Les opérateurs télécoms se rebellent contre la loi antipiratage

La loi « Création et Internet » n'a plus qu'une étape à franchir avant le vote définitif : celle de la commission mixe paritaire ? députés et sénateurs ?, qui se réunira le 7 avril. Adoptée au Sénat en octobre, elle a été votée jeudi soir à l'Assemblée nationale. Mais il faudra encore quelques mois pour que la Haute autorité de protection des droits sur Internet (Hadopi), instaurée par la loi, saisie par les détenteurs de droits de cas de téléchargement illégal de musique ou de films, fasse adresser aux internautes repérés les premiers courriers d'avertissement, par e-mail puis par lettre recommandée.Quant à la sanction pour les récidivistes qui auraient ignoré ces mises en garde, la coupure de l'accès Internet, c?ur de la riposte graduée de la loi, les fournisseurs d'accès avertissent que sa mise en place sur leurs réseaux implique un processus compliqué et long, qui prendra 12 à 18 mois. Et leur réticence est montée d'un cran après le vote à l'Assemblée. LobbyingDéjà opposés au principe de la coupure, les opérateurs télécoms sont ulcérés par les derniers amendements votés par les députés. Ces derniers ont adopté, contre l'avis du gouvernement, une disposition dispensant les internautes fautifs de payer la partie Internet de leur abonnement, afin qu'ils ne soient pas doublement sanctionnés : coupure de l'accès à Internet et paiement de cet accès maintenu. « Pour éviter cette double peine à l'inter-naute, on l'inflige aux fournisseurs d'accès, qui n'ont rien à voir avec le délit commis », s'insurge Yves Le Mouël, directeur général de la Fédération française des télécoms (FFT).« Le modèle de développement de l'Internet en France est menacé, c'est un mauvais coup porté au développement du haut débit », avance même le lobby des opérateurs. En effet, la loi prévoyant de couper le seul accès Internet, « on nous demande de démembrer nos offres triple play, Internet-TV-téléphone. Or, nos business models n'ont pas été bâtis comme cela. Et qui va décider combien coûte la partie Internet ? », argumente Yves Le Mouël. La ministre de la Culture, Christine Albanel, a évoqué un montant compris « entre 7 et 10 euros par mois », qui laisse perplexes les FAI. « L'autorité publique en viendrait donc à prendre une décision sur les prix de détail ? », s'interrogent, incrédules, les opérateurs télécoms. Ils s'inquiètent de devoir mettre en place une offre spécifique, sans accès Internet, puisque des dizaines de milliers d'internautes seront concernés chaque année, à raison de 500 suspensions par jour estimées par le ministère de la Culture. « Ce serait un retour en arrière catastrophique », considère le porte-parole de la FFT. La Fédération espère que l'amendement, introduit par l'Assemblée, sera supprimé en commission mixte paritaire.Les fournisseurs d'accès à Internet s'inquiètent surtout du financement des coûts liés à ce dispositif : il va falloir mettre en place des systèmes dans les réseaux de chacun, l'opérateur historique et son réseau en cuivre, les alternatifs et leurs réseaux dégroupés. Au total, les coûts sont estimés à « un montant minimal de plus de 70 millions d'euros pour 2009-2012 » selon le Conseil général des technologies de l'information, rattaché au ministère de l'Industrie, à près de 100 millions selon les opérateurs.Ces derniers veulent obtenir l'assurance que ces coûts seront pris intégralement en charge par l'État. « Nous souhaitons une clarification sur la prise en charge des coûts », insiste la Fédération, qui craint que l'État ne couvre qu'une part minime, comme l'envoi des e-mails. nLe modèle de développement de l'Internet en France est menacé. »Yves Le Mouël
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