« Plutôt que de restructurer, il s'agit en réalité de rebâtir »

Vos prévisions de baisse de 8 % à 12 % du marché des équipements télécoms en 2009 ne sont-elles pas pessimistes??Nous adoptons une approche prudente, et non pessimiste. Le mieux qu'il puisse nous arriver est que le marché baisse moins qu'anticipé. Il y a eu beaucoup de plans qui ont déçu dans cette entreprise, il vaut donc mieux nous préparer au pire et voir ce que nous pouvons faire. J'ai écouté nos clients, qui sont prudents pour 2009. Il nous faut donner un nouvel élan à cette entreprise. Nous avons les actifs et les talents qu'il faut. Cela prendra deux ans. Nous serons à l'équilibre l'an prochain et profitables en 2010.Aviez-vous imaginé une telle chute du marché??Oui, mais ce n'est pas dramatique. Je suis assez optimiste sur le potentiel de cette entreprise, sa capacité à se différencier par la technologie. Tout l'enjeu est de traduire cela dans un nouveau modèle économique. Plutôt que de restructurer, il s'agit en réalité de rebâtir.Quel sera ce nouveau modèle??Nous allons aider nos clients et les utilisateurs à mieux profiter du Web grâce à des services et logiciels offrant sécurité, protection des données, paiement sécurisé. Nous avons la technologie et les talents pour y arriver. Il faut redynamiser cette organisation.La Bourse a mal réagi à l'annonce de votre plan?Les marchés attendent de voir, je comprends cela très bien. Je ne m'attends pas à ce qu'ils adhèrent immédiatement à cette stratégie. Cette entreprise a de nouveau une âme, elle a une feuille de route pour redevenir bénéficiaire et cela se traduira dans son bilan.Quelle est votre situation financière??Cette réorganisation est entièrement financée. Quant à la vente de notre participation dans Thales, nous sommes confiants, ce sera la cerise sur le gâteau?! Nous n'avons pas de problème de trésorerie.Êtes-vous assez forts dans les technologies d'avenir, comme le LTE, pour la téléphonie mobile de quatrième génération??La technologie LTE a été au départ testée dans nos Bell Labs?! Nous avons pris la décision d'investir significativement plus dans cette technologie. L'avantage du LTE est que, pour la première fois, dans la téléphonie mobile nous aurons une technologie unifiée à la fois pour les opérateurs utilisant le GSM et ceux utilisant le CDMA [aux États-Unis en particulier, Ndlr]. Or, nous sommes très forts en CDMA et nous progressons en UMTS.Ne vous heurtez-vous pas toujours aux difficultés d'intégration entre Alcatel et Lucent??C'était un problème largement surestimé. Il n'y a pas de bataille franco-américaine, il n'y en a plus depuis l'arrivée de Philippe Camus, le président du conseil. Nous avons un nouveau conseil d'administration uni, qui parle d'une seule voix. Je ne connais pas les passeports des administrateurs, on ne dirige pas une société en fonction des nationalités. Le problème d'identité a disparu. Le vrai problème était plutôt les querelles de chapelles, entre les divisions. Or il faut que l'optique et l'IP travaillent ensemble, que notre recherche soit plus collaborative et ouverte. Ici, c'était pire que Fort Knox?! Le Web 2.0 est ouvert. Il faut s'y adapter.Quelles sont vos relations avec Philippe Camus??Philippe est la raison pour laquelle je suis venu. Nous nous sommes mis d'accord sur les principes de gouvernance en une heure. C'est un super bon président du conseil. Un type formidable, une trouvaille pour l'entreprise. Mais ce n'est pas quelqu'un de reposant, il prend ses distances et sait rester critique, il est réellement indépendant et très investi dans l'entreprise, tout comme moi.Régler le problème d'identité passe-t-il par un changement de nom??C'est vrai que ce n'est pas un nom idéal, Alcatel-Lucent c'est trop long. Beaucoup de gens en interne disent « ALU », en référence à notre code ticker en Bourse. Mais ce n'est pas une priorité de changer de nom. Nous ne cherchons pas à repeindre la façade mais à réparer les fissures. Cette entreprise a désormais une direction, un but. Maintenant notre défi est d'exécuter ce que nous avons annoncé. C'est un défi intéressant. Nous allons être très occupés au cours des douze prochains mois. J'ai l'impression que nous sommes sur la bonne voie. Si nous exécutons ce plan, nous redeviendrons une entreprise normale, comme les autres.Propos recueillis par Delphine Cuny et Olivier Pinaud
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