Quand la culture vient au secours

La culture, c'est ce qui reste quand on a tout oubli頻 : cette vieille boutade revient au goût du jour en cette période de récession économique mondiale. On pourrait penser que les consommateurs, qui rognent sur leurs dépenses, feraient également des économies sur la culture. C'est le contraire qui se produit. Expositions, films, théâtres connaissent un regain de fréquentation. Ainsi, quelque 7.000 personnes se pressent chaque week-end à l'exposition Andy Warhol, à Paris. Celle sur Picasso et ses maîtres a battu des records, avec près de 800.000 entrées. Mais c'est surtout le cinéma, loisir le moins cher, qui remporte la palme. Les productions légères, telles que « Coco » de Gad Elmaleh, « la Première Étoile » de Lucien Jean-Baptiste, ou « Safari » d'Olivier Baroux connaissent un vrai succès, avec plus d'entrées pour « Coco » que pour l'oscarisé « Slumdog Millionaire » de Danny Boyle ! La fréquentation des salles de l'Hexagone s'est inscrite en hausse dès le début de cette année (+ 5 % en janvier). Et si, en février, le chiffre (? 3,5 %) s'est révélé décevant, c'est avant tout parce que février 2008 avait connu une affluence exceptionnelle, grâce au succès extraordinaire à l'époque des « Ch'tis »?réaction à la criseLe phénomène est identique dans d'autres pays occidentaux, touchés eux aussi par la crise. En Espagne, où elle est particulièrement sévère, les cinémas n'ont jamais été aussi remplis. Au-delà des valeurs sûres, comme « les Étreintes brisées », le dernier film d'Almodovar, les films de pure distraction, tels que « Monstres contre Aliens » et « Fast & Furious », ont fait un tabac dès leur sortie. Même chose aux États-Unis, où la comédie de jeunesse inspirée d'un feuilleton de Disney Chanel « Hannah Montana » a enregistré le double des entrées espérées par Walt Disney et engrangé 34 millions de dollars de bénéfices pendant le week-end de Pâques.mieux qu'en 1997Les deux premiers mois de l'année ont même battu des records outre-Atlantique. Sur février uniquement, les ventes de billets se sont élevées à 770 millions de dollars, dépassant les records de février 2004 et 1997. « La Passion du Christ » de Mel Gibson, en février 2004, et la nouvelle sortie de « Star Wars », en février 1997, avaient pourtant permis aux producteurs d'engranger 83,8 millions de dollars le premier week-end de la sortie pour le premier, et 125 millions de dollars en un mois pour le deuxième. Les entrées totales sur février sont en hausse de 10 % sur l'année précédente, et l'année 2009 s'annonce comme un record pour l'industrie d'Hollywood !Pour les observateurs, la corrélation entre les profits d'Hollywood en hausse et la baisse de Wall Street est bien réelle. Déjà, lors de la Grande Dépression, 60 à 70 millions d'Américains remplissaient les salles toutes les semaines. Près d'un quart de la population était au chômage, pourtant, et les dollars étaient rares. « Le cinéma n'était pas cher, les Américains avaient besoin de s'évader, et, en plus, à la fin des années 1930, l'air conditionné était apparu dans les salles », rappelle Richard Abrams, professeur d'histoire américaine à l'université de Californie à Berkeley. D'ailleurs, les films qui remportaient le plus de succès décrivaient la vie facile des familles aisées, comme dans les comédies de Fred Astaire ou, au contraire, les aventures de gangsters au c?ur tendre qui faisaient là aussi rêver. Mais c'est l'histoire d'amour et de haine d'« Autant en emporte le vent », sortie en 1939, qui s'inscrit comme le record de tous les temps : en dollars actuels, c'est près de 1,4 milliard de dollars qu'il a rapporté. Cependant, Richard Abrams n'attribue pas le succès des « motion pictures », uniquement à la crise de 1929. « C'est parce que le muet cédait la place à d'autres films, plus modernes, que le cinéma a connu un tel succès à l'époque, » précise-t-il.redonner de l'espoirIl n'empêche, les valeurs véhiculées par ces films, l'individualisme, la mobilité sociale ou l'absence, même, de classes, ainsi que les bienfaits du progrès ont largement contribué à la reprise économique, en redonnant de l'espoir aux gens. « Les gouvernements devraient plus ?uvrer à soutenir le moral des ménages plutôt que de s'appuyer sur des plans de relance économique », déclarait d'ailleurs il y a quelques jours l'économiste Robert J. Shiller, professeur à l'université de Yale et auteur d'un récent ouvrage, sur les « esprits animaux » qui dirigent l'économie, avec George A. Akerlof.
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