Le blues des fabricants de jets privés

Ed Bolen se dit « profondément inquiet ». Le président de l'Association de l'aviation d'affaires américaine (NBAA) vient d'écrire à Barack Obama pour l'implorer de protéger ce secteur « affrontant l'une des pires tempêtes économiques que personne ait jamais vue ». Il craint les effets du battage médiatique entourant les jets d'affaires dont le président des États-Unis et le Congrès veulent priver les entreprises aidées financièrement par le gouvernement fédéral.La polémique a démarré à la mi-novembre lorsque les patrons des constructeurs automobiles de Detroit, dont la situation financière est très tendue, sont venus quémander une aide collective de 25 milliards de dollars au Capitole. Les médias avaient alors révélé qu'ils s'étaient tous trois déplacés en jet privé, ce qui avait scandalisé les parlementaires. Les directions de GM et Ford avaient vite annoncé la cession de leurs flottes d'appareils, Chrysler précisant qu'il se contentait d'en louer occasionnellement. Mais, depuis lors, le jet d'affaires est considéré par l'opinion publique américaine comme un caprice de patron irresponsable, aussi condamnable que les bonus versés aux « CEO » de Wall Street.La semaine dernière, Citigroup, qui a déjà perçu 45 milliards de dollars d'aide publique, a renoncé à l'achat d'un nouveau jet, un Falcon 7X à 50 millions de dollars commandé en 2005 à Dassault Aviation. Avant cette annonce, le porte-parole de la Maison-Blanche, Robert Gibbs, avait averti que Barack Obama estimait que réceptionner un nouveau jet ne constituait « pas la meilleure façon d'utiliser l'argent » public. Mercredi, Bank of America a averti qu'elle s'apprêtait à céder trois de ses sept appareils et l'hélicoptère dont elle a hérité en achetant Merrill Lynch.emplois menacésÀ la NBAA, Ed Bolen déplore que l'aviation d'affaires « soit placée au pilori par la presse ». Il rappelle dans sa lettre que le secteur emploie des milliers de personnes aux États-Unis dans l'industrie (aéronautique, électronique, équipements?) ou les services (pilotes, techniciens, employés d'aéroports?). « La réalité est qu'une industrie américaine vitale est dévastée par la conjoncture et que certaines initiatives récentes des parlementaires accroissent ses souffrances et les suppressions d'emplois », s'alarme-t-il.Le numéro un mondial du secteur, l'américain Textron, fabricant du Cessna, a subi au trimestre dernier une perte opérationnelle de 343 millions de dollars : l'annulation de 23 commandes. Il prévoit 2.000 suppressions de postes. Son concurrent Hawker Beechcraft, qui avait éliminé 500 postes en décembre, prépare aussi un nouveau plan social. Le canadien Bombardier a annoncé jeudi la suppression de 1.360 emplois dans ce secteur, et Dassault Aviation va passer, en 2009, de 9 à 8 Falcon produits par mois. Pour Amin Khoury, le PDG de BE Aerospace, qui s'exprimait jeudi lors d'une conférence, le marché devrait chuter de 50 % cette année et ce sera « sans doute pire en 2010 ».Éric Chalmet, à New York REABénéficiaire de l'aide publique, Citigroup a renoncé à acquérir un Falcon 7X pour ne pas froisser l'opinion.
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