plus modeste des trois formations de la coalition gouvernementale aux côtés des socialistes et des libéraux-démocrates de Ryutaro Hashimoto. THIERRY ARNAUD
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