Le Royaume-Uni prêt à des sacrifices sur les paradis fiscaux

La Grande-Bretagne est en train de durcir le ton dans sa lutte contre les paradis fiscaux. Longtemps accusé de duplicité pour ne pas s'attaquer sérieusement aux dépendances de la Couronne que sont Jersey, Guernesey et aux territoires d'outre-mer comme les îles Cayman, Londres semble décidé à faire le ménage devant sa porte. « Les paradis fiscaux et le système bancaire parallèle doivent passer dans les filets réglementaires », a lancé Gordon Brown hier.Lord Malloch-Brown, le secrétaire d'État britannique en charge de coordonner le G20, va même plus loin. Il reconnaissait à demi-mot que la City a longtemps bénéficié des paradis fiscaux, en accueillant une industrie financière spécialisée dans les produits exotiques : « La réforme aura un coût [pour la Grande-Bretagne, Ndlr]. Mais c'est une mesure de notre sérieux sur cette question. Il est temps que les leaders du monde soient prêts à aller contre leurs propres intérêts. »La Grande-Bretagne semble également soutenir le principe d'une liste noire des paradis fiscaux non coopératifs sur laquelle travaille actuellement l'OCDE. « Nous devons mettre en place un système clair qui identifie ceux qui ne respectent pas les règles internationales. »faire face à la récessionSelon lui, la réforme des paradis fiscaux est nécessaire pour faire face à la récession. « La crise n'a pas commencé dans les paradis fiscaux, mais nous ne pouvons pas nous permettre de ne réguler qu'une partie du système. Si nous imposons des régulations plus dures dans les principaux pays, aux États-Unis et en Grande-Bretagne par exemple, mais pas dans le reste du monde, nous risquons de voir la finance se délocaliser vers d'autres cieux, et nous ne ferons que transférer le problème. »Pendant des années, Londres s'était réfugié derrière l'indépendance des îles anglo-normandes pour ralentir toute réforme. Mais la crise bancaire a changé la donne. La faillite de la banque islandaise Kaupthing, dont la branche britannique est enregistrée à l'île de Man, a particulièrement inquiété Londres : ses dépositaires se sont retournés vers le gouvernement britannique après la faillite, alors même que le Trésor britannique n'a jamais reçu un centime d'impôts de cette succursale. Downing Street a donc lancé en décembre un rapport sur les centres off-shore liés à la Grande-Bretagne, dont les conclusions sont attendues fin avril.question de transparenceLes discussions ont porté jusqu'ici sur la nécessité de renforcer la régulation financière afin de prévenir de nouvelles crises, pas sur la question de la transparence. Raymond Baker, qui dirige le Global Financial Integrity, un « think tank » basé à Washington, a pu consulter le projet de communiqué final du G20. « Le terme de transparence n'y figure pas une seule fois », regrette ce spécialiste reconnu des flux financiers illicites.L'opacité du système financier international, autorisée par la prolifération des paradis fiscaux et des structures opaques (trust, « special purpose véhicle », fondation, etc.), ne permet pas d'apprécier correctement la profondeur de la crise qui affecte une large catégorie de produits financiers. C'est pour cette raison, selon Raymond Baker que « Washington en est à sa quatrième recapitalisation d'AIG ». La plate-forme mise en place par GFI, qui réunit 52 pays, dont la France, et plusieurs ONG, propose des mesures simples pour accroître la transparence du système financier : que les bénéficiaires de fondations et autre trusts soient connus des autorités, que l'échange d'informations sur le patrimoine des non-résidents devienne la norme, ou que les multinationales présentent des résultats pays par pays. n
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