Le pouvoir d'achat, dernière carte de Bercy pour relancer la croissance

Le pire est-il réellement passé ? Malgré les difficultés de l'industrie, la montée du chômage, le maintien à un niveau historiquement bas du moral des Français et des chefs d'entreprises, Bercy en semble convaincu, même si cette reprise de l'activité sera moins vigoureuse que prévu. En effet, alors qu'elle tablait jusqu'ici sur une augmentation de 1 % du PIB en 2010, après un plongeon de 3 % cette année, Christine Lagarde vise désormais une croissance de 0,5 %, en ligne avec la prévision du consensus.Comment les experts du ministère aboutissent-ils à cette augmentation de l'activité qui, même revue à la baisse, reste encore trop élevée aux yeux de certains économistes, comme ceux de BNP Paribas qui envisagent un repli de 0,6 % de la croissance l'année prochaine ? En tablant sur une légère accélération de la consommation, soutenue à la fois par la modération de l'inflation (+ 1,2 % après + 0,4 % en 2009) et les dépenses gouvernementales en faveur des ménages, en particulier les plus modestes (voir tableau). Ces dépenses, dont le montant total s'élève à 14 milliards d'euros sur la période 2009-2010, limiteraient ainsi l'érosion du pouvoir d'achat du revenu disponible brut. Mieux, il progresserait plus vite en 2009 (+ 1 %) qu'en 2008 (+ 0,6 %), selon Bercy, alors même que le PIB chute brutalement. « Cette résistance relative de la consommation est en lien direct avec la dissipation prochaine des effets de la crise », estime-t-on dans l'entourage de Christine Lagarde.montée du chômageLes économistes sont plutôt sceptiques, compte tenu du recul de la masse salariale en 2009 et en 2010, de la montée du chômage ? l'Unedic comme Bercy prévoit 591.000 destructions d'emplois en 2009 ?, de la baisse de l'effet richesse consécutif au retournement du marché immobilier, entre autres. « La consommation marquerait nettement le pas par rapport à son rythme des années 1998 à 2000 [3,4 % l'an] », avancent Éric Heyer et Mathieu Plane à l'OFCE, en tablant sur une progression de 0,5 % de la consommation en 2009 et en 2010. « Alors que l'effet positif de la modération de l'inflation cessera de jouer à plein dès cet été, les effets des multiples plans de relance et des stabilisateurs automatiques seront limités en raison d'une part de la crainte du chômage et, d'autre part, de la remontée du taux d'épargne », précise Mathilde Lemoine chez HSBC France. « Selon nos calculs, une hausse de 1 point du déficit public se traduit par une baisse de 0,7 point de la consommation, les ménages reconstituant leur épargne pour pouvoir faire face aux éventuelles augmentations d'impôts. Une hausse de 1 point du taux de chômage entraîne un recul de 1 point de la consommation. Résultat, si le déficit s'élève à 7 % du PIB et que le taux de chômage grimpe à 11,4% fin 2010, la consommation chutera de 5 points », calcule-t-elle.Quelles conclusions peut-on tirer du nouveau diagnostic de Bercy ? Le principal enseignement réside dans l'incapacité de l'économie française à changer de modèle, du moins à court terme. Alors que le gouvernement multiplie les mesures pour favoriser l'innovation, celle-ci reste uniquement stimulée par la consommation. En chute libre cette année (? 9,4 %), puis à un rythme plus modéré en 2010 (? 1,2 %), l'investissement restera moribond. Le commerce extérieur peut-il prendre le relais de la consommation ? Bercy n'y croit pas, estimant qu'il retirera 0,4 point de PIB à la croissance en 2009 et 2010.
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