Philippe Besson, l'attachement américain

livrePersonnages mélancoliques d'une Amérique racontée avec nostalgie. Celle des petites villes et des dîners fréquentés par la classe moyenne. « la Trahison de Thomas Spencer », le dernier roman de Philippe Besson, ressemble à un tableau d'Edward Hopper duquel s'échapperait la BO d'« American Graffiti », le film de George Lucas. Car le peintre comme l'écrivain brossent un portrait intimiste des États-Unis, à travers une ?uvre bien plus profonde qu'il n'y paraît.Pour ce faire, Besson a imaginé l'histoire de Paul et Thomas, « jumeaux mais pas frères », nés tous deux le 6 août 1945 alors que l'armée américaine larguait sa première bombe atomique sur Hiroshima. Résidents de Natchez, petite ville du Sud située sur les rives du Mississippi, voisins dès leur plus jeune âge, ils grandissent ensemble, ne se quittent pas d'une semelle. Jusqu'à l'arrivée de Claire MacMullen.de puissants personnagesÀ première vue, ce livre ressemble à une petite chose toute simple, déjà lue ailleurs. Une trahison énoncée, un récit fluide, déroulé avec humilité dans un ordre chronologique, à travers des chapitres courts. Et pourtant, il y a là quelque chose de plus complexe qui fait toute la force et la richesse du roman. D'abord parce que l'auteur campe deux puissants personnages masculins en fusion, même si tout les oppose. Paul est conservateur, attaché aux valeurs du Sud des petits Blancs, peu enclin à remettre en cause l'ordre établi. Élève brillant, étranger à toute forme de racisme, Thomas n'hésite pas à soutenir les droits civiques, à manifester contre la guerre du Vietnam, une fois à l'université. Cela n'empêche pas les deux garçons de développer une amitié extrêmement forte, parfois ambiguë, basée sur une confiance totale en l'autre.Aux jours qui passent, Besson mêle l'évolution des États-Unis des fifties aux seventies. Le pays, d'abord pris par la guerre de Corée et le maccarthysme, sombre très vite dans l'angoisse des attaques nucléaires, reprend espoir avec Kennedy avant d'être rattrapé par le Vietnam. Et même si l'on devine la fin imaginée par Besson pour cette histoire, ce dernier nous tient en haleine, non seulement parce que Thomas s'adresse directement au lecteur mais aussi parce qu'il se dégage de ce livre une voix forte, très américaine. Comme si l'écrivain avait été envoûté par ce pays jusqu'au bout de sa plume. Y. Y. « La Trahison de Thomas Spencer », Julliard, 19 euros.Textechrono
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