La réforme des Sicav et FCP monétaires  fait débat

Avec 510 milliards d'euros d'actifs sous gestion, les fonds monétaires représentent un pan important de l'industrie de la gestion collective en France. Les propositions de réforme de ces produits, malmenés par la crise du crédit, étaient donc très attendues. L'Autorité des marchés financiers vient de les publier. Une consultation publique est ouverte jusqu'au 15 avril.Aux critères actuels (référence à un indice monétaire de la zone euro, pas d'exposition au risque action et une sensibilité comprise entre 0 et 0,5), le régulateur en propose trois autres. Pour être labellisé « monétaire », un fonds ne pourra détenir aucun titre ayant une maturité supérieure à deux ans ; la maturité moyenne des titres détenus par un fonds monétaire ne pourra être supérieure à un an et le risque de crédit devra rester compatible avec le faible niveau de risque global d'un fonds monétaire. Le premier critère ne s'applique rait pas aux titres acquis depuis le 1er janvier 2008. Mais après la mise en place définitive de cette réforme, prévue dans le courant du second semestre 2009, cette règle devra logiquement s'appliquer à tous les titres en portefeuille.Sur ces propositions, les avis sont partagés (lire ci-contre). Même si elles sont validées, des zones d'ombres subsistent. Tout d'abord, où classer les fonds qui ne remplissent pas ces critères ? « Ils devront vendre des titres pour se mettre en conformité ou seront reclassés en diversifiés ou obligataires », indique Stéphanie Flavegece, responsable de la gestion monétaire chez ING IM. Sur la maturité maximale des titres, Fitch Ratings indique que « c'est cohérent avec le standard international et cela limitera le risque de liquidité et de marché que ces fonds peuvent assumer ». Des investisseurs et gérants estiment toutefois que deux ans c'est trop. « Dans nos fonds monétaires notés 3A, la maturité des taux fixes est de treize mois », précise Stéphanie Flavegece. Quant à la maturité moyenne du portefeuille d'un an, « elle est supérieure à ce qui se pratique sur d'autres marchés, constate Aymeric Poizot, responsable du département gestion d'actifs chez Fitch Ratings. Aux États-Unis ou sur des marchés offshore, elle est en moyenne comprise entre 30 et 120 jours ces deux dernières années ». Mais la proposition la plus vague porte sur « le risque de crédit d'un fonds qui doit rester compatible avec le faible niveau de risque pris par un fonds monétaire ». Pour Henri Riey, président de l'Aidea (Association pour l'information et la défense des épargnants et des actionnaires), « l'AMF n'indique pas comment apprécier le risque de crédit d'un fonds monétaire. Faudra-t-il le déduire de la volatilité du portefeuille, de la VAR ou le calculer à partir d'une formule à venir ? Et comment s'assurer qu'il reste compatible avec un faible niveau de risque global ? Or, c'est de là que vient tout le problème de la crise du crédit. »La préoccupation porte aussi sur le rendement des produits. Aux États-Unis, où le marché pèse 3,8 trillions de dollars, des fed funds compris entre 0 et 0,25 % impactent à la baisse le rendement moyen, qui est aujourd'hui de 0,29 % contre 1,57 % un an plus tôt. Une fois les frais de gestion prélevés, le porteur ne récupère pas grand-chose. Pour Peter Rizzo, directeur de la notation de crédit des fonds chez S&P, « nous devons être particulièrement attentifs aux fonds monétaires qui allongent leur durée de vie moyenne pour augmenter leur rendement dans un environnement de taux faibles. En cas de remontée des taux, ces produits pourraient être exposés à des pressions sur leur valorisation liées à la hausse des taux ainsi qu'à une baisse de leurs encours ».scénario extrêmeLa zone euro se croyait à l'abri d'une situation à l'américaine. Mais avec un taux directeur de la Banque centrale européenne (BCE) à 1,50 % et un Eonia à 0,85 %, la donne a changé. Le scénario extrême serait un Eonia à 0 %, ce qui signifierait un taux de la BCE à 0 %. Dans ce cas, la question de perte en capital se posera. Pour assurer un rendement minimal sans risque de crédit, facturer des frais de gestion paraît délicat, car cela pourrait produire des performances négatives. Pour l'éviter, pourquoi ne pas ramener les frais de gestion aux alentours de zéro ? « Mais comment vivrons-nous ? » répond un gérant. Il existe d'autres moyens de rentabiliser les fonds monétaires en chargeant les actifs du fonds. On peut aussi faire confiance aux sociétés de gestion pour trouver des alternatives plus rémunératrices.Globalement, « avec un rendement faible proche de zéro, une fois les frais de gestion appliqués, le risque est de voir les investisseurs sortir de ces fonds pour aller sur d'autres classes d'actifs plus rémunératrices, déclare Aymeric Poizot. Cela traduirait une amélioration de la situation sur les marchés qui, paradoxalement, pourrait poser des problèmes aux fonds monétaires en cas de rachats importants ». Avec le risque de ne plus jouer leur rôle de financement de l'économie. Mais les dernières données d'Europerformance-Six Telekurs sur les souscriptions des monétaires réguliers ne vont pas dans ce sens. En deux mois, ces produits ont collecté 38 milliards d'euros, en hausse de 10,4 %, signe d'une forte aversion au risque. Les investisseurs privilégiant le triptyque liquidité, sécurité et transparence. Ce qui fait le bonheur des banques. n« l'AMF n'indique pas comment apprécier le risque de crédit d'un fonds monétaire. »
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