Les outils des années 30

Ce n'est pas la crise de 1929, puisque nous sommes en 2008. Mais la crise de 2008, à coup sûr, a déjà sa place dans les manuels d'histoire, quels que soient ses développements ultérieurs. Des chutes de 5, 10, voire 20 % des indices boursiers dans le monde entier, suivies de rebonds et de rechutes aussi abyssales, des marchés d'actions fermés, des banques nationalisées en catastrophe, des autorités qui ne parviennent pas à rassurer plus de quelques heures d'affilée : tout ceci n'a que de très rares précédents. Rétrospectivement, on s'en veut d'avoir utilisé le mot crise à tout bout de champ. Un travers bien français : nous sommes les seuls à avoir appelé " la crise " une période de trente années au bas mot, commencée avec le premier choc pétrolier et durant laquelle la croissance moyenne a été de 2,3 % par an, le PIB n'ayant reculé que deux fois, en 1975 et 1993. Regrettable dévaluation du vocabulaire. Car cette fois, le terme crise trouve légitimement à s'employer. Les dirigeants politiques, rendons leur hommage pour une fois, n'ont pas trop tardé à réagir. Avant que la situation ne prenne un tour catastrophique, ils répétaient que tout allait bien, et ils avaient raison de le faire. Ils admettent aujourd'hui que l'heure est grave et ils ont raison de le faire. Car, dans le même temps, ils mettent en place les garde-fous dont disposent encore les États-nations : la capacité de garantir, de nationaliser, de restructurer pratiquement sans limite. Quitte à renier les convictions de toute une vie, comme le secrétaire au Trésor Henry Paulson, qui incarne à lui tout seul l'échec du système Wall Street. Ces mêmes dirigeants, plutôt mal que bien, tentent aussi de coordonner leurs interventions. Jusqu'à présent, tout ce qui a été essayé va dans le sens du bien public, en Europe et aux Etats-Unis. Curieusement, on y retrouve des outils très semblables à ceux qui avaient été imaginés dans les années trente. Le sauvetage des banques par l'État avait été lancé par la République de Weimar, suivie par le New Deal de Roosevelt. L'Italie de Mussolini, elle, avait mis en place un vaste holding public, l'IRI (Istituto per la ricostruzione industriale), qui avait vocation à relever toutes les entreprises importantes menacées de faillite. C'est précisément ce que le Premier ministre François Fillon a proposé hier de créer en France. Reste à espérer que d'autres idées des annés trente, les mauvaises, ne ressortent pas à leur tour.
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