Quand Bruxelles freine la production de génériques au Sud

Alors qu'un rapport publié vendredi 28 novembre par la Commission européenne accuse les laboratoires pharmaceutiques de « retarder » ou d'« entraver » la commercialisation de médicaments génériques sur le marché européen, avec pour conséquence une augmentation des dépenses publiques de santé et des freins à l'innovation, une lettre d'un ancien commissaire européen au Commerce, le Britannique Peter Mandelson, à la Thaïlande en date du 21 février 2008, dont « La Tribune » a obtenu une copie, fait pression sur ce pays pour qu'il s'abstienne de produire des génériques. Selon l'ONG Act Up, qui a été la première à dénoncer ce chantage, la France n'aurait pas été étrangère à ces pressions car les autorités thaïlandaises avaient exprimé leur souhait d'émettre une licence obligatoire sur l'un des médicaments phare de Sanofi-Aventis, le Plavix, un anticoagulant très recherché dans le traitement du cancer. Selon Pauline Londeix, de l'ONG Act Up Paris, ce genre de pressions des laboratoires pharmaceutiques sur les pays en voie de développement est monnaie courante. Un cas similaire s'était produit, en 2006, selon elle, avec le géant américain Abbott « qui avait refusé de baisser son prix sur un antirétroviral [ARV] de deuxième ligne, le Kaletra, menaçant de se retirer du marché au cas où la Thaïlande persisterait dans son intention d'appliquer les dispositions des accords de Doha concernant la propriété intellectuelle ».Les dispositions prévues dans le cadre des accords de Doha permettent aux pays en développement de contourner les brevets afin de produire leurs propres génériques ou bien de s'approvisionner auprès de pays émergents comme l'Inde ou le Brésil, devenus les premiers fournisseurs au monde de génériques. « Ces dérogations sont essentielles car elles permettent à des populations vivant parfois en dessous du seuil de pauvreté d'avoir accès à des médicaments souvent inaccessibles », poursuit-elle.AbusPour la plupart des ONG, comme MSF, Oxfam ou Act Up Paris qui militent pour un meilleur accès aux médicament, la production de génériques dépasse largement la simple question d'un mauvais fonctionnement de la concurrence, comme l'a laissé entendre la Commission européenne. Au moment où se tient à Dakar du 3 au 7 décembre la Conférence internationale sur le sida et les infections sexuellement transmissibles (Icasa), réunissant plus de 5.000 participants dont le Prix Nobel Françoise Barré-Sanoussi, elles s'inquiètent des conséquences de la crise financière sur la volonté des pays riches de financer les ARV dans les pays du Sud. « Les abus de position dominante commis par la plupart des grands groupes pharmaceutiques, notamment en ce qui concerne les antirétroviraux, doivent être systématiquement sanctionnés », estime un expert basé à Dakar. Il y a urgence : en Afrique subsaharienne, près de 7 millions de malades du sida sont actuellement en attente de traitements.n ++BSD ++SupprimerBalise NePas supprimer n signature++BSF ++
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