Le dialogue social se rompt en Espagne

Déjà chahuté sur le plan économique, José Luis Rodríguez Zapatero risque désormais de l'être aussi sur le plan social. Les syndicats viennent en effet de confirmer la rupture du dialogue avec la CEOE, la confédération patronale : pour la première fois depuis sept ans, il n'y aura pas d'accord-cadre entre interlocuteurs sociaux sur la politique salariale, dernier signe de la détérioration du climat social. De tels accords-cadres constituaient pourtant l'un des grands acquis de la démocratie espagnole retrouvée. Le dernier en date, signé en 2002 et renouvelé ensuite tous les ans, prévoyait pour la négociation collective une hausse de salaire de 2 % ? la prévision officielle d'inflation de la BCE ? avec un ajout en fonction de la productivité, et une clause de révision si la hausse réelle des prix dépassait trop la prévision officielle. Lorsque l'inflation était élevée, ce système permettait de limiter les spirales de hausses, l'éventuel rattrapage salarial se produisant a posteriori. Mais aujourd'hui que l'inflation ne dépasse plus 0,8 %, le patronat exige une révision d'ensemble du système. Les divergences entre interlocuteurs sociaux sont en fait plus vastes. Les syndicats soupçonnent le patronat de vouloir tirer profit de la crise pour faire passer à la hussarde ses revendications traditionnelles. Ils avaient très mal accueilli la prétention de la CEOE d'obtenir une réduction du coût du licenciement, ou la suppression de l'autorisation administrative préalable pour les licenciements collectifs. euphémisme L'exigence formulée par le patronat d'une réduction sensible de ses cotisations à la Sécurité Sociale n'avait pas davantage trouvé grâce à leurs yeux. Mais le grand problème réside dans le futur de la négociation collective elle-même. Le patronat exige sa « décentralisation », un euphémisme pour réclamer la fin des accords par branches ou par secteurs. Il fait valoir que dans le contexte actuel de récession, il est plus important que jamais d'adapter la politique salariale à la situation concrète de chaque entreprise en matière de bénéfices et de productivité. Mais les syndicats soupçonnent la CEOE de vouloir ainsi couper court à l'« effet d'entraînement » qui permet aux grandes entreprises, où le pouvoir de mobilisation des travailleurs est plus élevé, de faire profiter de leurs acquis les plus petites, où ils jouissent d'un poids moindre. Un problème clé dans un pays où les PME représentent toujours l'essentiel du tissu productif !Thierry Maliniak, à Madrid
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