Le gouvernement redoute la grogne des universitaires

Les ennuis n'arrivent jamais là où on les attend. À peine l'Élysée pensait avoir désarmorcé la grogne des étudiants en leur promettant l'ouverture dans les prochains jours de négociations sur l'amélioration de leurs conditions de vie, que c'est au tour de leurs enseignants de ruer dans les brancards.Lundi, réunis en coordination nationale, les enseignants-chercheurs ont appelé à la grève illimitée, à une journée de mobilisation jeudi (AG, manifestations locales), jour de l'intervention télévisée de Nicolas Sarkozy, et à une manifestation nationale mardi prochain. En ligne de mire : le projet de décret de Valérie Pécresse, la ministre de l'Enseignement supérieur, réformant le statut des 57.000 enseignants-chercheurs. Le texte prévoit en particulier un réaménagement de leurs obligations de services en fonction des besoins des universités. Ils pourront ainsi être astreints à plus ou moins d'heures d'enseignement au détriment de leurs recherches personnelles. Habitués à gérer leur temps quasiment comme bon leur semble, ils voient dans la réforme des risques d'arbitraire de la part des présidents d'université devenus les vrais patrons et pouvant donc décider de l'emploi du temps et des promotions.« Il n'est pas question de retirer le décret. Il ne comporte que des avancées pour les intéressés », a déclaré Valérie Pécresse, hier, sur Europe 1, alors que Martine Aubry, au contraire demandait un « moratoire » sur ces réformes. Il n'empêche. Aujourd'hui la ministre recevra le bureau de la Conférence des présidents d'université pour évoquer les garanties d'application de la réforme. Elle demandera aux présidents d'adopter une « charte de bonne conduite » afin d'éviter qu'ils se conduisent en « potentats locaux » et organisent les obligations d'enseignement « à la tête du client ». Par ailleurs, elle s'est engagée pour l'automne à faire adopter un plan de revalorisation des carrières des enseignants-chercheurs. Enfin, elle va revoir les conditions d'évaluation des professeurs.Car même les mandarins, à l'image des professeurs de droit qui ne passent pas pour de dangereux gauchistes, contestent des éléments de la réforme comme l'évaluation de leurs compétences tous les quatre ans par les présidents d'université.En fait, au moment où les syndicats cherchent comment relancer le mouvement social du 29 janvier, le pouvoir craint par-dessus tout que la contestation « pourrisse » et que les étudiants rejoignent les enseignants-chercheurs dans la contestation des réformes des universités et de la recherche menées depuis deux ans.gros grain de sablePour Valérie Pécresse, la bonne élève du gouvernement, l'actuelle grogne universitaire constitue en tout cas un gros grain de sable dans une mécanique jusque-là bien huilée. Après avoir fait voter sans drame quelques semaines seulement après son installation au ministère de l'Enseignement supérieur une réforme de l'autonomie des universités que certains disaient impossible à mettre en ?uvre, la voie paraissait totalement dégagée pour cette ex-chiraquienne passée naturellement au sarkozisme. Sa candidature à la présidence de la région Île-de-France face au ministre des Relations avec le Parlement, Roger Karoutchi, semble en effet à portée de main après le vote des militants UMP en mars. Le premier débat public entre les deux candidats avait d'ailleurs lieu hier soir au Raincy, en Seine-Saint-Denis. Surtout, son nom commence à être murmuré pour représenter l'UMP à la présidentielle de? 2017, ce qui a le don d'exaspérer d'autres prétendants comme Jean-François Copé ou Xavier Bertrand. La façon dont elle saura gérer la sortie de l'actuelle crise universitaire sera un indicateur essentiel pour la suite de sa carrière politique.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.