Un an de cohabitation au Kremlin

Depuis un an, les kremlinologues se cassent la tête pour dénuder le mécanisme du mystérieux tandem Poutine-Medvedev. Nombre de décisions portent clairement la marque du premier. « En matière de politique étrangère, le style cassant et agressif de Poutine s'est perpétué. C'est visiblement lui qui décide des grandes orientations et, d'ailleurs, la composition du ministère des Affaires étrangères n'a pas chang頻, note Dmitri Orechkine, politologue indépendant.Pour autant, il serait très réducteur de cataloguer le président de facto dans le rôle de l'exécutant. « Dans les voies de sortie de la crise, le modèle dirigiste avec un renforcement de l'État défendu par Poutine est peu à peu mis de côté en faveur des efforts de Medvedev vers la libéralisation, la démonopolisation et la diversification de l'économie », estime le politologue.Les Russes perçoivent avec plus ou moins de lucidité cette nouvelle répartition du pouvoir. Un sondage récent du Centre Levada indique que 34 % des sondés considèrent Vladimir Poutine comme le véritable détenteur du pouvoir, 12 % seulement pensant la même chose de Dmitri Medvedev. Contre toute attente, un Russe sur deux pense que le pouvoir est partagé équitablement entre les deux hommes, alors que la formule du tandem est une première dans l'histoire du pays.terrains de rivalitéLe clan soutenant Vladimir Poutine est connu. Ce sont les forces de sécurité (les « siloviki »), les grands groupes d'État monopolistes. En revanche, nul ne sait au juste qui soutient le président, à part une poignée de proches, qui ne détiennent aucun poste clé. Pour élargir son pouvoir, Dmitri Medvedev pourrait puiser dans le vivier des personnalités en froid avec Vladimir Poutine. « Une partie de l'élite régionale devrait logiquement soutenir Medvedev car ce dernier a proposé de réintroduire l'élection des gouverneurs », estime Dmitri Orechkine. De même, une bonne part de la communauté d'affaires espère beaucoup des orientations libérales et des mesures anticorruption poussées par l'actuel président. « Ces mesures libérales reviennent à affaiblir les monopolistes soutenant Poutine, explique Dmitri Orechkine. Poutine consent devant l'urgence de la crise, mais il n'est pas exclu qu'il y ait un retour de balancier une fois la crise passée. » Les terrains de rivalité entre les deux hommes s'élargissent alors que Dmitri Medvedev cherche à étendre son influence aux « siloviki », cette caste de fonctionnaires proches des services de sécurité, en multipliant les rencontres avec leurs dirigeants. Enfin, le président a tendu la perche à l'opposition en accordant une interview à « Novaïa Gazeta », journal critiquant vertement Vladimir Poutine.Autre facteur susceptible de créer des tensions : l'aggravation de la situation sociale, déjà très problématique avec un bond du chômage. « La crise fait baisser parallèlement la popularité des deux hommes dans les sondages, explique Dmitri Orechkine. Or il va bien falloir faire porter le chapeau à quelqu'un et aucun des deux ne s'y résoudra. Medvedev a pris ses marques au Kremlin et, dorénavant, il ne sera pas facile de l'en déloger ! » De son côté, Vladimir Poutine est condamné à retourner au Kremlin s'il ne veut pas perdre progressivement le soutien de son propre clan, de plus en plus divisé à mesure que la crise ronge le budget et l'économie en général. n AFP
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.