Imposer un quota de femmes dans les conseils peut-il changer la gouvernance des entreprises  ?

Daniel LebègueOUICette diversité, nous en avons bien besoin en France !Le moment est venu de donner un coup d'accélérateur à la nomination de femmes dans les conseils d'administration. Nous ne sommes pas des fanatiques de la loi, mais force est de constater une grande inertie collective sur la question. En 2005, l'IFA avait ainsi émis une recommandation, sur la base du volontariat, avec l'objectif d'atteindre 20 % de femmes dans les conseils à la fin 2008. Quatre ans plus tard, la proportion de femmes dans les conseils des sociétés du CAC 40 n'a pas progressé d'un iota pour se maintenir autour de 8 %. Et une bonne partie de ces femmes sont des représentantes des salariés ou de l'État. Celles issues du monde des affaires demeurent toujours l'exception. Le même constat peut être fait pour l'ensemble des sociétés cotées au SBF 120. C'est pourquoi nous soutiendrons une initiative législative car, à nos yeux, cette question est tout à fait essentielle, sans doute même plus que la question des rémunérations des dirigeants qui sensibilise certes l'opinion mais qui reste cantonnée à quelques cas particuliers. En revanche, la diversité des compétences et des profils des administrateurs constitue un gage de bonnes pratiques de gouvernance, dont font partie d'ailleurs les rémunérations. Et cette diversité, nous en avons bien besoin en France ! Nos conseils souffrent encore d'une trop forte endogamie, la cooptation mutuelle au sein d'un petit monde des affaires restant trop souvent la règle. Bref, il serait bon d'aérer un peu nos conseils. L'expérience de certains pays scandinaves, en particulier la Norvège, montre non seulement que les sociétés, au départ réticentes, ont facilement tenu l'objectif mais qu'elles s'en félicitent aujourd'hui car cela a permis de renouveler en profondeur les conseils et d'élever globalement la qualité du débat collectif. La présence significative de femmes a de fait insufflé aux conseils une nouvelle dynamique par une plus grande diversité d'expériences et de sensibilités. Et ce ne sont pas les candidates qui manquent. Plus de 30 % des adhérents à l'IFA sont des femmes et les chasseurs de têtes se montrent de plus en plus actifs dans la recherche de candidates pour sélectionner les meilleurs profils. Au travers de la diversité, c'est la qualité future du travail de nos conseils qui est en jeu. nUn rapport sur l'égalité professionnelle, remis mercredi au gouvernement, propose d'instaurer un quota de 40 % de femmes dans les conseils d'administration et de surveillance dans les sociétés cotées dans un délai de six ans. Une première échéance à deux ans est fixée avec un objectif de 20 %, contre 8 % aujourd'hui. Le rapport déplore que les instances dirigeantes des grandes entreprises soient composées à 90 % d'hommes et souligne combien l'accès aux plus hautes fonctions dans l'entreprise reste difficile pour les femmes. Il suggère par conséquent de suivre l'exemple de la Norvège qui, en quelques années, a imposé et dépassé un objectif de 40 % de femmes dans les conseils, sous peine de sanctions. Propos recueillis par Éric Benhamou NONFrançois-Xavier DudouetL'intention est louable mais l'idée d'imposer un quota de femmes serait au mieux sans effet sur le fonctionnement des conseils et, au pire, dangereux pour la cohésion de la place de Paris. De fait, le capitalisme en France s'apparente très fortement au capitalisme « rhénan » où il existe une très grande interpénétration des conseils par les patrons eux-mêmes. Autrement dit, contrairement aux pays de culture anglo-saxonne, les grands patrons du CAC 40 entretiennent leurs relations d'affaires au travers des conseils d'administration. C'est une manière de consolider dans le temps leurs liens, de manifester concrètement le milieu des affaires tel qu'il existe en France et d'asseoir une certaine solidarité de place. Ce qui permet accessoirement au capitalisme français de rester français ! Dans un pays comme les Pays-Bas, où les liens entre patrons et entre les conseils sont relativement distendus, les milieux d'affaires ont rapidement été disloqués dans la mondialisation et les principales entreprises rachetées par des intérêts étrangers. Plus le réseau social entre les patrons est dense et étroit et moins les grandes entreprises sont susceptibles d'être victimes de rachats hostiles. D'où la tendance très développée en France de maintenir à tout prix ces liens sociaux. Pour voir les femmes s'implanter durablement dans les conseils, il faudrait qu'elles soient plus nombreuses à diriger des grands groupes. Tant que ce ne sera pas le cas, la place des femmes au sein des conseils n'aura pas beaucoup d'effets sur la gouvernance, comme d'ailleurs la place laissée aux administrateurs salariés ou aux administrateurs dits indépendants n'a pas réellement bouleversé l'ordre de choses ! Ce qui importe le plus, c'est bien la capacité d'un administrateur à parler d'égal à égal avec le président du conseil et cette capacité ne dépend évidemment pas d'un statut d'indépendant ou autre ? au contraire, il peut exister un rapport de sujétion pour un administrateur professionnel ? mais bien du poids qu'il représente, c'est-à-dire de l'importance de la société qu'il dirige. Pour bien faire, il faudrait plutôt imposer un quota de femmes au sein des comités exécutifs, traditionnels viviers des futurs patrons, pour espérer voir des administrateurs femmes véritablement influentes. nIl faudrait surtout qu'elles soient plus nombreuses à diriger les grands groupes.
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