Les monnaies asiatiques dans le collimateur de la spéculation

Les monnaies asiatiques sont à nouveau entrées dans "l'ère des turbulences ", pour reprendre le titre de l'ouvrage publié il y a tout juste un an par Alan Greenspan, à qui certains font aujourd'hui porter le chapeau de la crise financière.Les pressions qui s'exercent sur les won, roupies et autres pesos réveillent les mauvais souvenirs de la crise financière de 1997-1998, qui avait vu les monnaies de la région tomber les unes après les autres tels des dominos, après la rupture du lien fixe qui unissait le baht thaïlandais au dollar.Il y a cependant une différence de taille avec la situation de la précédente décennie : alors que les caisses des banques centrales locales étaient vides, leurs coffres regorgent aujourd'hui d'un trésor de guerre de réserves de changes. Si l'on exclut les 1.900 milliards de dollars de réserves de la Chine, l'Asie dispose de 2.500 milliards de dollars. Une manne qui a pourtant commencé à fondre en septembre, sous l'effet des ventes de dollars des banques centrales soucieuses de prévenir une trop forte chute de leur monnaie. Au moins cinq d'entre elles ont dû se résoudre à intervenir sur le marché des changes, Corée du Sud en tête, mais aussi Malaisie, Inde, Philippines et Thaïlande. Or, les réserves de changes peuvent s'assécher beaucoup plus vite qu'elles ne se sont constituées, lorsque les coups de boutoir de la spéculation s'intensifient. La France des années 1980, qui avait perdu tout moyen de contrôler son franc, en a été l'exemple le plus saisissant.DEUX MONNAIES SEULEMENT TIRENT LEUR EPINGLE DU JEULes monnaies asiatiques n'ont cessé de se déprécier cette année et le mouvement s'est accéléré depuis le début août. Le won sud-coréen s'est dévalorisé de 24,5 %, les roupies pakistanaises (tombées hier à un plancher historique face au dollar) de 23 %, indiennes de 18,5 %, népalaises de 18 %. Le peso philippin et le baht thaïlandais, moins attaqués, n'en ont pas moins cédé 13 %. La spéculation s'est même attaquée récemment à des monnaies dont la stabilité est légendaire, à l'instar du dollar de Singapour, qui a perdu 8 % de sa valeur depuis le milieu de l'été, et du ringgit de Malaisie, en baisse de 6 %. Seules deux monnaies tirent leur épingle du jeu : le dollar de Hong Kong, qui a maintenu un lien fixe - le fameux peg - avec l'ex-grand frère des États-Unis, et le yuan, dont la Banque Populaire de Chine contrôle très étroitement les fluctuations.Pour éviter que la situation ne dégénère une nouvelle fois en crise, il est sans doute temps que les pays asiatiques passent de la parole à l'acte et qu'ils renforcent leur coopération régionale. Pourquoi ne pas imaginer qu'ils mettent en commun leurs fabuleuses réserves de change pour servir d'amortisseur aux attaques spéculatives.
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