La crise pousse les socialistes à réveiller le clivage droite-gauche

Ségolène Royal, Martine Aubry, François Hollande, Bertrand Delanoë, Laurent Fabius... Les dirigeants du Parti socialiste ont tous apporté leurs réponses à la crise. Mais avec un Nicolas Sarkozy mué en pourfendeur du capitalisme financier et en défenseur de la régulation, avec un gouvernement qui en appelle à l'unité nationale, la gauche a du mal à se faire entendre. D'abord parce qu'elle ne parle pas d'une seule voix.Pour l'économiste Thomas Piketty, régulièrement consulté par Ségolène Royal, les socialistes sont " inaudibles parce que pris dans la préparation de leur congrès " de novembre. Il appelle toutefois à " ne pas délirer sur un Nicolas Sarkozy de gauche ". " On sait depuis la crise de 1929 qu'il ne faut pas laisser s'effondrer les banques. Aller chercher un ralliement sur un sujet sur lequel il y a consensus depuis quatre-vingts ans, c'est un peu artificiel ", ironise l'économiste, pour qui " les conflits droite-gauche ne sont pas près d'être épuisés ". Et Thomas Piketty fait de la fiscalité le point de clivage majeur. " Quand Nicolas Sarkozy réalise le bouclier fiscal et condamne les parachutes dorés, c'est complètement contradictoire ", souligne-t-il, avant de rappeler que, aux États-Unis, " pendant près de cinquante ans, des années 30 aux années 80, jamais le taux supérieur de l'impôt fédéral sur le revenu n'est descendu au-dessous de 70 % ". " Que je sache, cela n'a pas tué le capitalisme ", assène-t-il, en estimant que cette question " va arriver dans le débat public " en Europe, surtout si Barack Obama remporte la présidentielle américaine. Le candidat démocrate propose de relever significativement ce taux supérieur.LA QUESTION FISCALE AU PREMIER PLANFrançois Hollande fait la même analyse. Pour le premier secrétaire du PS, la fiscalité et la question de la rémunération des dirigeants d'entreprises vont s'installer au coeur des controverses et donc raviver le clivage droite-gauche. " La droite française va être rattrapée par ses mesures fiscales ", assure-t-il, en évoquant à l'envi le paquet fiscal voté à l'été 2007. François Hollande reconnaît que l'embellie doctrinale des progressistes demande à être confirmée. Mais il juge désormais caduque la proclamation par François Fillon de la victoire idéologique de la droite au lendemain de l'élection de Nicolas Sarkozy. Sans baisser la garde. " Il faut que la gauche marque son point idéologique tout en pensant que la droite n'est pas au bout de sa mutation, de ses captations ", avertit le premier secrétaire du PS, pour qui " la droite française est une voleuse de mots ".Mais pour l'instant, François Hollande ne veut retenir que l'aspect " positif " de la situation : " En période de crise, sans aller jusqu'à l'unité nationale, il est réconfortant de voir un consensus sur les idées de régulation, d'intervention de l'État, sur le rôle des institutions financières internationales, sur la capacité des banques centrales à intervenir. Il ne faut jamais se plaindre qu'il y ait un cheminement de la raison. "Reste que la raison doit aussi progresser au PS, où les débats sur la succession de François Hollande semblent désormais décalés. " Le congrès doit changer d'enjeu ", souligne le toujours premier secrétaire, pour qui Reims doit moins porter sur le leadership que sur les réponses à la crise. " Il faut travailler et on s'intéressera à vous " , insiste François Hollande. Ce matin, les candidats à sa succession ne participeront pourtant pas au séminaire de réflexion sur la tempête financière.Sortie de crise en 2010 ?Selon le COE-Rexecode, " l'assainissement bancaire, la désinflation et la baisse des taux d'intérêt finiront par créer les éléments de soutien à l'activité en 2010. " En attendant, les pays de l'OCDE mangeront leur pain noir. Leur activité avancerait de 1,7 % cette année avant de reculer de 0,1 % en 2009, selon les calculs les plus pessimistes de COE-Rexecode, intégrant les effets négatifs de la crise financière actuelle. La France ne fera pas d'étincelles. Son PIB progresserait de 0,9 % et de 0,7 % en 2008 et 2009, ces prévisions pouvant être abaissées si la crise devait perdurer.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.