Le retour des « camelôs »  à São Paulo

Cette année, Embraer avait prévu de livrer 350 appareils à ses clients. Pris dans les turbulences de la crise planétaire, le constructeur aéronautique s'apprête à effectuer 242 livraisons en 2009. Solution préconisée : le départ de 4.200 employés. Un partenariat a été mis en ?uvre entre l'entreprise et la mairie de São José dos Campos pour venir en aide aux licenciés. Ceux-ci se voient offrir des exemptions fiscales, bénéficient de conseils de la part de spécialistes de l'emploi et sont invités à créer leur propre entreprise avec des prêts bancaires spéciaux. Leurs soins médicaux sont pris en charge par Embraer pendant l'année suivant la rupture du contrat de travail.Rares sont les nouveaux chômeurs au Brésil qui reçoivent une telle attention. Au début du printemps, le pays a enregistré son taux de chômage le plus élevé depuis deux ans (8,9 %). « Perdre son emploi, c'est tout perdre du jour au lendemain », témoigne Luis, 28 ans, mis à la porte en mai dernier de la compagnie aérienne qui l'employait. Conséquence : il a dû renoncer à l'appartement qu'il louait à proximité de l'aéroport de Congonhas, pour retourner vivre chez sa mère à São Paulo, avec son épouse Thaïs et leur petite fille Luiza Maria. Pendant cinq mois, Luis va recevoir une indemnité chômage mensuelle de 185 euros. Ce maigre pécule est le même pour tous les licenciés brésiliens, quels que soient leur fonction et leur ancien salaire ! Luis a droit également à « son FGTS », le Fonds de garantie du travailleur, alimenté par les employeurs, à hauteur de 8 % du salaire. Quand un Brésilien est mis à la porte, il reçoit la totalité de cette épargne, à laquelle s'ajoute une amende infligée par le gouvernement, correspondant à 40 % de l'épargne cumulée..produits contrebandiersAprès ces versements : plus rien, le grand saut dans le vide. « Les chômeurs doivent se débrouiller pour survivre », raconte Clésson, 54 ans. Licencié il y a cinq ans, Clésson était gérant de planification dans une entreprise fabriquant des systèmes de pesage pour le commerce et l'industrie. « Quand on se retrouve sans emploi, on n'a d'autre choix que de se mettre à son compte, le plus souvent sur le marché noir. On peut s'improviser consultant, faire des petits boulots, du genre plombier, ou devenir ?camelô?. » « Camelô » désigne les milliers d'hommes et de femmes qui vendent dans les rues des produits souvent issus de la contrebande. Clésson, qui gagnait 1.850 euros par mois, a vu ses revenus divisés par deux en offrant ses services de consultant à des entreprises qui le payaient au noir. Depuis, il a déménagé à Curitiba, une petite ville industrielle à 330 kilomètres de São Paulo, où il vend des assurances privées : il espère retrouver son ancien salaire. Yann Le Houelleur, à São Paulo
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