La chimie de spécialités en plein marasme

Les temps sont durs pour les professionnels de la chimie de spécialités. Leur activité de niche ne leur a pas permis de résister à la dégradation de la conjoncture, et par là même de bénéficier d'un statut défensif en 2008. Au contraire. En l'espace d'un an, les actions Rhodia et Arkema ont perdu plus des trois quarts de leur valeur. De leur côté, les suisses Clariant (? 30 %) et Ciba Holding (? 7 %) ne doivent leur meilleur sort qu'à des situations spéciales. Le premier a bénéficié entre avril et mai 2008 d'un effet dit de « recovery » lié à un retour aux profits au titre de l'exercice 2007. Le second a fait l'objet, mi-septembre, d'une offre de rachat lancée au prix unitaire de 50 francs suisses par BASF. Exception faite de ce dernier exemple, les multiples de capitalisation des acteurs de ce segment sont tombés à des niveaux historiquement bas. Le PER moyen (ratio cours sur bénéfice par action) de l'échantillon atteint à peine plus de 5 fois les profits attendus en 2009. C'est près de 3 points de moins que le ratio affiché par l'Euro Stoxx 50. Mais surtout 50?% en deçà des multiples enregistrés sur l'indice sectoriel Bloomberg European Chemical qui, au passage, a vu son repli atteindre 40 % sur l'année. clients victimesPourtant, lorsque la facture énergétique et le coût des matières premières ont atteint des sommets au cours du premier semestre 2008, les chimistes de spécialités étaient parvenus à rassurer la communauté financière en mettant en avant leur capacité à répercuter cette surcharge sur leurs prix de vente. Seul hic : ce fameux « pricing power » n'en était pas vraiment un. En l'occurrence, Rhodia, Arkema et consors profitaient jusque-là de la robustesse d'une demande qui déterminait, à elle seule, la possibilité d'un éventuel rehaussement de tarifs. Depuis, la récession économique a fait des victimes. Notamment parmi leurs principaux clients. « L'affaissement de l'activité a été particulièrement brutal entre octobre et novembre. Et surtout pour les secteurs de l'automobile et de la construction », remarque Lucas Sevenin, analyste chez Standard & Poor's. Ainsi, compte tenu d'annulations de contrats de la part, notamment, de groupes textiles dans ses branches Polyamide et Silcea, Rhodia a averti, début décembre, que le recul de son résultat brut d'exploitation courant devrait être inférieur non pas de 5 % mais de 10 %. Une semaine plus tard, Arkema revoyait, à son tour, sa copie en anticipant une baisse de 15 % de son chiffre d'affaires au quatrième trimestre. En résumé, le positionnement de niche qui faisait leur force en période de forte croissance fait aujourd'hui leur faiblesse. Plus de la moitié de leurs revenus provient de domaines d'activité figurant parmi les plus touchés de l'économie. Néanmoins, aucune ne présente, selon Lucas Sevenin, « un réel risque de défaut ». De l'avis de certains observateurs, le réveil boursier de ce segment de la chimie pourrait être d'ordre spéculatif. À l'image de l'OPA de BASF sur Ciba Holding ou des discussions engagées par Dow Chemical pour la reprise de Rohm and Haas, les grands généralistes pourraient profiter de la faible valorisation des spécialistes pour diversifier leur portefeuille. Mais, à l'image des récents déboires rencontrés par le géant américain, la problématique de financement est prépondérante. F.M.
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